Hayatou : «Nous avions craint une démobilisation des Sud-Africains après l'élimination de leur sélection» Au lendemain de la finale de la Coupe du monde 2010, qui a vu le sacre de l'Espagne, Joseph Sepp Blatter, président de la Fédération internationale de football, a animé hier une conférence de presse afin de faire le bilan de ce Mondial, le premier organisé en Afrique. Il était accompagné, pour l'occasion, de son secrétaire général, Jérôme Valcke, du président du comité d'organisation du Mondial-2010, Issa Hayatou, du président du comité d'organisation sud-africain, Kohza, et du coordinateur général –et cheville ouvrière- de l'organisation sud-africaine, Danny Jordaan. Si chacun d'eux a prononcé une allocution plus ou moins courte, où les louanges pour l'organisation exemplaire de cet événement étaient légion, il n'en demeure pas moins que c'est à Blatter qu'étaient adressées l'écrasante majorité des questions posées par les journalistes durant la petite heure qu'a duré la conférence de presse. Nous vous proposons une synthèse des déclarations du patron de la FIFA. «L'Afrique ne nous a pas déçus» «C'est la première fois qu'une Coupe du monde est organisée en Afrique. Il me plaît de complimenter l'Afrique du Sud pour la réussite de ce pari. Je rends un hommage particulier au gouvernement sud-africain qui, devant les craintes et les appréhensions qui ont précédé l'événement, a donné et assuré toutes les garanties pour que tout se passe dans les meilleures conditions. Je remercie Kohza, Jordaan et les centaines et centaines de citoyens sud-africains qui se sont investis pour la réussite de ce Mondial. Je rends un hommage particulier à l'Afrique en tant que continent. Nous avons fait confiance à l'Afrique et nous n'avons pas été déçus. La FIFA est amplement satisfaite. Donc, s'il y a des compliments et des félicitations, ils doivent être adressés à l'Afrique, pas à la FIFA.» «L'Espagne a réhabilité le beau jeu» «Je rends hommage à l'équipe d'Espagne, vainqueur de la Coupe du monde. La Roja a ravi le monde parce qu'elle a réhabilité le beau jeu. Il y a des équipes qui font des calculs en jouant afin de ne pas perdre et d'autres qui jouent tout simplement pour gagner. L'Espagne incarne la deuxième catégorie. C'est un beau vainqueur auquel je réitère mes sincères félicitations.» «Grâce au Mondial, le monde a une nouvelle perception de l'Afrique» «Ce Mondial disputé en terre africaine a eu des répercussions importantes dans le monde. Je ne parle pas de l'audience médiatique avec la couverture assurée par les télévisions, la presse écrite et les sites Web. Je parle de la nouvelle perception que le monde a de l'Afrique. On a découvert qu'il y a beaucoup d'aspects positifs dans ce continent. Hier, j'ai eu une rencontre avec le président de l'Afrique du Sud, Jacob Zuma, et ce dernier m'a assuré que le défi d'organiser cette Coupe du monde a davantage unifié le peuple sud-africain dans toutes ses composantes.» «La qualité du fair-play lors de la finale ne m'a pas plu» «Pourquoi les grandes stars n'ont pas bien joué dans ce Mondial ? Merci de me désigner comme expert technique (rire) ! Dans cette Coupe du monde, il y a eu de beaux matchs et d'autres moins beaux. Cependant, ce n'est pas à moi de faire des analyses techniques. Il y a des personnes habilitées à le faire. Ce que je constate, par contre, c'est qu'il y a eu la victoire du fair-play dans la majorité des matchs. Cela n'a pas été tellement le cas dans la finale d'hier où je n'ai pas été satisfait par la qualité du fair-play montrée sur le terrain.» «S'il y aura technologie, c'est uniquement sur la ligne de but» «Le Mondial est fini et il est inutile de rouvrir le débat sur la main de Thierry Henry contre la République d'Irlande. Dans cette Coupe du monde, il y a eu deux cas de fautes d'arbitrage graves pour lesquelles j'ai présenté mes excuses, mais le match France – Irlande s'est déroulé en phase de qualifications. Après les deux erreurs d'arbitrage, on m'a demandé s'il fallait rouvrir le dossier de l'utilisation de la technologie en football et j'ai répondu oui, mais seulement sur la ligne de but, afin de déterminer si le ballon a franchi la ligne ou non. Pour le reste, il n'y aura pas de technologie car le football doit garder son humanité. Ce n'est qu'au mois d'octobre que l'International Board examinera ce point.» «Les entraîneurs doivent aussi apprendre à leurs joueurs à perdre dans la dignité» «Je n'ai pas entendu parler des critiques que les joueurs et le sélectionneur hollandais auraient adressées à l'arbitre de la finale. Ce que je peux dire, c'est que le football est avant tout une école de la vie. Dans cette école, on apprend le respect de ses partenaires et adversaires et le fair-play. Les entraîneurs n'ont pas pour seule mission d'apprendre aux joueurs à jouer. Ils doivent leur apprendre à gagner, mais aussi à perdre dans la dignité et le fair-play.» «Je donne à l'Afrique du Sud un 9/10 pour l'organisation» «L'an dernier, à la fin de la Coupe des Confédérations, j'avais donné à l'Afrique du Sud une note de 7,5 sur 10 pour la qualité de l'organisation, soit une note qui vaut à son titulaire, dans le système universitaire, un master. Mes amis sud-africains m'en avaient voulu pour cette note qu'ils avaient jugée plutôt modeste, mais j'avais dit aussi que j'espérais que la note serait plus élevée après la Coupe du monde. Aujourd'hui que le Mondial est terminé, je donne à l'Afrique du Sud la note de 9 sur 10, ce qui équivaut au niveau de doctorat (rire). Pour pas 10 sur 10 ? Tout simplement parce que la perfection n'existe nulle part et dans nul domaine. Donc, 9 sur 10, c'est une excellente note.» «Le Ghana était pourtant l'équipe la plus jeune du tournoi» «Je ne peux pas parler de toutes les sélections participantes. Je me suis contenté de féliciter le vainqueur, l'Espagne. Puisque vous me demandez de parler du Ghana, je réponds que je rends hommage à cette équipe, non pas seulement pour ses performances, mais surtout parce que c'est la sélection la plus jeune de ce Mondial. Il est suivi, dans le classement des équipes les plus jeunes, par l'Allemagne et l'Espagne. Regardez ce qu'ont fait ces équipes et vous constaterez qu'avoir des jeunes joueurs n'est pas un désavantage. Quant au volet technique, ce n'est pas à moi de faire des appréciations sur les prestations du Ghana. S'agissant du quota de l'Afrique pour le Mondial-2014, cette question sera discutée sereinement lors de la prochaine réunion du Comité exécutif de la FIFA.» «Je rends hommage à Madiba, ce grand humaniste» «A la fin, permettez-moi de rendre un hommage particulier à un homme qui va vers ses 92 ans et qui a longtemps souffert, qui a répandu l'amour et la générosité parmi le peuple sud-africain. Ma première rencontre avec lui remonte à 1992, alors que l'Afrique du Sud multiraciale n'était pas encore née. Lors de cette première rencontre, il m'avait confié qu'il rêvait d'organiser la Coupe du monde de football dans son pays. Je garde en mémoire ce jour de mai 2004 lorsqu'à Zurich, la décision d'octroyer à l'Afrique du Sud l'organisation du Mondial-2010 avait été officialisée, il avait pris le trophée entre ses mains. Si la Coupe du monde est venue en Afrique du Sud, c'est grâce à lui et à son combat. Hier, à l'occasion de la finale, il tenait à être présent au stade afin de voir que son rêve s'est réalisé. Ce n'est pas seulement un homme. C'est aussi et surtout un grand humaniste. Aujourd'hui, je rends hommage à ce grand humaniste, Nelson «Madiba» Mandela.» ------------------------------------------------- Hayatou : «Nous avions craint une démobilisation des Sud-Africains après l'élimination de leur sélection» Dans sa courte allocution, Issa Hayatou, en sa qualité de président du Comité d'organisation du Mondial-2010, a mis en exergue les images qu'il gardera de ce Mondial. «Mon plus grand souvenir restera la volonté affichée par les Sud-Africains de montrer au monde entier qu'ils sont capables d'organiser un événement de l'ampleur d'une Coupe du monde. Tout le monde s'est mobilisé pou ce faire. Nous avions eu la crainte de voir la déception ressentie par le peuple sud-africain après l'élimination de son équipe nationale se répercuter négativement sur la suite du tournoi, mais, au contraire, la mobilisation s'est poursuivie et les Sud-Africains ont bien rempli les stades.» Jordaan : «Ce matin, je me suis réveillé en étant fier d'être africain» Danny Jordaan, qui a été, avec le secrétaire général de la FIFA, Jérôme Valcke, les deux hommes qui ont suivi au quotidien, depuis plusieurs moins, l'avancement des aspects de l'organisation et la concrétisation du projet, ne cachait pas sa profonde satisfaction lors de son allocution hier. «C'est un sentiment incroyable ! Quand on lutte durant des années pour avoir et réaliser un objectif, on ne peut ressentir que du bonheur au final. Je remercie M. Blatter pour avoir rendu ce rêve réalisable. Il avait fait le même constat que nous, lorsque nous avions formulé le vœu d'organiser le Mondial : l'heure de l'Afrique était venu. Je le remercie pour son soutien et sa confiance durant des années. Mes remerciements vont également à Nelson Mandela pour sa contribution décisive à l'amorce de ce projet. Je rends également hommage à Jérôme Valcke qui, depuis des années, a été un interlocuteur attentif. Il s'est montré disponible et très compréhensif pour résoudre en commun touts les problèmes qui surgissaient. Ce matin, je me suis réveillé en étant très fier d'être africain et sud-africain.»