Par Wafia Mouffok A quelques jours de la clôture de la 8e édition du Festival national de théâtre professionnel, la compétition se corse entre les différentes troupes représentantes de théâtres régionaux et indépendantes. Mercredi dernier, c'est le Théâtre régional de Souk Ahras qui a créé l'événement et rehaussé le niveau de la compétition avec sa dernière production, Yekamer ou ibane. Ecrite par Ahmed Hemmoumi et mise en scène par Haider Benhassine, la pièce, qui s'inscrit dans le genre théâtre expérimental, relate l'histoire d'un jeune homme accusé de haute trahison envers son pays. Exerçant la fonction de policier, il est accusé d'avoir commis des actes de tortures envers ses compatriotes et d'avoir travaillé pour l'ennemi. La scénographie signée par Halim Rahmouni est imposante. Une estrade installée au milieu de la scène tandis que des barreaux sont mis sur les deux côtés. L'éclairage sombre installe une ambiance tendue et pesante. Au fond de la scène, un clin d'œil au théâtre katébien à travers l'installation d'une penderie dans laquelle sont accrochées des vestes, une trentaine. Le coupable est jugé par trois hommes. Deux veulent un procès expéditif pour passer directement à l'exécution du traitre. Le troisième reste juste et fait appel aux témoins. Le premier témoin est une femme torturée et violée mais elle n'arrive pas à identifier le policier. Le second témoin est un vendeur ambulant. Idem, il n'arrive pas à se prononcer. Mais le dernier témoin est catégorique et reconnaît le présumé coupable. Commence la descente aux enfers pour le policier. La pièce a séduit le public par la force de son thème mais aussi sa mise en scène. Haider Benhassine a réussi à traduire sur les planches toute la force et la douleur de la situation. S'ajoute à ça l'excellente interprétation des comédiens. La représentation a hissé la barre de la qualité un peu plus haut. La qualité se maintiendra le lendemain avec le spectacle du Théâtre régional d'El Eulma. Intitulée El Roukoû lil thrara, la pièce est écrite par Abdelhalim Boucheraki et mise en scène par Aïssa Djekati. Le rideau se lève sur le premier tableau, une scène de torture. Ça se passe durant l'occupation française et les torturés sont des Algériens, évidemment. Le colonel Bigeard est déterminé à arracher des aveux et à casser la révolution algérienne en portant le plus de coup aux moudjahidine. Un homme lui résiste : Larbi Ben M'hidi. Dans son bureau, Bigeard apprend l'arrestation de Ben M'hidi. Il convoque son second et lui ordonne : «Appelle Karl, le journaliste d'El Watan, et annonce lui l'arrestation en exclusivité». Karl est aux anges. Il tient un scoop Ben M'hidi dans le rôle a été campé par l'excellent Hichem Kerkah (lauréat l'an dernier du prix de la meilleure interprétation masculine) tandis que le rôle du colonel Bigeard a été attribué à Bouzida Wael. La pièce rend hommage à l'un des lions d'Alger mais aussi reproduit parfaitement ses principaux traits de personnalité, homme digne et de principes qui, malgré la douleur, n'a pas livré un mot sur ses compagnons d'armes, ni sur l'organisation. Cependant, on notera une légère faiblesse du texte. Mais la pièce dans l'ensemble a été réussie.