Le détroit d'Ormuz, passage stratégique du trafic maritime pétrolier mondial est devenu, en ce passage à l'année nouvelle, le centre d'intérêt des médias scrutant les signes annonciateurs de la conflagration. Cela a été l'occasion, pour l'Iran, d'envoyer les messages qui s'imposent à ses irréductibles antagonistes. Téhéran dit désormais clairement avoir la capacité de se défendre contre toute agression. Des tests de missiles de croisière de moyenne et de courte portée ont été effectués pour signifier que l'Iran ne se laisserait pas faire. Un missile d'une portée de 200 km doté de nouvelles technologies a été utilisé pour la première fois. L'autre missile, de courte portée Nasr, a aussi été testé avec succès selon les militaires iraniens. De quoi irriter du côté de la maison Blanche. Les élections présidentielles américaines prévues en novembre prochain et l'acharnée bataille annoncée entre républicains et démocrates devraient, selon certains analystes, diminuer les risques d'attaque militaire visant l'Iran. Mais pour d'autres observateurs, ce sont justement les rendez-vous politique cruciaux des grandes puissances, notamment en temps de crise, qui poussent à rechercher la confrontation. Réactions : les Etats-Unis ont menacé Téhéran de nouvelles sanctions. Le président américain, Barack Obama, a écourté ses vacances de fin d'année pour venir promulguer une loi de financement du ministère de la Défense, qui prévoit des sanctions contre le secteur financier de Téhéran. «Toute banque étrangère qui ferait affaire avec les banques iraniennes, privées comme publiques, y compris la Banque centrale, serait sanctionnée.» Cette loi restrictive vise à diminuer les revenus que l'Iran tire du pétrole. Une telle évolution entraînerait une paralysie de l'économie iranienne, dépendant à 80% de l'or noir. Les Occidentaux refusent de calmer le jeu, brandissant inlassablement l'accusation nucléaire. Téhéran est quasiment inculpé «d'enrichir de l'uranium à des fins militaires.» Le dernier rapport de l'AIEA, l'Agence internationale de l'énergie atomique, avait pour but de mettre davantage de pression sur Téhéran. Depuis la parution de ce fameux rapport en novembre 2011, les Occidentaux ne cessent de charger l'Iran. Ce dernier ne ferme pas, cependant, la porte au dialogue. Par la voix de son négociateur en chef, Saïd Jalili, il propose toujours de reprendre la discussion avec les Occidentaux sur le décidément controversé programme nucléaire. Dialogue interrompu depuis un an. «Les sanctions nuiront aux pays qui les imposent plus qu'aux pays qui les endurent» estiment certains analystes. Dans un contexte de crise pétrolière majeure «les Occidentaux ne peuvent pas sanctionner» un pays comme l'Iran, qui possède la deuxième plus grande réserve de pétrole de la planète. Mais les docteurs folamour pourraient en décider autrement. Detroit d'Ormuz : la «carotide de l'occident» «Une menace répondra à une menace». La phrase de Hossein Salami, l'un des commandants des Gardiens de la révolution résume le bras de fer actuel autour du détroit d'Ormuz. Ce passage maritime long de quelque 63 kilomètres et large de 40 kilomètres, se situe entre le golfe Persique et le Golfe d'Oman. Cet espace est appelé la « carotide de l'Occident » pour son importance dans la circulation des sources d'énergie occidentales. L'endroit stratégique est devenu le champ d'un jeu du chat et de la souris entre Téhéran et Washington. L'Iran n'a pas apprécié la présence d'un porte-avion américain, il y a quelque temps. «Nous ne renoncerons pas à nos décisions stratégiques si les intérêts vitaux de l'Iran sont sapés de quelque manière que ce soit», souligne Hossein Salami. « Fermer le détroit est très facile pour les forces armées iraniennes. Il est complètement sous notre contrôle. Le fermer, c'est comme boire un verre d'eau, comme on dit en persan », ajoutera, comme pour provoquer, l'amiral Habibollah Sayyari. L'appréhension et l'inquiétude face à un nouveau choc pétrolier sont patentes à travers le tapage médiatique en cours. Ce détroit est un emplacement particulièrement stratégique. Ormuz est devenu un excellent instrument de mesure de l'intensité de la tension. Les tests militaires iraniens, légitimes pour n'importe quel Etat, portent à nouveau la tension à son comble entre Téhéran et Washington. Les Etats-Unis qui ont conclu un important contrat militaire avec l'Arabie Saoudite tiennent au contrôle du détroit. Le lendemain des tests, sur la chaîne CBS, Léon Panetta, secrétaire américain à la Défense affirme que les Etats-Unis n'hésiteront pas à «répondre » par la force si l'Iran cherche à bloquer cet emplacement stratégique. Barack Obama, de son côté, précise qu'il s'agit là «d'une autre ligne rouge à ne pas franchir». La hausse du ton est confirmé par le Général Dempsey, plus haut gradé américain qui a notamment servi pendant la guerre du Golfe et la guerre en Irak : «L'Iran joue à un jeu dangereux dont le piège peut se refermer sur le Moyen-Orient ; le Moyen-Orient, mais aussi d'autres régions, nous entraînant dans un conflit majeur et qui relancerait la course aux armements.» Washington a décidé de garder ses navires de guerre déployés dans le Golfe, maintenant la tension à son comble. Prudent, cependant, le Pentagone dit officiellement vouloir «faire baisser la température», et ne pas vouloir déclencher un conflit ouvert. En effet, une conflagration ouverte dans cette région explosive est une porte béante vers l'inconnu. M. B.