De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar Béjaïa passe aujourd'hui pour une terre fertile du volley-ball féminin en Algérie. La région compte pas moins de quatre clubs en première division. Titres nationaux, consécrations africaines, participations honorables à des rendez-vous internationaux, le palmarès des quatre écoles est élogieux. Les filles de la Soummam, qui constituent évidemment l'élite nationale en la matière, ne cessent de surprendre leurs adversaires et multiplient les succès sur les scènes continentale et internationale. Elles étaient sept athlètes à prendre part, l'été dernier, aux jeux Olympiques de Pékin. Certaines ont réussi de brillantes carrières professionnelles en Europe, notamment en France. D'autres ont choisi de se mettre au service de grands clubs locaux, comme le MCA. La performance suscite la fierté dans les milieux sportifs de la wilaya. Un tas de paramètres ont contribué à l'instauration de cette supériorité. En réalité, les sociétaires des clubs béjaouis évoluent avec les mêmes moyens existant dans d'autres wilayas et travaillent souvent dans des conditions précaires. Manque d'infrastructures de grand standing, situation financière bien en deçà des besoins, équipement minimum, les problèmes sont quasiment les mêmes partout. Les sections du MBB, de l'ASWB, du NCB et du RCS, principaux fers de lance de la discipline, n'ont pas baissé les bras pour autant devant l'adversité. A force d'y croire, les volleyeuses de Béjaïa ont réussi des exploits de haut niveau. La stabilité des staffs techniques et dirigeants au niveau de ces principales formations a eu un effet positif dans cette évolution constante. Si la compétence des techniciens, issus pour l'essentiel de l'ISTS d'Alger, est largement prouvée par les résultats techniques obtenus, la succession tranquille des cadres dirigeants a été incontestablement d'un concours précieux dans la continuité des programmes et la poursuite des objectifs tracés par les différentes directions. Les rapports de complémentarité établis de longue date entre le sport scolaire et les clubs ont été également déterminants. La confiance réciproque qui régit les liens entre la famille, l'école et le club est aussi pour beaucoup dans ce développement. «En général, nos qualifiés scolaires sont formés dans des clubs. Il y a une très bonne coordination entre les ligues civiles [volley-ball, athlétisme et football] et la Ligue des sports scolaires. Nous avons aussi des enseignants qui sont entraîneurs au sein des clubs, chose qui nous aide et donne cette complémentarité des efforts, ce qui fait que, chaque année, on a de très bons résultats», explique récemment Saadi L'hachemi, président de la Ligue des sports scolaires de la wilaya de Béjaïa dans les colonnes d'un confrère. Par ailleurs, la relative stabilité de la situation sécuritaire à travers la wilaya au cours des années 1990 a offert un meilleur climat de travail et d'entraînement aux athlètes et à leurs entraîneurs. Le terrorisme a, en effet, réduit au silence de nombreuses formations dans l'est et l'ouest du pays. Mais ce fléau moyenâgeux ne justifie pas, à lui seul, le recul dramatique du sport féminin dans de nombreuses wilayas qui étaient, il n'y a pas si longtemps, à l'avant-garde. Constantine, Annaba, Oran, Chlef ou même Alger ont énormément perdu de leurs saines traditions en la matière. Un conservatisme rampant empêche de nombreux parents de faire confiance au talent de leurs filles. L'encouragement familial et la prise en charge adéquate au niveau des équipes sont des conditions fondamentales au juste retour des choses à leur situation normale. Le sport féminin, toutes disciplines confondues, recèle d'importantes potentialités de développement. L'une des deux médailles olympiques, en judo, qui constitue la maigre moisson algérienne lors des derniers Jeux de Beijing, a été –on doit insister beaucoup là-dessus- l'œuvre d'une femme, Soraya Haddad en l'occurrence. Les pouvoirs publics, à travers l'école d'abord, doivent s'y investir fortement pour briser les tabous. Individuelles ou collectives, les disciplines féminines représentent l'avenir pour le sport national car elles sont potentiellement performantes. «Le sport féminin en général reste très limité. Nous avons encore besoin d'une vraie politique sportive. Il y a beaucoup de travail», constate l'ancienne gloire du demi-fond mondial, Hassiba Boulemerka, qui pose, en premier, le problème des installations sportives. Les femmes qui constituent aujourd'hui plus de 50% de la population algérienne méritent plus d'égards dans notre système sportif national. Il suffit seulement de leur faire confiance pour qu'elles se hissent bien au-dessus des espoirs placés en elles. Elles ont manifestement le talent nécessaire pour redonner au sport algérien ses lettres de noblesse, même dans son segment le plus masculin : le football. Aragon a mille et une fois raison de dire : la femme est l'avenir de l'homme. Dans tous les domaines, la réussite se dessine aujourd'hui au féminin.