Photo : M. Hacène Par Samir Azzoug Abdou Benziane a été enterré hier au cimetière de Sidi Yahia. Sans oraison funèbre, juste le prêche de l'imam, la mise en terre de celui que certaines personnalités présentes qualifiaient d'«avant-gardiste de la sphère intellectuelle nationale» fut rapide et digne. La mort du «solitaire», comme l'a décrit un des ses anciens voisins de Garidi II, a réuni une foule de personnalités des mondes politique, médiatique et culturel. De Mouloud Hamrouche et Ali Benflis, tous deux anciens chefs du gouvernement, à l'actuel ministre de la Santé, Djamel Ould Abbès, en passant par le colonel El Habiri de la Protection civile, tous sont allés saluer une dernière fois l'homme de communication qui continue de symboliser une certaine ouverture par la parenthèse 1990-1991, où il fut directeur général de l'Entv. La présence la plus importante dans le petit cimetière de Sidi Yahia était, sans conteste, celle de ses compagnons de la plume. Le chroniqueur Abdou B aura réussi à mobiliser un nombre important de journalistes et de patrons de presse, une corporation qui ne se regroupe plus que dans les cimetières. Abdou B aura marqué la scène médiatique et culturelle de traces indélébiles. La télévision par son passage court, mais intense à sa tête. Le cinéma par la revue dont il était le fondateur (1970-1980), Les Deux écrans. La presse écrite éclairée par ses chroniques qu'il continuait de passer sur les colonnes de ce journal, la Tribune, et du Quotidien d'Oran. La plume chevaleresque, le verbe acerbe et l'argument affûté, Abdou B expliquait et prédisait, attirait l'attention sur les actes et les non-actes. En observateur aguerri, il ne lésinait pas sur la dépense d'énergie pour comprendre, toujours au plus près, les tenants et aboutissants de la société à laquelle il appartenait pleinement. Dernier effort en date, il s'est donné corps et âme, au détriment de sa santé, au difficile exercice d'écoute de la société. Portant à bout de bras le projet marathonien du Cnes, pour les assises sur le développement local et les attentes citoyennes. Durant des mois, il sillonnera avec l'équipe du Cnes le territoire national pour écouter les Algériens. Comme une raison de vivre. Ironie du sort, il aura son malaise mortel lors de la clôture de ces assises. Transporté à l'hôpital Mustapha Bacha, il décédera dans la nuit de vendredi d'un malaise cardiaque. Pour comprendre l'esprit et les motivations de Abdou Benziane, il faudra lire ses messages. Dans l'une de ses dernières chroniques dans les colonnes de ce quotidien (la Tribune) il écrit : «L'Algérie semble porteuse d'une éventuelle avancée démocratique, à condition que toutes les forces au pouvoir et dans l'opposition mettent de côté leur ego, leurs ambitions et leurs petits calculs d'épicier du coin, pour aller avec courage vers des compromis et des consensus patriotiques.» De lui, on gardera ce message d'espoir rehaussant une kyrielle de critiques.«J'étais un de ses lecteurs assidus. Je ne ratais rien de ses écrits. Avec la perte de Boudoukha, le décès de Abdou B est une grosse perte pour la presse nationale», regrette un jeune journaliste. Au final, on retiendra cette phrase dite par un inconnu au téléphone, passant par le sentier du cimetière au moment de la procession funèbre : «Je suis bloqué. On enterre une grande personnalité. J'ai du mal à passer.» S. A.
Le ministre de la Communication rend hommage au défunt Abdou Benziane Le ministre de la Communication, Nacer Mehal, a rendu hommage au défunt Abdou Benziane, plus connu sous le nom de Abdou B, qui a mené un combat au quotidien «dans la lignée d'une Algérie plurielle et démocratique». Dans un message de condoléances adressé à la famille de Abdou Benziane, décédé samedi des suites d'un malaise cardiaque, le ministre a indiqué que le défunt «talentueux journaliste et dirigeant mobilisateur, défenseur des causes justes et avocat de la liberté d'expression, ne s'est jamais départi d'une posture patriotique pour inscrire son combat au quotidien dans la lignée d'une Algérie plurielle et démocratique».«La famille de la presse vient de perdre l'un des ses premiers bâtisseurs en la personne de Abdou Benziane, qui a consacré sa vie entière à la défense de la profession et à ses valeurs essentielles», a ajouté le ministre de la Communication dans le message. M. Mehal a indiqué que le défunt «a laissé le souvenir du confrère fidèle en amitié et du père de famille affectueux et exemplaire», soulignant «qu'en ces moments pénibles pour tous, mais résigné devant la volonté d'Allah, je m'incline en hommage à la mémoire de cet homme de rectitude qui a marqué les deux générations de la presse nationale depuis le recouvrement de l'indépendance». Le ministre a également rendu hommage «avec respect» au défunt pour «son engagement et son militantisme», en adressant à sa famille et à ses proches ses condoléances attristées et ses sentiments de solidarité et de vive sympathie.