Synthèse de Rabah Iguer La presse internationale consacrait hier sa une au drame de Bombay où au moins 130 personnes ont péri dans plusieurs attaques contre la démocratie la plus peuplée du monde, alors que la presse indienne fustigeait ses autorités pour n'avoir pas su prévenir ces attentats. «Dans les flammes et les combats», titrait le Hindustan Times avec un éditorial amer : «Il est temps de réaliser que perdre nos unités d'élite dans des combats frontaux est un acte courageux, mais une façon tout à fait désespérée de lutter contre le terrorisme moderne.» Les autres titres de la presse étaient évocateurs : «Terreur sans fin», «Peur, souffrance, colère» ou encore «Bombay en guerre». La mégalopole de l'ouest de l'Inde, centre financier de la dixième puissance économique mondiale, a été mercredi le théâtre d'une série d'attaques menées par des hommes armés de fusils d'assaut et de grenades qui ont notamment visé deux hôtels de luxe, la gare centrale et un hôpital. Ces actions ont été revendiquées au nom d'un groupe islamiste se présentant comme les Moudjahidine du Deccan, du nom du plateau qui couvre une grande partie du centre et du sud de l'Inde. «C'est la guerre», titrait le Times indien en s'interrogeant sur la capacité du pays à «afficher un degré sérieux de coordination pour lutter contre le terrorisme». Le journal a aussi déploré le temps passé avant le déploiement sur place des forces spéciales. «Terreur en continu» barrait la une de son confrère du Times of India qui consacrait un article à la façon dont les assaillants ont spécifiquement visé des Occidentaux, critiquant le ministère de l'Intérieur pour «faire de nouveau honte au gouvernement». Mais en France, le journal Libération estime que «l'origine étrangère [des attentats] ne doit pas faire oublier le terreau sur lequel se nourrit cette radicalité». Pour le quotidien de gauche, «l'Inde a renié des idéaux laïcs et tolérants de l'indépendance» et «traite son impressionnante communauté musulmane comme des citoyens de deuxième zone», alors qu'elle représente 13% du milliard d'Indiens. En Allemagne, le Sueddeutsche Zeitung va dans le même sens : ces 130 millions de musulmans «sont traités comme des envahisseurs étrangers, sont l'objet de discrimination et de haine de la part des hindouistes nationalistes», ce qui peut amener ceux-ci à «se transformer en résistance radicale». Pour le Gulf News de Dubai, il faut «s'unir à l'Inde pour résister à ces gens. L'Inde est la démocratie la plus peuplée du monde et dotée d'une Constitution séculaire», ajoute le quotidien émirati, selon lequel «nombre d'extrémistes religieux voudraient y mettre un terme». Le quotidien de droite français le Figaro replace les attentats d'extrémistes dans le contexte d'ouverture de l'Inde en direction du Pakistan. «Comme si l'islamisme radical ne voulait pas entendre parler d'une détente entre les deux grands pays de l'Asie du Sud.» En Grande-Bretagne, le Guardian partage cet avis et juge ces attaques meurtrières –«c'était le 11 septembre de l'Inde»- signées d'Al Qaïda. Il presse New Delhi d'empêcher ces extrémistes de «nuire aux liens chaleureux entretenus avec son voisin, longtemps ennemi, qu'est le Pakistan». Pour The Times de Londres aussi, il existe un lien possible avec l'organisation d'Oussama Ben Laden. «Le moment, les tactiques, l'orchestration et la recherche d'otages britanniques, américains et juifs montrent une opération qui a toutes les griffes d'Al Qaïda», dit-il, jugeant qu'il pourrait vouloir casser la fondation de la démocratie indienne et sa récente croissance économique.