Photo : Riad De notre correspondant à Annaba Mohamed Rahmani Subissant de plein fouet les contrecoups de la crise financière mondiale, le groupe Arcelor Mittal s'est trouvé emporté par la déferlante qui a été à l'origine de la chute de son action cotée en Bourse. En l'espace de 3 mois, l'action Arcelor Mittal sur les principales places boursières a joué au yoyo. De 57,220 euros au 31 juillet de l'année en cours, elle est passée à 17,51 euros hier à la Bourse de Paris avec une chute libre sans précédent enregistrée le 27 octobre dernier, l'action avait alors atteint sa cotation la plus basse avec 15,775 euros. Les assurances portées par le discours triomphaliste tenu au mois d'avril 2008 à New York par M. Lakshmi Mittal qui affirmait que la tension offre-demande persisterait (ce qui éloignerait définitivement le problème des surcapacités) sont aujourd'hui démenties par une crise qui a ébranlé les fondements mêmes du système capitaliste. Les projets d'expansion du géant de la sidérurgie mondiale - qui va passer d'une production de 110 millions de tonnes à 150 millions de tonnes - ont été mis en veilleuse. La demande a brusquement chuté dans le secteur automobile et celui de la construction, principaux clients des produits sidérurgiques et le problème des surcapacités a resurgi avec tout ce que cela induit comme mesures pour maintenir les prix sur le marché. Réduire la production de 30 à 35% est l'objectif visé par Arcelor Mittal durant le quatrième trimestre, ce qui, bien sûr, va avoir des conséquences douloureuses sur le monde du travail. Ainsi, en Europe, ce sont pas moins de 12 hauts fourneaux qui vont être mis à l'arrêt, les personnels y sont obligés de solder leurs congés, à l'exemple des sites de Florange, Dunkerque ou Fos-sur-Mer ( France). Le complexe sidérurgique d'El Hadjar (Annaba), propriété du groupe n'a pas été épargné, il est lui aussi concerné par le plan mis au point par la direction générale d'Arcelor Mittal. Ainsi, lors d'une réunion tenue le 2 novembre en cours, le syndicat et la direction locale de l'usine ont convenu d'un certain nombre de mesures qui mettraient à l'abri le site tout en préservant les emplois des quelque 6 000 travailleurs. Le plan arrêté par les 2 parties et mis à exécution consiste en la réduction du nombre d'entreprises activant dans le cadre de la sous-traitance, ce qui permettrait une réduction des coûts qui ferait baisser le prix de revient du produit fini. Toutes les charges ayant trait à la maintenance industrielle, aux heures supplémentaires à la location des matériels ainsi qu'à certains frais seront revues à la baisse. «Il s'agit de faire en sorte que toutes les dépenses soient réduites au minimum possible, de façon à redresser la situation ; ces mesures d'austérité sont indispensables pour maintenir l'activité du complexe», nous confie un syndicaliste. Selon nos informations, le haut fourneau n°2 sera mis à l'arrêt pour, «officiellement», une opération de rénovation de certaines installations, ce qui entraînera bien sûr une baisse de la production. En vérité, l'usine d'El Hadjar a été en quelque sorte sauvée par les différents incidents qui l'ont secouée au début de l'année en cours et qui ont compromis le business plan initial qui prévoyait la production de 1,3 million de tonnes pour des capacités installées de 2 millions de tonnes. En effet, l'explosion du convertisseur de l'aciérie à oxygène n°2, en janvier 2008, suivie six mois plus tard de l'incendie qui avait ravagé une aile du complexe, détruisant complètement une turbine de 53 mégawatts ainsi que d'importants accessoires, a réduit les capacités de production du complexe, qui a dû importer de l'étranger, à partir d'autres sites du groupe, le produit semi fini, les billettes, entres autres. Les travaux de réparation, la rénovation et la modernisation des installations ont influé négativement sur le rendement. Le problème de surcapacité ne se posant pas pour le site de Annaba, puisqu'il est encore en phase de mise à niveau pour être au même rang que ceux implantés en Europe, les mesures prises ne peuvent affecter le personnel qui est ainsi maintenu. Cependant, au vu des développements que connaît la situation au niveau mondial, la crise pourrait s'inscrire dans la durée et une baisse de la production de l'ordre de 5 % est à envisager pour l'année prochaine. Même le déstockage, dont l'achèvement est prévu pour le début de l'année prochaine, ne viendra pas à bout de cette crise dont les effets se prolongeront jusqu'en 2012 et même au-delà, selon les experts. Le complexe sidérurgique de Annaba est pris dans la tourmente, et, à moins d'un revirement de la tendance, il sera, lui aussi, confronté au problème de la réduction des effectifs.