Les suites de l'affaire Mohamed Merah occupent toujours le champ politique, judiciaire et médiatique de la France. Alors que son frère, Abdelkader, a été mis en examen et écroué pour complicité d'assassinats et d'association de malfaiteurs, accusations qu'il rejette ; alors que la polémique sur l'action menée par le Raid pour tuer le jeune terroriste continue et pendant que ses parents font des démarches pour son enterrement en Algérie, dans la région de Médéa, Nicolas Sarkozy, le candidat à sa propre succession à la présidence de la République, a fait, hier, une sortie pour le moins originale et surprenante qui soulève une mini-tempête.Interrogé par une station de radio d'information, l'actuel chef de l'Etat est revenu sur l'assassinat de militaires par Merah pour déclarer : «Je rappelle que deux de nos soldats étaient musulmans, en tout cas d'apparence, puisque l'un était catholique.» Le mal est fait même s'il s'est repris pour ajouter : «D'apparence, comme l'ont dit ‘‘la diversité visible''.» Il y avait «d'origine musulmane», maintenant place à «musulman d'apparence» ! Ainsi, à en croire Sarkozy, le musulman est identifié au faciès. Ce qui, on l'imagine, allait susciter de rapides et vives réactions des milieux politiques. Le premier à dégainer a été le Parti communiste qui a déclaré tout net que «cette expression, en plus d'être d'une bêtise insondable, est clairement raciste». Pour le PC, c'est une «inadmissible provocation» cette expression de «musulman d'apparence». «Comment, a ajouté ce parti, le président de la République arrive-t-il à confondre, si ce n'est en le faisant volontairement, affaire de foi et couleur de la peau ? En France et dans le monde, il y a des gens athées et il y en a de toutes les couleurs ! Les préjugés racistes du candidat de l'UMP n'y changeront rien.»Le candidat à la présidence du Front de gauche (dont le PC est membre), Jean-Luc Mélenchon, a réagi en annonçant sur son compte Twitter : «Tous musulmans d'apparence le 22 avril !», date du premier tour de l'élection. Le Parti socialiste n'est pas en reste. Sa responsable de l'immigration, Mireille Le Corre, a relevé : «Alors que Nicolas Sarkozy avait refusé de lier l'immigration et le drame de Toulouse, il parvient en une phrase à résumer l'ensemble des préjugés dont souffrent nombre de Français d'aujourd'hui, rappelés constamment à leur origine réelle ou supposée et à leur religion présumée.» «La République ne reconnaît aucune apparence. Il serait temps que Nicolas Sarkozy s'y fasse et qu'il cesse d'utiliser des mots qui divisent», a-t-elle ajouté.Au cours de la même émission radiophonique, le président-candidat a donné une information attendue après que son conseiller spécial, Henri Guaino, eut déclaré dimanche dernier que la France ne voulait «aucun prêcheur extrémiste» sur son sol. Le prêcheur en question est, plutôt, le prédicateur qatari Al Qaradaoui, qui devait venir à Paris pour intervenir le 6 avril devant des milliers de fidèles lors du rassemblement annuel de l'Union des organisations islamiques de France (Uoif). Sarkozy a jugé que le prédicateur n'est pas le bienvenu en France. «J'ai indiqué à l'émir du Qatar lui-même que ce monsieur n'était pas le bienvenu sur le territoire de la République française», a déclaré l'actuel locataire de l'Elysée, parce qu'il tient «des discours qui ne sont pas compatibles avec l'idéal républicain». Pour Al Qaradaoui, «le djihad est un devoir pour tous les musulmans». Il est âgé de 86 ans, et d'origine égyptienne.