Le patrimoine est défini de manière facétieuse comme étant «l'objet pour lequel on serait prêt à sacrifier temps et argent pour ne pas devoir le sacrifier». Qu'en est-il en Algérie ? On a un mois dédié au patrimoine, au cours duquel sites, monuments et vestiges patrimoniaux ainsi que des projets qui s'y rattachent, sont mis aux devants de la scène culturelle. Opérations de restauration en cours, obstacles, dangers menaçant des sites, nouvelles découvertes, réalisations, actions entreprises et/ou en plans sont détaillés pour tracer un tableau de la situation de notre patrimoine culturel tangible et intangible, qui, dans l'ensemble, est loin d'être dramatique. Déjà, avec la loi 98-04 relative à la protection du patrimoine, de l'avis de spécialistes, les richesses patrimoniales algériennes se sont trouvées une belle protection. Même si les textes d'application ont mis du temps à être élaborés, le cadre juridique en place a permis de défricher le terrain et tracer des perspectives. La création de secteurs sauvegardés autour des Casbahs est un des produits de cette réflexion qui a mijoté et mûri dans le cadre de cette loi. Des avancées ont ainsi été accomplies. Mais il y a encore du chemin à parcourir pour fructifier cet héritage culturel, civilisationnel et identitaire à la fois, parceque le patrimoine ne peut être considéré comme une richesse que lorsque cette dernière est exploitée. Et c'est là que le bât blesse. Des budgets conséquents ainsi que des moyens, logistiques et humains, importants sont consacrés pour des restaurations, des fouilles et des rénovations. Mais les sites, une fois remis à neuf, retournent dans l'anonymat où ils dépériront à cause du manque d'entretien. A quoi cela sert-il donc de ressusciter à grand coup d'argent un site si c'est pour le laisser mourir une deuxième fois ? Car, on ne peut indéfiniment débloquer des enveloppes budgétaires pour «retaper» des vestiges déjà restaurés, ce qui est, somme toute, normal, puisque le site est censé générer des fonds grâce à son exploitation. Là, intervient la responsabilité du secteur touristique. Chacun son métier et le patrimoine sera bien sauvegardé et exploité, dirions-nous en paraphrasant le fabuliste de la Fontaine. Et c'est le travail du ministère du Tourisme dont la mission première est de ramener des touristes en Algérie. Qu'a-t-il fait jusque-là ? Rien dans le sens de l'exploitation des richesses patrimoniales. Combien de tour-operators ont la visite des ruines de Tipasa, Timgad ou Djemila sur le prospectus et dans leurs offres de séjours ? Dire que nous avons en ces sites un filon qui attend d'apporter sa contribution au PIB du pays, et que, par manque de vision, on refuse d'exploiter ! Juste à côté, notre voisin de l'Est était une des principales destinations des touristes étrangers en Afrique et dans le monde arabe. Un peu plus à l'Est, le tourisme était la première ressource en devises de l'Egypte, avec des recettes de l'ordre de 7 milliards de dollars par an. Il a représenté 10,1% du PIB et employait 12% de la population active. Quels sont les chiffres de l'Algérie ? Certainement pas aussi positifs. On dirait même qu'on est carrément dans le négatif. H. G.