C'est presque à la limite de l'indécence que des personnes ou institutions en arrivent à organiser chaque année une cérémonie destinée à récompenser les meilleurs parmi les meilleurs éléments du football national. Dans un mimétisme confondant et un ridicule plagiat parce qu'importée, cette manifestation dont les promoteurs n'ont même pas cherché à aller loin dans le choix de l'enseigne est pompeusement appelée «Oscars du football»… Ça ne s'invente malheureusement pas. Joueurs, coachs, dirigeants récompensés méritent à leurs propres yeux d'abord et ensuite à ceux des organisateurs un plébiscite où la flagornerie et la duplicité le disputent à l'absence d'une quelconque humilité… le monde factice des paillettes, des faux-semblants et du clinquant payé sur le dos des contribuables l'emportant sur la retenue et la raison. Cette raison, juste retour de flamme, a fait hélas défaut à Oran. Pis , puisqu'il s'agit en fait d'une déraison, celle-ci risquera d'être omniprésente aujourd'hui dans un nombre appréciable et épars d'autres pôles déjà en ébullition en ce sens qu'ils recèlent en eux tous les ingrédients susceptibles d'en faire de potentielles poudrières. Il n'est pas exclu qu'à Batna, Réghaïa, Mohammadia, El Harrach, Béjaïa, Dréan, des jeunes qui aiment plus qu'à l'excès même et donc parfois à la mort leur équipe mais également d'autres qui n'ont rien à voir avec le football n'attendent quelque part que le coup de sifflet final d'un arbitre annonçant «…la fin des hostilités» comme l'écrivent nos confrères sans se soucier du poids des mots… pour commencer les leurs d'hostilité. Et ironie du sort, les dérapages peuvent venir aussi bien des aigris que des fêtards. L'Algérien dans ces cas de figure n'ayant pas naïvement le sens de la mesure… mais de la baston dès qu'il s'agit d'exciper un trop-plein de mal de vivre. Tout le monde n'a pas une vocation de harrag. Les responsables du sport ont commencé depuis quelques jours à sérieusement cogiter sur le brûlant dossier du football et pour certains, dont le président de la fédération, à ne pas exclure l'éventualité d'une «saison à blanc». En s'adjoignant un militaire à la retraite pour réfléchir aux voies et moyens de sortir le secteur du marasme dans lequel il baigne, le ministre de la Jeunesse et des Sports, aux yeux des connaisseurs et sans que soient remises en question les capacité et compétence de la personne désignée… n'a en réalité opté que pour l'illusion de trop. Avec la crise morale qui le lamine, le premier sport national ne se comptabilise pas en divisions armées disciplinées mais plus en nombre de divisions dans les mentalités qui font que Haddadj tempère ses ardeurs sur la proposition d'un championnat à blanc par la nécessité d'«un examen [de la proposition faite, ndlr] au bureau fédéral» et «…le cas échéant, soumettre la question à l'assemblée générale». Ce qui somme toute est logique parce que la réglementation le veut ainsi et ce ne sont pas les bravades officielles des uns et des autres qui changeront quelque chose à l'ordre, voire au désordre établi. Il suffirait de rappeler l'affaire MJS/FAF pour ne pas dire Guidoum et son issue. Or, il est indéniable que la situation du football aujourd'hui est telle qu'elle ne pourrait se suffire du seul respect de la légalité plus particulièrement si celle-ci n'est opposable qu'aux organes et institutions représentant les pouvoirs publics et non pas aux flibustiers et ils constituent, est-il besoin de le concéder, la majorité… qui ont pris en otage les associations parmi les plus populaires et fait des stades de véritables chaudrons dans lesquels se fabrique et est entretenue sciemment une forme de violence que le premier responsable de la fédération considère, même si c'est à raison en grande partie, qu'«il faudrait les chercher [les raisons] au sein de la société». Mais le plus inquiétant dans l'évolution assez timide de ce débat, c'est qu'une fois la saison terminée, les responsables à tous les niveaux vont à nouveau être frappés d'amnésie et le prochain championnat de reprendre comme si de rien n'était. A. L.