Par Karima Mokrani Les candidats au baccalauréat 2013 avaient l'air très satisfaits hier du contenu des sujets d'examen. «Sujets abordables», «Faciles», «Très faciles», «Même celui qui n'a pas bien révisé peut répondre correctement»…Beaucoup d'assurance et de soulagement dans les propos tenus par les candidats, garçons et filles, à leur sortie des centres d'examen. Dans l'ensemble, la journée a bien commencé et s'est bien déroulée pour tous. Exception faite de quelques cas, à l'exemple de cette candidate, souffrant d'un handicap moteur, arrivée 20 minutes en retard dans le centre d'examen, dans la commune de Sidi M'Hamed (Alger). «Ils n'ont pas voulu la laisser entrer», se plaint un de ses proches. «C'est normal, c'est la réglementation. Désolé, nous ne pouvons pas faire autrement», se confond en excuses un des responsables de l'établissement. Pour le reste, «ça va. Ça s'est bien passé», raconte une autre fille, candidate à l'examen du baccalauréat dans la spécialité «Gestion». Elle vient juste de sortir du lycée Thaâlibia, dans la commune de Hussein Dey. Le sourire aux lèvres, la démarche assurée, elle dit que les deux sujets du matin étaient faciles : lettres arabes et droit commercial, de 8h à 13 h. Lettres arabes pour toutes les filières, en ce premier jour d'examen. Pas de stress, pas d'inquiétude sur les visages. Ceux des candidats, non pas ceux des parents. Car, comme il a été constaté pratiquement chaque année, ce sont les parents qui s'angoissent plus que leurs enfants lorsqu'il s'agit de cet examen. Pour dire vrai, pas seulement cet examen mais les trois examens (6e, BEM et Baccalauréat). C'est une habitude chez les parents! Et ce, malgré toutes les consignes qui leurs sont données régulièrement par les psychologues et autres de ne pas «faire pression» sur leurs enfants. Zahia, la cinquantaine, vient juste de se séparer de sa fille au lycée Frantz-Fanon, dans la commune de Bab El Oued. Elle court très vite pour se rendre à son lieu de travail à la rue Larbi Ben M'Hidi. «Je vais être savonnée par le boss. Je suis très en retard. D'habitude, je commence toujours à 6h30. C'est plus fort que moi, c'est ma fille aînée et son bac, elle le passe dans la filière mathématiques. Ce n'est pas facile. Elle fait montre de sérénité et de courage mais je ne la crois pas. Elle est trop stressée, je vois cela dans ses yeux». Peut être que Zahia a raison mais est-ce la bonne manière de venir en aide à son enfant? «Les parents font trop de pression sur leurs enfants et ils ne s'en rendent même pas compte», lance, avec une certaine colère, une enseignante d'un lycée de Kouba. A Hussein Dey, toujours à la sortie du lycée Thaâlibia, un garçon lance cette phrase : «Je vais avoir ce bac uniquement pour ma mère. Elle n'arrête pas de me tarabuster pour l'avoir. Moi, ni le bac ni les études universitaires ne m'intéressent. Ma seule passion, c'est le football.» Un autre soutient les propos de son camarade mais, lui, ce n'est pas le football qui l'accroche ou autre sport : «Moi, je veux carrément quitter ce pays. Je veux partir à l'étranger. En Europe. Je sais que vous allez me dire que c'est difficile, qu'il y a la crise économique et le chômage et que des étrangers viennent ici chercher du travail mais moi, je suis décidé. Je ferai tout pour partir. Je ne pense pas que ce soit pire qu'ici.» Le même garçon affirme qu'il ne croit pas aux études universitaires. Surtout pas à la faculté de Dely Brahim. «Jamais je ne m'inscrirais dans cette faculté. Tu travailles ou tu ne travailles pas, tu n'auras jamais l'année. Il faut être épaulé, avoir une connaissance solide pour avoir, l'année. Si tu manques d'un tout petit point, tu risques gros. Il y a trop de corruption dans cette faculté. Et pas seulement, c'est une écurie.» La meilleure faculté, reprend son camarade, «c'est celle de Draria. Une école d'administration, je pense. Pour y accéder, il faut toutefois avoir au moins une moyenne de 14/20». Un autre garçon du même groupe affirme qu'il s'inscrira là où «c'est décidé par le bon Dieu». Une phrase qui fait sortir un autre de son silence : «Quoi? Même cela, c'est une affaire de destinée ? C'est cela le malheur de ce pays», s'écrie-t-il. «Tout est affaire de destinée. Je ne pourrai jamais être d'accord. J'ai passé ce bac mais j'espère que je ne l'aurai pas», poursuit-il avec colère. Près de dix ans après le lancement des réformes de Benbouzid ou de Benzaghou -c'est selon- le résultat est toujours le même. Les candidats s'intéressent peu à cet examen. Les garçons moins que les filles. L'Europe n'arrête pas de les fasciner. K. M.