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Y a-t-il une capacité de bouleverser l'économie rentière ?
La sphère réelle et les entrepreneurs privés
Publié dans La Tribune le 04 - 08 - 2013

L'objet de cette contribution est de dresser une typologie du secteur privé algérien et de poser la question suivante : y a-t-il de véritables entrepreneurs en Algérie producteurs de richesses ? J'ai eu beaucoup de difficultés à récolter des informations statistiques, certaines étant imparfaites et je tiens à m'en excuser auprès des entrepreneurs privés cités qui peuvent me corriger. Mais cela ne change pas la tendance lourde de l'analyse.
Pour éviter toute fausse interprétation, la liste qui suit est faite en vrac et ne traduit pas forcément le poids réel de chaque groupe. Nous avons le Groupe Cevital, le plus médiatisé en Algérie, pesant environ 3,5 milliards de dollars en 2012 et employant plus de 12 900 personnes et selon son P-dg, le chiffre d'affaires devrait être de l'ordre de 6,5 milliards de dollars courant 2015. Cevital, outre la production locale, est aussi le représentant exclusif en Algérie de Samsung Electronics via sa filiale Samha, le partenaire du projet Desertec de production saharienne d'énergie solaire, initié par des Allemands, le créateur de l' école des cadres, le représentant exclusif du loueur de voitures Europcar, via sa filiale Cevicar, ayant l'exclusivité de l'importation de la gamme Hyundai. Selon le classement de Jeune Afrique, après Sonatrach et Naftal, le Groupe Cevital occupe la troisième place dans le classement 2011 des 500 premières entreprises africaines. Au plan national, le groupe passe ainsi devant Sonelgaz qui est reléguée à la quatrième position. Dans le domaine de l'agroalimentaire, le groupe Cevital est considéré comme la troisième plus grosse entreprise africaine, immédiatement après deux entreprises sud-africaines. Concernant le verre plat, 30% des capacités de la première ligne produisent près de 600 tonnes par jour, les plus importantes d'Afrique, opérationnelle depuis 2007, couvre toute la demande nationale et 70% sont exportés (10% sur le marché maghrébin et 60% en Europe), une deuxième ligne de 800 tonnes par jour étant prévue pour 2015. Deuxième exportateur, il est aussi deuxième contribuable après Sonatrach. Les richesses créées par le groupe sont ainsi réparties : 59% en impôts et taxes, 40% en investissements et 1% en dividendes distribués aux actionnaires ce qui lui permet actuellement l'autofinancement et de déployer à l'international.
2- Le Groupe Mehri a étendu son champ d'activité au monde des affaires internationales dès 1965. En tant qu'investisseur, il crée le Gimmo (groupe d'investisseurs du Maghreb et du Moyen-Orient) holding étranger dont il est le principal actionnaire et fondateur. Il est mandaté par ce groupe pour réaliser des investissements dans le monde entier dans les domaines de l'industrie, du commerce, du bâtiment et des services. Le chiffre d'affaires méconnu du grand public est estimé à plusieurs milliards de dollars. Il est propriétaire de Pepsi Cola Algérie.
3- Le Groupe Haddad active dans les secteurs des travaux publics, de l'hydraulique et des transports. Les filiales Haddad sont les bitumes et pétrole Haddad, la maîtrise d'œuvre Berhto, Housing construction, Tourisme et hôtellerie, Savem et établissement Toyota Haddad. Seconde entreprise privée algérienne à s'ouvrir les portes de l'activité dans les hydrocarbures, après la société Kougp du groupe Kouninef, ETRHB avait été pré qualifié en tant qu'investisseur par l'Agence nationale de valorisation des hydrocarbures, Alnaft, pour le second appel d'offres en matière d'exploration. Il occupe aujourd'hui la deuxième place dans le secteur des travaux publics, emploie plus de 10 000 salariés et brasse plusieurs centaines de milliards de dinars de chiffre d'affaires par an. Il est le propriétaire du club de football algérien de l'USM Alger. La Commission d'organisation et de surveillance des opérations de la Bourse (Cosob) a autorisé le Groupe ETRHB Hadad à émettre un emprunt obligataire destiné aux banques, établissements financiers et investisseurs institutionnels. Le montant global de cet emprunt a été de 6 milliards de dinars. Selon la Cosob, les valeurs indiquées de l'évaluation hypothécaire établie du groupe ETRHB-Haddad SPA, effectuées, le 27 novembre 2008, représentaient une valeur de 7, 6 milliards de dinars soit 127% du montant de l'emprunt obligataire, la troisième expertise complémentaire date du 18 juin 2009 a été évalué à 7 286 432 375 dinars algériens représentant 121% du montant de l'emprunt obligataire. Toujours selon les données de la Cosob, le 6 janvier 2009, le capital social du groupe ETRHB-Haddad SPA était de 8 800 000 000 DA est le chiffre d'affaires comptable au 01 janvier 2009 de 26 446 450 000 dinars.
4- Le groupe Rahim contrôlant Arcofina est un groupe algérien diversifié, dans des métiers aussi différents que la distribution pharmaceutique, la banque, les technologies de l'information, la grande distribution, l'hôtellerie, l'immobilier d'affaires et l'assurance. Filiale d'Arcofina, l'Algérienne des assurances (2A) employant 2 000 personnes a réalisé un chiffre d'affaires de plus de 3 milliards de dinars en 2010, en augmentation de 16% par rapport à 2009. En début 2009, le groupe occupe la une des journaux algériens pour son projet pharaonique d'Alger Medina qui selon son promoteur devrait créer 10 000 emplois et attirera 100 000 visiteurs par jour pour un investissement de 2,5 milliards de dollars.
5- Le Groupe Benamor est spécialisé dans la filière agro-alimentaire et leader sur le marché national. Implanté dans la wilaya de Guelma, dans l'Est algérien, il est devenu leader sur le marché national en matière de tomate industrialisée et s'impose de plus en plus parmi le top 3 des plus grands producteurs nationaux de semoule, de farine et de couscous. Le groupe Benamor, a réalisé en 2010, 200 millions d'euros de chiffre d'affaires.
6- Le Groupe Othmani -(propriétaire de Coca Cola Algérie), avec NCA Rouiba, est une entreprise qui a réalisé un chiffre d'affaires de l'ordre de cinq milliards de dinars et emploie 450 travailleurs. Le 17 décembre 2007, la Banque européenne d'investissement a accordé un crédit de 3 millions d'euros au Groupe NCA pour le développement de son entreprise. En février 2013, la Cosob donne son «feu vert» pour l'entrée en Bourse de l'entreprise NCA Rouiba. NCA vendra 2 122 988 actions de type ordinaire (pour 849,195 millions de dinars soit 25% du capital social de la société (qui est de 8 491 950 actions).
7- Le Groupe Benhamadi active dans l'informatique, électronique, électroménager, matériaux de construction et l'agroalimentaire. Il compte investir dans la production de véhicules légers. Ce groupement familial d'entreprises qui a réalisé un chiffre d'affaires de
21 milliards de dinars en 2011 (un euro égal 100 dinars et 1 dollar 77 dinars au cours officiel) - en hausse en 25% par rapport à 2010 a tiré un bénéfice net de près de 800 millions de dinars et investi un milliard de dinars. Avec un effectif de 3 000 employés qui sera renforcé par 600 nouvelles recrues, l'activité est concentrée dans la zone industrielle de Bordj Bou-Arréridj, où sont écoulés sur le marché local 1,3 million d'unités de tous produits confondus, dont une partie a été exportée vers des pays africains. En électroménager, sa part sur le marché national se situe entre 30 à 35%, selon son premier responsable qui annonce son intention d'investir en dehors des frontières nationales comme la Tunisie et le Maroc, voire même l'Afrique noire.
8- Le groupe Hasnaoui - Les deux groupes de sociétés Hasnaoui, «Bâtiment» et «Agriculture», dont le siège est à Sidi-Bel-Abbès, (Ouest Algérie) en quatre Sociétés par actions, par fusion et transformation des Sociétés à responsabilité limitée (Sarl) d'avant 2008. Le groupe agriculture regroupe la Société de développement agricole (Sodea), créée en novembre 2000 et la Société de production de plants-maraîchers (SPPM), fondée à la même date. Un des leaders, au plan national, dans le domaine du bâtiment et des travaux publics, le groupe des sociétés Hasnaoui est constitué d'un ensemble d'entreprises exerçant dans diverses branches d'activités, telles la réalisation de bâtiments, production de matériaux de construction, la petite hydraulique, l'exploitation de carrières, etc. Le groupe emploie 1 500 collaborateurs avec une capacité de réalisation de 1 500 logements/an. Selon son P-DG le chiffre d'affaires du groupe est évalué à environ 200 millions d'euros (60% pour la construction et 40% pour la production, notamment via la Société d'exploitation des carrières Hasnaoui). La Sarl Hasnaoui est le concessionnaire principal de Nissan Algérie.
9- Le groupe Biopharm est un laboratoire pharmaceutique algérien, indépendant, fondé en 1992 par Abdelmadjid Kerrar. L'agence française pour le développement international des entreprises (UbiFrance) affirme, dans une étude, que le groupe privé algérien Biopharm est classé au 1er rang des producteurs privés et des importateurs algériens de médicaments en terme de chiffre d'affaires global (importation et fabrication) et selon le rapport du cabinet de consulting britannique, Oxford Business Group, le marché national du médicament en Algérie devrait atteindre une valeur de 8 milliards de dollars en 2015. Aujourd'hui, le groupe compte environ 1 300 collaborateurs dont un tiers de scientifiques avec un chiffre d'affaires réalisé selon son responsable de 19 milliards de dinars en 2010. Biopharm est passé à la production locale depuis 2005, (50 millions d'unités de vente par an) tant avec des produits sous licence de laboratoires leaders mondiaux qu'avec des produits issus de sa propre recherche et développement, lesquels sont des médicaments génériques selon les règles de bonnes pratiques de fabrication (BPF) et a été certifiée ISO 9001 depuis 2008.
10- Le groupe SIM : Aujourd'hui, il est composé de huit filiales et a acquis la source Mouzaïa. D'une manière globale, à travers toutes ses activités, le groupe SIM a réalisé un chiffre d'affaires de 200 millions d'euros en 2012. Il est un des premiers producteurs de couscous sur le plan mondial et il exporte vers 29 pays.
11- Bien entendu il existe d'autres groupes dont je ne citerai sans être exhaustif : la société Hamoud Boualem qui est une entreprise familiale, fondée en 1889 à Alger par Youssef Hamoud avec un capital social d'environ 3,5 milliards (2010) produisant sous licence en France. C'est une marque algérienne fabriquant diverses boissons, du sirop au soda et exporte également en Angleterre, au Canada et aux USA, étant en concurrence avec les sociétés Ifri, Coca Cola et Pepsi. Le Groupe Attia (Batna) spécialisé dans la fabrication de briqueteries, tuileries, boissons, eaux minérales et de source, boissons non alcoolisées. Le groupe Eden (Cherif Othmane) qui active depuis bientôt 40 ans, principalement dans l'ouest algérien, ses domaines d'intervention étant l'industrie de transformation, le tourisme, l'hôtellerie, la promotion immobilière, le négoce et la distribution, employant, plus de 900 employés. Le Groupe Dennouni avec un effectif de plus de 1 000 personnes activant dans le BTPH, avec des productions intégrées, société en pleine expansion avec un chiffre d'affaires d'environ 100 millions d'euros. Dans les assurances, Alliances Assurances emploie plus de 300 personnes qualifiées investissant récemment dans l'immobilier et l'agriculture. Doté d'un capital de 800 millions de dinars, et de 106 agences et de 300 000 clients début 2010, Alliance a lancé une opération via la Bourse afin de lever des fonds, pour porter son capital à 2,2 milliards de dinars ayant réalisé un chiffre d'affaires, à fin 2008, de plus d'un milliard et demi de dinars. Selon le P-DG : «A l'issue de la période de souscription qui s'est étalée sur un horizon de 30 jours, du 2 novembre au 1er décembre 2010, et après déroulement de la procédure de centralisation et de traitement des bulletins de souscription au niveau de la Société de gestion de la Bourse des valeurs, il a été enregistré un niveau de souscription validé de 2 521 384 actions représentant 139,73% du volume global des titres offerts.» Mais c'est surtout vers l'agro-alimentaire où le marché en Algérie pèserait cinq milliards de dollars que les investisseurs privés algériens sont attirés.
Le Groupe Kouininef, allant de l'immobilier, au BTPH à l'industrie, qui assure la commercialisation de café, riz, couscous, farine, le groupe agroalimentaire algérien s'étant associé au producteur français «Cristal Union» pour l'installation d'une raffinerie de sucre en Algérie qui devrait atteindre une capacité de production de 800 tonnes de sucre par jour. Les sociétés Bendjabeur de Constantine spécialisées dans les chaussures, la céramique et le plastique. La Sarl CVA Bellat, créée en 1970, qui s'est spécialisée dans la production et la commercialisation des produits carnés (cachirs, pâtés, rôtis fumés…) étant leader en Algérie dans la production et la commercialisation des produits carnés. Avec tout ce beau monde nous avons les privés ayant investi dans les filières lucratives, du lait et des eaux minérales.
Entraves au développement du secteur privé Le secteur privé algérien s'est développé largement à l'ombre du secteur public, selon le fameux slogan cher au parti FLN le secteur privé facteur complémentaire du secteur d'Etat. Ce qui le freine, ce sont l'environnement et la sphère informelle dominante en Algérie. La décision qui devait être appliquée en 2011 de l'obligation de chèques de 500 000 dinars pour les transactions commerciales, sous la pression de puissants lobbies, a été abrogée. Le milieu des affaires est peu propice aux initiatives créatrices de valeur ajoutée à l'instar de la politique salariale qui favorise des emplois rentes au lieu du savoir et du travail. Cela explique, selon notre enquête, que les entrepreneurs cités, face à une concurrence étrangère (nombreux privés dans l'import) à laquelle ils n'étaient pas préparés, ont des filières d'importation afin d'équilibrer leurs comptes globaux. Que l'on visite bon nombre d'anciennes zones industrielles (Est- Centre, Ouest ou la zone de Ghardaïa) et l'on constatera que bon nombre d'anciennes usines se sont transformées en aire de stockage expliquant d'ailleurs le dépérissement du tissu productif où l'industrie représente à peine 5% du produit intérieur brut. La raison essentielle sont les contraintes d'environnement : bureaucratie pour plus de 50%, un système financier administré, (plus de 90% des crédits octroyés sont le fait de banques publiques), un système socio-éducatif inadapté et enfin l'épineux problème du foncier.
A cela s'ajoute, du fait de l'ancienne culture, une méfiance vis-à-vis du privé tant local qu'international du fait que les tenants de la rente ont peur de perdre des parcelles de pouvoir. Cela explique d'ailleurs ces alliances entre la sphère bureaucratique et certaines sphères privées spéculatives mues par des gains de court terme via la rente. Or, le véritable dynamisme de l'entreprise, qu'elle soit publique ou privée, suppose une autonomie de décision face aux contraintes tant internes qu'internationales évoluant au sein de la mondialisation caractérisée l'incertitude, la turbulence et l'urgence de prendre des décisions au temps réel.
Par ailleurs, selon les données quantitatives du recensement économique (RE) effectué par l'Office national des statistiques (ONS) en 2011, le nombre d'entreprises recensées sur le territoire national a atteint 990 496 entités dont plus de 934 250 entités économiques avec la «prédominance» du secteur commercial et le caractère «tertiaire de l'économie nationale plus de 83% du tissu économique global). Cette enquête a aussi révélé que le tissu économique national est fortement dominé par les personnes physiques à 95% (888 794) alors que les personnes morales (entreprises) représentent seulement 5%, soit 45 456 entités, ce résultat étant révélateur d'une économie basée essentiellement sur des micro-entités peu initiées au mangement stratégique.
Les quelques cas analysées précédemment qui sont d'ailleurs confrontés à de nombreuses contraintes, ne peuvent permettre à eux seuls une dynamisation globale de la production hors hydrocarbures, nécessitant des milliers d'entrepreneurs dynamiques. Car, si le secteur privé réalise 80% de la valeur ajoutée hors hydrocarbures du pays, qui ne représente d'ailleurs que 2/3% du total des exportations contre 97/98% pour Sonatrach, sa part dans l'investissement global est négligeable, certaines sources donnant 1,9% du total de l'investissement en 2010 - la tendance lourde n'ayant pas foncièrement changé 2011/2013.
D'une manière générale que représente le secteur privé algérien face au chiffre d'affaires de Sonatrach qui contribue directement et indirectement via la dépense publique/via les hydrocarbures à plus de 80% du produit intérieur brut ? A cela s'ajoute le manque d'unification des organisations patronales privées où sans être exhaustif nous avons la Confédération générale des entreprises
algériennes (CGEA) la Confédération générale du patronat (CGP-BTPH), la Confédération des industriels et producteurs algériens (CIPA), la Confédération nationale du patronat algérien (CNPA, la Confédération algérienne du patronat (CAP) , le Conseil supérieur du patronat algérien (CSPA), l'Association des femmes chefs d'entreprises (Savoir et vouloir entreprendre-SEVE), le Club des entrepreneurs et des industriels de la Mitidja (CEIMI). Quant au Forum des chefs d'entreprises (FCE), il regroupe environ 499 entreprises qui peuvent corollairement appartenir à des associations syndicales, couvrant 18 des 22 secteurs économique et représentant un chiffre d'affaires de 14 milliards de dollars, employant environ 105 000 salariés, le FCE étant considéré comme un think tank (laboratoire d'idées) et non comme une organisation syndicale.
2 - Les plus grosses fortunes en Algérie ne sont pas forcément dans la sphère réelle mais au niveau de la sphère informelle notamment marchande avec une intermédiation informelle à des taux d'usure où selon la Banque d'Algérie dans sa note «Amélioration de la circulation de la monnaie fiduciaire en 2012 et 2013», les sorties annuelles brutes de monnaie fiduciaire sont passées de 1 633,4 milliards dinars en 2010 à 1 977,8 milliards dinars en 2011 et à 2 475 milliards dinars en 2012 soit 24, 75 milliards d'euros ou 32,17 milliards de dollars au cours actuel. La part de cette monnaie dans la masse monétaire M2 (monnaie fiduciaire et dépôts bancaires) est passée de 25% en 2010 à 25,9% en 2011 pour atteindre 26,7% à fin 2012 donnant une masse monétaire d'environ 125 milliards de dollars en 2012.
Selon Deborah Harold, enseignante américaine de sciences politiques à l'université de Philadelphie et spécialiste de l'Algérie se basant sur des données de la banque d'Algérie, l'économie informelle brasserait 50% de la masse monétaire en circulation soit 62,5 milliards de dollars.
Ces données sont corroborées par le quotidien arabophone El Khabar en date du 18 février 2013 citant un document du ministère du Commerce algérien pour qui existeraient 12 000 sociétés écrans avec une transaction qui avoisinerait 51 milliards d'euros soit 66 milliards de dollars, plus de quatre fois le chiffre d'affaires de toutes les grandes entreprises du FCE réunies.
Cette sphère contrôle au niveau de la sphère réelle 65% des segments des produits de première nécessité : fruit/légumes, marché du poisson, marché de la viande blanche/rouge et à travers des importations informels le textile/cuir, avec une concentration du capital au profit de quelques monopoleurs informels. Cette sphère liée à la logique rentière tisse des liens dialectiques avec des segments du pouvoir expliquant qu'il est plus facile d'importer que de produire localement. Mais il ne faut pas se tromper de stratégie. Nous avons de nombreux entrepreneurs dynamiques informels acquis à la logique de l'économie de marché qu'il s‘agit d'introduire dans la sphère réelle non par mesures administratives autoritaires mais par de nouveaux mécanismes économiques de régulation.
3- D'une manière générale, il ne faut pas oublier le dynamisme de certains patrons de presse privée tant arabophone que francophone, certains sites dirigés par des Algériens initiés aux nouvelles technologies, qui ont permis le développement des espaces de liberté, restant l'audiovisuel en attente, enjeu de pouvoir, expliquant la tentative vaine du verrouillage médiatique à l'ère d'Internet, de la promulgation de la loi, les quelques télévisions privées fonctionnant en offshore. Il faut le reconnaitre, le contrôle des médias est un enjeu stratégique pour les entrepreneurs privés algériens.
Il existe une règle générale valable pour tous les pays. Lorsqu'on a beaucoup d'agents comme nous l'ont enseigné les fondateurs de l'économie, (l'économie est avant tout politique), on est tenté de faire directement ou indirectement (en plaçant des réseaux) de la politique. Aussi, pour ce secteur particulier existe un danger, pour des cas où l'actionnaire principal est un privé, en cas de non autonomie de la rédaction, que ces médias s'adonnent à de la propagande, à l'instar de certains médias publics, au lieu de fournir une information objective d'où l'importance d'un code de déontologie. Cela n'est pas propre à la presse et concerne également les TV privées, avec les contraintes de la publicité.
D'une manière générale, le secteur privé algérien qu'il soit autonome vis-à-vis des sphères du pouvoir ou dépendant (pour l'octroi de marchés), a une attitude contradictoire tant vis-à-vis de la politique du gouvernement que de grands dossiers. Comme la privatisation (totale ou partielle des entreprises publiques existantes) qu'il s'agit de ne pas confondre avec la démonopolisation (unités nouvelles crées par le secteur privé) avec parfois des alliances contre-nature avec des syndicats corporatistes, (intérêts communs de rente), les dossiers de l'adhésion à l'organisation mondiale du commerce, des Accords de libre échange avec l'Europe et de la règle des
49 /51% (l'Etat algérien supportant tous les surcouts via la rente) régissant le privé international, instaurée en 2009 (sans une délimitation claire de ce qui est stratégique et de ce qui ne l'est pas), dont les IDE, selon un rapport de l'OCDE de 2013, ont chuté, contrairement aux discours officiels, d'environ 70% en 2012 par rapport à 2008.
D'ailleurs, on peut se poser cette question : pourquoi la majorité des projets dans le cadre de la règle des 49/51% avec des partenaires étrangers concerne le secteur public et pourquoi cet assainissement des entreprises publiques de plus de 60 milliards de dollars entre 1971/2012 du secteur public alors que 70% sont revenues à la case de départ au lieu d'une nouvelle affectation plus rationnelle au profit de nouvelles filières ? Pour sa relative autonomie (n'existant pas une autonomie totale dans l'absolu), le rôle du secteur privé a besoin d'être démystifié, souvent assimilé faussement à des voleurs à l'instar des entrepreneurs publics, alors que la majorité est honnête.
Le secteur privé national productif a besoin de plus d'autonomie et d'espaces de liberté, ne signifiant pas capitalisme sauvage. L'Etat régulateur a un rôle stratégique à jouer afin de concilier les coûts sociaux et les coûts privés. Les quelques exemples analysées, sans compter les milliers d'entrepreneurs algériens qui réussirent à l'étranger et ce dans tous les continents, qui peuvent être un pont entre l'étranger, notamment les USA et l'Europe dont la France où ils sont les plus nombreux au sein des espaces euro-méditerranéens et euro-africains, et l'Algérie comme centre de transfert managérial et technologique grâce à des co-partenariats et des co-localisations avec des investisseurs étrangers, montrent clairement que le secteur privé algérien peut contribuer au développement économique et social de l'Algérie.
A. M.
* Economiste algérien et expert international en management stratégique
In Algérie News du samedi 27 juillet 2013


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