Photo : S. Zoheir De notre correspondant à Oran Samir Ould Ali
Le fait a été constaté sur tout le territoire national : ce sont, en grande partie, les personnes âgées qui se sont rendues aux urnes ce 10 mai et, aux côtés de l'électorat traditionnel du FLN, qui ont permis au vieux parti de remporter la victoire écrasante que l'on sait. Ce choix pour le statu quo qui, pour beaucoup, a valeur de stabilité, même précaire, est, de ce point de vue, un vote-refuge à mettre sur le compte de ceux qui ont vécu l'enfer des années 1990 et qui ont la hantise de renouer avec les violences de cette époque pas très lointaine.Dans leur grande majorité, les jeunes, eux, ont préféré faire l'impasse sur des échéances dont ils disent ne pas saisir l'importance ni l'impact qu'elles auront sur leur avenir immédiat. «Jamais les élections n'ont changé quelque chose dans notre pays, ce sont toujours les mêmes qui tiennent les rênes du pouvoir. En quoi celles de jeudi prochain seront différentes ?», nous a demandé un jeune plongeur dans un café de la banlieue oranaise la veille des élections. Les discours du président de la République et les appels au vote des partis ? «Je n'ai pas entendu les discours ni les appels. Mais ils tentent de défendre bec et ongles leurs acquis, et je ne pense pas que le peuple fasse partie de ces intérêts-là !», ajoutera-t-il. La fracture entre la jeunesse et les institutions de la République comme avec l'exercice de la politique est, d'ailleurs, telle que la campagne électorale a laissé de marbre la majorité des jeunes algériens et que, contrairement à ce que certaines parties ont tenté de faire accroire, la participation de cette frange de la société au scrutin n'a pas été très marquante. Les journalistes et différents observateurs l'ont noté durant toute la journée de jeudi dernier, il y avait plus de personnes âgées que de jeunes gens dans les bureaux de vote. «Il y a eu tellement de trahisons et d'engagements non tenus qu'il faudra beaucoup de temps et d'efforts pour convaincre les jeunes qu'en démocratie, la politique est le seul moyen de parvenir au changement», ont admis des candidats aux élections en reconnaissant avoir eu du mal à mobiliser les gens durant les trois semaines de campagne. «Le véritable travail commence maintenant, affirme un observateur de la scène politique algérienne. Aux nouveaux partis de démontrer qu'ils sont là pour les changements et non pas seulement pour courir après l'APN. Si un travail sincère est amorcé, les jeunes le sentiront, et il est très probable qu'ils s'impliqueront davantage dans la vie politique !» C'est donc aux nouveaux partis (dont certains bénéficient déjà d'un réel capital sympathie auprès de certaines catégories de la société) de démontrer la sincérité de leur démarche et de réhabiliter la pratique politique auprès des jeunes algériens. Ceux-ci, ils l'ont démontré à chaque fois que nécessaire, ne demandent qu'à prendre part à la vie politique du pays et contribuer à son développement.A condition, toutefois, qu'on cesse de leur faire jouer le rôle de l'alibi. «Constamment marginalisés, perpétuellement méprisés, les jeunes ne suscitent l'intérêt – ou la crainte – qu'à l'approche des élections. Il est temps que cela change…», assène un jeune journaliste effaré par l'hypocrisie dont les pouvoirs publics et les partis politiques ont fait preuve jusqu'à aujourd'hui dans leurs rapports aux jeunes.