Photo : M. Hacène Par Karima Mokrani La fermeture de la clinique privée Amina, à Chiffa, dans la wilaya de Blida, suite à l'enregistrement de 13 cas de méningite, dont deux mortels, fait renaître un grand sentiment d'insécurité chez les praticiens et praticiens spécialistes de la santé publique. Ces derniers n'ont eu de cesse d'interpeller les autorités concernées sur la nécessité de procéder à un diagnostic profond du système de santé en Algérie et prendre les décisions nécessaires pour combler les lacunes et corriger les dysfonctionnements. «Nous réitérons notre appel à une refonte totale du système de santé en Algérie», insiste le président du Snpsp, le Dr Lyès Merabet, contacté hier par téléphone. Selon ce dernier, ce qui s'est passé à la clinique Amina pourrait avoir pour origine un problème d'hygiène (non respect des règles d'hygiène) ou d'aération (les conduits d'aération ne répondant pas aux normes ou sont vétustes, le risque de pollution de l'air dans les blocs opératoires et les salles de réanimation est ainsi plus important). Une enquête est en cours pour déterminer la cause principale de la réapparition de cette grave maladie à Blida. Sans vouloir minimiser l'ampleur de la catastrophe, le Dr Merabet indique que cela n'est pas propre au secteur privé, ni d'ailleurs à l'Algérie. «Plusieurs fois dans les établissements publics, nous procédons à des prélèvements sur le matériel et sur le personnel médical et paramédical qui participe à l'acte opératoire. Le risque de présence de virus ou/et de bactéries est constamment présent. C'est pour cela qu'il faut veiller au respect des règles d'hygiène et d'aération». Aussi, «ce n'est pas propre à l'Algérie, ça arrive même dans les pays les plus développés. Le meilleur moyen de prévention, c'est la régularité et la persévérance dans l'entretien». C'est cela justement qui fait défaut, semble-t-il. La preuve, ce n'est pas la première fois en Algérie qu'une clinique privée est fermée pour cause de manquement aux règles d'hygiène. La responsabilité de l'établissement, privé ou public, est engagée. La responsabilité du ministère de tutelle aussi: «La responsabilité du ministère de la Santé est aussi engagée. C'est lui qui est chargé du contrôle et du suivi. Ce qui s'est produit à la clinique Amina indique que le ministère a failli à sa mission.» Jusqu'à hier soir, aucune réaction officielle du département de l'ancien troisième homme de l'Etat, Abdelaziz Ziari, n'a été enregistrée. Même pas un petit communiqué pour dire qu'il suit de près l'affaire. Ce n'est pas son affaire, c'est celle de la DSP (Direction de la Santé et de la Population) de la wilaya de Blida. C'est elle, d'ailleurs, qui a pris la décision, lundi dernier, de procéder à la fermeture préventive de la clinique, mais avec beaucoup de retard, soit après la mort d'une femme et d'un enfant. Le Dr Mohamed Yousfi, en sa qualité de président du Snpssp mais aussi de chef de service des maladies infectieuses, à l'hôpital de Boufarik, est loin d'être optimiste quant à l'évolution de la situation. Selon lui, le nombre de cas de méningite dans cette wilaya, peut-être même ailleurs, pourrait connaître une hausse dans les prochains jours, du fait du nombre important de malades qui se sont fait opérer dans cette clinique privée. «Le nombre peut augmenter d'un jour à l'autre. J'appelle toutes les personnes qui se sont fait opérer dans cette clinique, particulièrement durant le mois de décembre dernier, à se présenter au service des maladies infectieuses de l'hôpital de Boufarik, sinon au centre infectieux le plus proche de leur domicile», a-t-il demandé hier. Un appel qui concerne également les proches des malades, puisqu'il s'agit d'une maladie contagieuse et, pire encore, d'un virus ravageurs. Des malades commencent à s'y rendre, la peur au ventre. Jusqu'à hier soir, aucun nouveau cas de méningite n'a été relevé. Espérons qu'il n'y en aura pas. La responsabilité du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière reste toutefois engagée, insistent encore des proches du secteur, du fait que la mission de contrôle et de suivi des établissements de santé, publics et privés, est à sa charge. Le Dr Merabet considère qu'il est impératif que le ministère revoit ses procédures d'octroi d'agréments aux établissements privés: «Ça se donne à gauche et à droite. Il faut arrêter cela».