De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar La saison automnale est communément perçue comme la période de l'année où la lecture est à l'honneur. Plus prosaïquement, c'est l'intermède où le livre se porte particulièrement bien sur le marché. Sous d'autres cieux, on parle de rentrée littéraire qui s'accompagne évidemment de la fièvre des distinctions discernées aux «grands auteurs» et tout le tralala médiatique qui va avec. Un moment propice pour s'approvisionner en nouveautés. Donner un coup de jeune à sa bibliothèque. Chez nous, c'est plutôt les rentrées scolaire et universitaire qui suscitent un rush sur les librairies. Ces dernières achalandent bien leurs rayons à l'occasion. Pour cette raison et comme partout à travers le territoire national, les libraires sont fortement sollicités ces jours-ci à Béjaïa. Les parents d'élèves s'y rendent en masse pour acquérir les manuels et les guides scolaires afin de mieux accompagner le cursus de leurs enfants. Sur ce chapitre, on y trouve un large éventail de choix, le créneau ayant été largement investi par les éditeurs, aussi bien publics que privés, ces dernières années. Pour les étudiants aussi, notamment en ce qui concerne les sciences humaines, de bonnes références sont aujourd'hui disponibles. Les collections spécialisées de l'Office algérien des publications universitaires (OPU) et celles des Presses universitaires de France (PUF) rencontrent un certain succès auprès des intéressés. Cependant, le large public est aussi présent. Malgré la cherté excessive du livre, le lecteur débourse pour s'instruire ou tout simplement s'informer. Un intérêt particulier est accordé aux témoignages des hommes politiques et à l'histoire récente du pays. Mémoire d'un Algérien de Ahmed Taleb Ibrahimi, Messali Hadj et ses compagnons à Tlemcen, récits et anecdotes de Khaled Merzouk, le Colonel Si Mohand Oulhadj face aux crises internes et à l'opération Jumelles de Amar Azouaoui, le Colonel Amirouche, entre légende et histoire de Djoudi Attoumi, pour ne citer que ceux-ci, rencontrent un certain succès. S'agissant de littérature proprement dite, et du roman en particulier, les Funérailles, de Rachid Boudjedra, et la Gardienne des ombres, Don Quichotte à Alger de Waciny Laredj semblent bénéficier des faveurs du lectorat qui n'en finit pas, toutefois, de relire Amine Maalouf et Paulo Coelho. Dans la section des enquêtes journalistiques, c'est l'Anglais Gordon Thomas (avec sa trilogie l'Histoire secrète du Mossad de 1951 à nos jours, les Armes secrètes de la CIA et le Livre noir de la CIA, les archives dévoilées) qui a apparemment le vent en poupe, même si l'on s'intéresse aussi aux travaux du Français Eric Laurent. L'essai de Hocine Belloufi, le Grand Moyen-Orient, guerre ou paix, plaidoyer pour une nouvelle révolution arabe, paru à la maison LL d'Alger, suscite aussi un vif intérêt. Cependant, les libraires ne sont pas pour autant satisfaits. Les difficultés du métier sont remises à chaque fois sur le tapis. La cherté du livre (absence de subvention), les difficultés d'approvisionnement (un réseau de diffusion archaïque) et les charges sociales et fiscales sont les trois points qui reviennent comme un leitmotiv dans la bouche des concernés.