Photo : Sahel Propos recueillis par Badiaa Amarni LA TRIBUNE : Al Salam Bank vient d'être inaugurée en Algérie. Peut-on savoir quelle est sa mission première ? Ibrahim Fenick : Sa mission est d'apporter à l'Algérie une valeur ajoutée, que ce soit au plan technologique, du savoir-faire ou du banking islamique. C'était là mon premier objectif lorsque j'ai proposé aux actionnaires d'ouvrir cette banque. Vous allez vous installer en Algérie dans un contexte économique un peu particulier et difficile marqué par la crise financière. Est-ce que vous ne craignez pas des répercussions négatives sur votre banque ? Je pense qu'on doit tirer des leçons de cette crise mais, en revanche, nous sommes arrivés au moment opportun et sommes en train d'étudier toute la conjoncture économique nationale et internationale et mettre en place un tableau de bord contenant des solutions pour l'économie algérienne afin de l'adapter à la situation internationale. De plus, nous sommes des businessmen et nous représentons une banque d'affaires qui doit tout prévoir et étudier toutes les options de même que les pour et les contre. Il ne faut pas nier la réalité, on est dans un contexte international et on doit être touché de près ou de loin par cette crise financière. Heureusement, qu'on vient de démarrer, et après évaluation de la situation internationale nous allons planifier et mettre en place notre plan de charge qui s'adapte à la conjoncture actuelle. Pourquoi avoir attendu jusqu'à aujourd'hui pour s'introduire en Algérie, et ne craignez-vous pas la concurrence du fait qu'il y a beaucoup de banques installées avant vous ? Je suis très à l'aise devant la concurrence et j'aimerais bien avoir d'autres banques qui présentent le même produit, car ce sera au profit du client algérien qui ne sera plus prisonnier du monopole. Cela va nous pousser à améliorer nos prestations et présenter des services de qualité. Quels sont justement les services bancaires qui seront proposés à votre clientèle ? Lors de l'inauguration de votre agence, vous avez dit qu'ils seront adressés aux grands investisseurs dans un premier temps. Pourriez-vous nous éclairer là-dessus ? Oui. En plus des services fournis par les autres banques, nous fournirons d'autres services et d'autres produits. Cela veut dire que tous les produits approuvés par la charia ou le banking islamique qui se traite à l'étranger vont être mis en place en Algérie. Nous avons segmenté nos services en le corporate banking, c'est-à-dire au financement des sociétés, car comme vous le savez, nous avons investi beaucoup pour notre infrastructure et notre personnel. Nous sommes des commerçants et nous allons vers les secteurs les plus rentables. Cela étant, nous n'allons pas oublier le retail banking qui viendra en deuxième phase après la stabilité de notre système et l'extension de notre réseau. Le retail banking demande un nombre important d'agences et, par conséquent, de personnels. Il sera destiné au financement des consommations de la clientèle : maisons, voitures… Des conventions avec des entreprises seront signées et nous traiterons avec une seule personne déléguée qui représente 200 ou 300 employés. Quand ces services seront-ils lancés ? Nous allons revoir notre orientation et d'ici trois mois nous allons évaluer la situation et décider quand ouvrir le retail banking. Est-ce que vous pourriez-nous donner, mis à part les services consommation, des détails sur les services que vous allez présenter à votre clientèle ? Il y a le service banking, les cartes électroniques qui seront paramétrées, le service SMS. Les produits sont el idjara (leasing), el mourabaha (la profitabilité : on prend un profit sur le financement, d'un actif), el moucharaka (la participation : on partage avec les clients les profits et les pertes), el modaraba, el sokouk (les bons islamiques). Cela, en plus d'el mouzaraa, d'el mourarassa et d'el moussakat pour le financement purement agricole. Justement, lors de l'inauguration de cette banque, vous avez souligné que vos services seront axés beaucoup plus sur le secteur agricole. Pourquoi choisir parmi vos priorités l'agriculture ? Effectivement, car l'agriculture est d'abord bénéfique pour les populations ; ensuite, si on arrive à décrocher des financements dans le secteur agricole on va aider non seulement la banque à avoir des profits mais on va aider l'Algérie à minimiser les importations. C'est une façon de participer au développement du secteur agricole et de réduire les importations. C'est là un grand enjeu et pour les opérateurs économiques et pour les autorités, et, de notre côté, nous essayerons de faire de notre mieux pour aider à réduire la crise alimentaire. Une façon de parer à la crise alimentaire ? Les objectifs d'El Salam Bank, c'est d'aider l'Algérie à se développer davantage dans le secteur agricole. Quel sera l'apport d'El Salam Bank pour l'économie algérienne ? Nous participerons au développement agricole, industriel et commercial. De plus, nous essayerons, et c'est l'un de mes objectifs en tant qu'Algérien ayant vécu à l'étranger, de former une équipe de banquiers algériens qui ont le même niveau qu'un banquier aux Etats-Unis, en Angleterre, en France, au Golfe ou à Singapour. C'est mon objectif primordial de former d'ici 5 à 10 ans une génération de vrais banquiers algériens. comment allez vous procéder ? Avez-vous mis en place un plan de formation ? Oui, au niveau de notre agence à Bab Ezzouar, nous avons réservé un étage pour cette tâche : la formation. Il y a un plan de formation pour tous les jeunes, surtout les universitaires, d'autant que nous avons recruté pas mal de nouveaux licenciés et ingénieurs en informatique. Et quel est le nombre d'employés ? On est 68 maintenant, et on va atteindre 94 d'ici la fin de l'année avec les autres agences. Est-ce qu'on pourrait avoir un petit bilan déjà ? Ça se passe bien. La réglementation algérienne dans le domaine financier et bancaire répond-elle à vos objectifs et ambitions ? Même la réglementation américaine et française n'est pas à la hauteur maintenant face à la crise mondiale. En Algérie, toute la place financière et même les autorités essayent d'améliorer les choses dans le bon sens. Et elles vont s'améliorer car la Banque centrale, le ministère des Finances, le Parlement sont en train de revoir toute la réglementation financière et bancaire en Algérie qui va s'adapter aux objectifs du pays.