La contestation contre les décisions «autoritaires» du président Mohamed Morsi ne faiblit pas. Bien au contraire. Elle prend de l'ampleur jour après jour. Outre les manifestants qui campent depuis deux nuits à la mythique place Tahrir, hier juges et journalistes décident de marquer leur désaccord avec la tendance totalitaire du Président Morsi. Prenant la tête du mouvement de contestation, le Club des juges a dénoncé une «attaque sans précédent contre les jugements du pouvoir judiciaire» et a appelé à une grève de tous les tribunaux du pays. Selon le juge Issam al-Tobgi, les «assemblées générales» des tribunaux dans chacune des 27 mouhafadhs du pays, à l'exception de celles d'Alexandrie et Beheira qui ont déjà annoncé un arrêt de travail, ont entamé des réunions pour décider de suivre ou non l'appel à la grève. Le juge a expliqué aux médias que le résultat dépendrait «de l'allégeance ou non des membres de ces assemblées au ministre de la Justice» nommé par M. Morsi, qui cumule déjà pouvoir exécutif et législatif, l'Assemblée ayant été dissoute avant son élection. A Alexandrie, deuxième ville du pays, et dans la province voisine de Beheira, les juges, déjà en débrayage, ont exigé «l'annulation» de la «déclaration constitutionnelle» avant de reprendre le travail. De leur côté les journalistes ne se contentent pas de la couverture médiatique des évènements que connait leur pays. Ils se jettent à l'eau et se déclarent ouvertement hostiles aux mesures présidentielles et revendiquent une plus large liberté d'expression. Le syndicat des journalistes égyptiens a appelé, hier, à une grève générale pour protester contre le manque de liberté de la presse dans la Constitution en cours d'élaboration, dans un contexte de crise déclenchée par un décret élargissant les pouvoirs du Président. Les journalistes ont voté pour la grève à l'occasion d'une réunion d'urgence de leur syndicat, mais n'ont pas encore défini de date. Les partisans du président Morsi, s'apprêtaient à manifester en fin de journée, à l'appel des puissants Frères musulmans. Le sit-in entamé vendredi soir par les détracteurs de Morsi se poursuivait encore hier sur la place Tahrir, où une trentaine de tentes ont été érigées. Il s'agit de la première crise majeure en Egypte depuis l'élection en juin de M. Morsi, devenu le premier président civil du pays, seize mois à peine après la chute de Hosni Moubarak en février. Une crise déclenchée le 22 novembre avec l'annonce d'une «déclaration constitutionnelle» par laquelle M. Morsi s'est doté de larges pouvoirs afin, selon son camp, d'accélérer les réformes démocratiques et en particulier la rédaction d'une nouvelle Constitution. Les détracteurs du président l'accusent de se comporter, comme son prédécesseur, en «pharaon» et de mettre en péril l'indépendance du pouvoir judiciaire. G. H./Agences