Le coup de force de l'armée égyptienne qui a destitué le président Mohamed Morsi, semble évoluer vers une situation de tension extrême. Les Frères musulmans contestent toujours l'action de l'armée et renouvellent les appels pour les manifestations. Le nouveau pouvoir en Egypte enchaîne les décisions. Après avoir dissout, vendredi, la haute chambre du Parlement, hier c'était la nomination de Mohammed El Baradei, porte-parole des opposants à Morsi et ancien chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (Aiea), au poste de Premier ministre. Le bras de fer entre les trois principaux acteurs de la crise, à savoir l'armée, la coalition anti-Morsi et les Frères musulmans, menace aujourd'hui sérieusement la sécurité du pays. Depuis la destitution, les violences ont fait au moins 30 morts à travers l'Egypte. Vendredi, les affrontements entre pro et anti-Morsi, mais aussi entre pro-Morsi et soldats, ont fait une vingtaine de morts et plus d'un millier de blessés, essentiellement dans les villes du Caire et d'Alexandrie. Dans la péninsule instable du Sinaï, la tension est également à son comble. Cinq policiers et un soldat ont été tués dans des attaques. Depuis la chute début 2011 de Moubarak, la région du Sinaï est en proie à une instabilité croissante. Au fil du temps la crise politique en Egypte prend des proportions inquiétantes. Depuis le 26 juin et l'éclatement de la contestation contre Morsi, les heurts ont fait plus de 80 morts dans le pays. Le mouvement «Tamarroud», à l'origine des manifestations en Egypte contre le Président, a pour sa part appelé à une nouvelle mobilisation aujourd'hui dimanche pour contrer les pro-Morsi qui se disent décidés à rétablir la «légalité». Entraînés par le Guide suprême des Frères musulmans, Mohamed Badie, apparu à un rassemblement, alors que les services de sécurité avaient annoncé son arrestation, les partisans de Morsi ont multiplié les manifestations. Les Frères musulmans, dont l'influent numéro deux Khairat al-Chater a été arrêté, entendent rester dans les rues jusqu'à ce que le président déchu retrouve son poste de Président. «Nous avons déjà vécu sous un régime militaire et nous ne l'accepterons pas une nouvelle fois», clament les partisans des Frères. La situation politique reste explosive et la majorité des Egyptiens attendent d'autres annonces dans les prochaines heures susceptibles de calmer les esprits. Le Président intérimaire, Adly Mansour, nommé par l'armée, a dissous vendredi la Chambre haute, qui assure l'intégralité du pouvoir législatif, suspendu la Constitution et nommé un nouveau chef des renseignements. La fameuse feuille de route annoncée par l'armée doit aboutir à la formation d'un nouveau gouvernement, ainsi que des élections législatives et présidentielle. Mais pour l'heure aucune date n'a encore été avancée, ce qui ajoute à la confusion générale qui règne en Egypte. La pression ne semble pas s'estomper. Le procureur général a annoncé que des poursuites seront engagées contre neuf dirigeants des Frères musulmans accusés d'«incitation au meurtre» de manifestants. Le président déchu Mohamed Morsi, toujours détenu par l'armée est aussi visé par des poursuites judicaires. L'armée semble vouloir redoubler de pression sur le désormais ex-Président pour, probablement, l'inciter à émettre un appel au calme. L'avenir de l'Egypte reste désormais suspendu. M. B./Agences