Photo : Sahel Par la rédaction culturelle Quatre auteurs algériens ont débattu vendredi, à Alger, autour du thème «Cinquante ans de littérature algérienne, et après ?», s'accordant à caractériser cette période, en particulier les vingt dernières années, par l'émergence de voix «singulières» et la place plus grande donnée à l'individu dans la production littéraire algérienne. Lors d'une rencontre organisée dans le cadre du 5e Feliv (Festival international de la littérature et du livre jeunesse), Anouar Benmalek, Maïssa Bey, Hamid Abdelkader et Yahia Belaskri ont évoqué, sous la modération de l'universitaire Mohammed Sari, leur travail d'écrivains et le rapport à l'histoire contemporaine de l'Algérie dans leurs œuvres respectives. Anouar Benmalek a estimé, en ouverture du débat, que «la préoccupation politique» n'est plus au centre du travail de l'écrivain algérien, remplacée par une orientation «plus proche de l'humain et de l'individu». L'auteur du Rapt pense que «ces vingt dernières années ont profondément changé le statut de l'écrivain algérien», passant d'écrivain «glorificateur du pouvoir» ou d'écrivain «opposant» à celui «d'agent de description relation sociales et humaines» à partir des années 80. Une capacité d'analyse de la «complexité» de la société, qualifiée de «primordiale» par Anouar Benmalek, et capable d'éviter les affrontements comme ceux, violents, des années quatre vingt-dix, autrement dit, d'être un espace de contradictions apaisées. Rebondissant sur l'intervention d'Anouar Benmalek, Maïssa Bey a évoqué les années 90 comme celles où on ne «voulait pas donner la parole à ceux qui avaient quelque chose à dire sur l'humain», une situation qui a justifié l'utilisation du pseudonyme de Maïssa Bey par l'écrivaine, qui y trouvait «le seul moyen de continuer à écrire» tout en restant en Algérie. Pour l'auteure de Surtout, ne te retourne pas, parler du statut de l'écrivain revient à «figer ce dernier dans une fonction, avec des privilèges qu'il faudrait défendre», lui préférant celui de «citoyenne qui ne veut plus être passive», en utilisant les mots pour agir dans sa société. En réponse à une question concernant la «difficulté d'écrire en étant une femme», l'auteure croit que «le plus dur reste la capacité de dévoilement», c'est à dire la recherche et le partage d'une «vérité personnelle» qui est, selon elle , «un acte profondément subversif, pour une femme, dans des sociétés comme les nôtres». Abordant la question du rapport entre la littérature et l'Histoire, le journaliste et écrivain Hamid Abdelkader a estimé qu'«une des fonctions de l'écrivain est de ‘'secouer‘' des choses qui ne font pas partie de l'imaginaire politique», en référence, à la fois, à ses livres sur la guerre de libération et à son travail de romancier. Le rapport à l'Histoire est, pour l'auteur du Glissement, un rapport «critique», porté par un «héros savant», mis en scène dans ses romans. Yahia Belaskri a, lui aussi, insisté sur l'aspect «humain et personnel» de son travail d'auteur, confiant à l'assistance des éléments biographiques en rapport avec son roman Si tu cherches la pluie, elle vient d'en haut. Il a, en outre, proposé d'ouvrir sur la littérature algérienne une réflexion qui «dépasse le cadre des ces cinquante dernières années», se référant à L'âne d'or d'Apulée, qui date de l'époque romaine.