De notre envoyée spéciale à Djanet Mekioussa Chekir Après presque une semaine d'animation, de compétitivité et de spectacles, le premier Festival de la chanson et de la musique targuies qu'accueille la capitale du Tassili, Djanet, s'est clôturé lundi soir dernier après la proclamation des lauréats des concours prévus dans les trois disciplines en lice : style moderne, imzad et tindi. Près de 200 troupes ont pris part à cette première édition du festival que les organisateurs comptent pérenniser et rééditer chaque année, pour peu que les conditions, nécessaires à son maintien et à sa longévité, soient réunies. S'il y a une spécificité à retenir déjà de cette manifestation, c'est la prédominance de la musique moderne, dominée par la guitare électrique, sur le patrimoine traditionnel qui s'appuie sur les instruments ancestraux que sont l'imzad et le oûd (le luth). Le nombre des troupes modernes représentant les trois wilayas participantes, Tamanrasset, Illizi et Adrar, est assez illustrateur de l'évolution de ce genre qui plaît tant à la jeunesse locale. Baignée dans le style purement traditionnel tout au long de sa vie, celle-ci exprime une recherche d'un renouveau et d'une mélodie plus cadencée et qui sied le plus à l'âge de la vitalité et de l'action. C'est ainsi qu'on a pu constater à quel point les jeunes de Djanet étaient en parfaite osmose avec les rythmes frénétiques de la guitare électrique, sur fond de sonorités et de mélodies traditionnelles. L'absence de loisirs et d'occupation y est aussi pour beaucoup dans cette expansion enfiévrée à se défouler dès la première note exécutée par les différentes troupes. Les défenseurs de la culture authentique voient d'un œil plutôt inquiet cette floraison de chansons rythmées et les jeunes, censés assurer la relève, se détournent de plus en plus de cet héritage légué par leurs aînés. Dans le cas de Djanet, ils sont moins d'une dizaine de chanteurs traditionnels face à une multitude de troupes modernes. La disparition du talentueux représentant de la chanson targuie, tant à l'échelle nationale que sur la scène internationale -qui en fait l'a révélé aux Algériens-, Baly Othmane, représente une grosse perte pour ce genre musical. Fort heureusement, son fils Nebil est appelé à perpétuer le legs de son père. Il faut noter cependant que le défunt Baly a été le précurseur du croisement des rythmes et des musiques. Il a ouvert la musique targuie traditionnelle à de nouvelles sonorités. On retiendra l'admirable melting-pot qu'il réussira avec le percussionniste Steve Shehan dans l'album Assouf. Mais l'ouverture ne se transforme pas en phagocytose et la musique garde son cachet traditionnel. C'est en fait à ce judicieux équilibre que les artistes de Djanet et d'ailleurs doivent parvenir s'ils entendent réussir l'union entre authenticité et modernité. Au troisième jour de cette manifestation, les délégations participantes ont été conviées à découvrir ou redécouvrir la «Sebiba», un spectacle haut en couleur et en émotions, symbolisant l'un des patrimoines culturels les plus ancestraux de la région et qui est fêté tous les jours de «Achoura». Présenté sur la place appelée «L'oued», à la sortie de Djanet, ce spectacle a profité également aux nombreux touristes qui se trouvaient ce jour-là dans cette ville. Munis d'appareils photo et autres caméras, les visiteurs ne semblaient pas vouloir rater une seule séquence de la représentation qui leur renvoie un tableau des plus exotiques de cette partie du Sud algérien. La majorité d'entre eux se sont dits heureux que le hasard ait fait coïncider leur séjour à Djanet avec la tenue de ce festival.