Photo : Riad De notre correspondant à Annaba Mohamed Rahmani
Malgré les mesures prises par le gouvernement et consacrées par la circulaire n° 062/inst/SP/PM du 22 décembre 2008 ayant pour objet la réduction des importations et la promotion de la production nationale, la Tuberie sans soudures (TSS, Pipes and Tubes Algeria) a été exclue de tous les marchés de Sonelgaz, Sonatrach et Naftal. Ces entreprises qui constituent pour la TSS ses principaux clients, ont préféré importer de l'étranger des milliers de tonnes de ces produits, ignorant superbement cette circulaire. Cette situation a eu de graves conséquences sur la TSS qui s'est retrouvée sans plan de charge depuis plus de 15 mois. L'usine, avec ses 370 travailleurs, est au bord de la faillite. Le syndicat de l'unité se démène, soutenu par le conseil syndical du complexe sidérurgique ArcelorMittal pour sauver cet outil de travail. La production de la TSS représente seulement 12% des besoins du marché national. Pourtant, elle n'arrive pas la satisfaire parce que parmi les commandes exprimées et pour lesquelles des avis d'appels d'offres sont lancés, il est exigé des formats qui ne sont pas encore fabriqués par cette entreprise. De plus, on ne peut soumissionner pour un lot ou se constituer en groupe pour pouvoir y participer. Aussi, l'entreprise s'est-elle rabattue sur les tubes casing (coffrage des puits). Mais là aussi de nouvelles conditions ont été posées par Sonatrach, conditions ayant trait au chiffre d'affaires et à un certificat API auquel la TSS avait tenté de se conformer. En juin 2010, une délégation de la Sonatrach est venue homologuer l'usine et s'était déclarée satisfaite. Une contre-visite était prévue dans les mois qui suivaient. Mais alors que tous se préparaient à cette contre-visite, la TSS est informée que Sonatrach changeait de système d'homologation et donc encore une fois Pipes and Tubes Algeria se trouve exclue de la liste des fournisseurs. Cette exclusion ne concerne pas seulement la TSS mais tout le groupe Anabib qui emploie près de 1 000 travailleurs. Dernièrement, le Secrétaire général du syndicat du groupe, Smain Kouadria, avait déclaré q'une commande de 160 km de tubes a été confiée à un trader turc alors qu'elle devait revenir normalement à Altumet dont le plan de charge est presque nul. Ce trader est exclu de la zone euro parce que son produit est subventionné par l'Etat turc, ce qui, en Europe, est interdit par les règles de la compétitivité. La part des traders du marché algérien des tubes s'en est trouvée augmentée, passant durant l'exercice 2009/2010 à 41,45% représentant 731 millions de dollars. Toutes les commandes de Sonatrach ont été prises par des Américains, des Libanais, des Hollandais et des Chinois. Un trader libanais, à lui seul, a engrangé 454 millions de dollars, se faisant une part de marché de 25,70% alors que Pipes and Tubes Algeria a été disqualifiée et sa soumission rejetée. «C'est un sabotage économique […], nous allons avoir recours à des actions extrêmes pour défendre notre outil de travail», avait déclaré M. Kouadria, Une lettre a été récemment adressée au ministre de l'Industrie par le conseil syndical de la TSS pour lui expliquer la situation de l'entreprise du fait de l'absence d'un plan de charge depuis plus de 15 mois réduisant le chiffre d'affaires de l'entreprise de près de 90%.Y sont clairement dénoncés les comportements de Sonatrach. Ce qui est pour le moins curieux dans l'affaire de la TSS, c'est que cette entreprise, implantée au sein du complexe sidérurgique d'El Hadjar et dont le groupe Sider détient 30%, a investi des millions de dollars pour se conformer aux exigences de Sonatrach, son principal client, mais celui-ci s'en est détourné. A quoi donc sert cette circulaire ministérielle si elle n'est pas appliquée ?