Pour Serrar, le Cairo-Stadium n'a rien d'un enfer et les Algériens ont les moyens de revenir avec la victoire. Sans les citer nommément, Abdelhakim Serrar, le président de l'Entente, a accusé certains héros de 82 et 86 de vouloir s'accaparer l'histoire en souhaitant tout simplement ne plus voir l'Algérie en Coupe du monde. Pour Serrar, le Cairo-Stadium n'a rien d'un enfer et les Algériens ont les moyens de revenir avec la victoire, s'ils arrivent à jouer sur leur véritable niveau. * Vous avez affronté les Egyptiens en tant qu'international, capitaine de l'Entente et président. Pouvez-vous nous donner votre point de vue sur ce qui se raconte, à quelques jours du match Egypte-Algérie ? Pour le moment, le match se déroule dans les médias. Du côté égyptiené notamment Al Hayat et Dream, on fait tout pour atteindre le public algérien. Et là, j'ouvre une parenthèse pour demander à nos journalistes de ne pas tomber dans le piège des Egyptiens en évitant de reprendre tout ce qu'ils récoltent comme informations venant d'Egypte. Il faut plutôt parler de notre équipe nationale et insister sur le fait qu'elle a largement les moyens de revenir du Caire avec la qualification. * Que retenez-vous de vos différentes confrontations avec la sélection ou les clubs égyptiens ? J'ai joué contre eux à trois reprises. En 1984, j'étais dans le groupe qui a affronté l'Egypte pour le compte de la qualification aux Jeux Olympiques de Los Angeles. En 1989, j'étais titulaire lors du fameux match de qualification au Mondial-90. Un an plus tôt, j'ai joué la demi-finale de la Coupe d'Afrique des clubs champions avec l'Entente contre Al Ahly sans oublier les deux matchs de l'Entente contre Talae Al Djaïch et ENNPI en tant que président. A travers toutes ces rencontres, je peux vous certifier que l'accueil qui nous a été réservé par les Egyptiens a toujours été correct. Je lis souvent des déclarations d'anciens joueurs qui dénoncent les conditions dans lesquelles se sont jouées nos matchs en Egypte et je peux dire qu'il y a beaucoup d'exagération. J'étais présent lors des deux rencontres marquées par des incidents, mais je n'ai pas vu des dépassements graves. Rien n'a dépassé le cadre sportif. * Selon vous, il ne s'est absolument rien passé et les témoignages des anciens joueurs sont faux ? Je n'ai pas envie de polémiquer encore moins d'entrer en conflit avec mes anciens coéquipiers en Equipe nationale, mais j'ai été sincèrement surpris par certaines déclarations sur nos confrontations avec l'Egypte au Caire. C'est vrai que les supporters ne nous ont pas accueillis avec des fleurs et c'est normal, car cela se passe comme ça partout dans le monde, y compris chez nous, mais notre réaction à nous n'a pas été tendre du tout. Nous n'avons pas réussi à maîtriser nos nerfs et le meilleur exemple, c'est cette histoire du médecin égyptien. Nous sommes des joueurs de football représentant une nation et nous venions d'être éliminés de la Coupe du monde. Un supporter chauvin vient nous provoquer dans notre hôtel et que faisons-nous ? Nous le frappons avec un verre. Est-ce une réaction sage ? C'est vrai que ce n'est pas Belloumi qui a commis l'agression et j'en suis témoin, mais il y a eu agression durant laquelle un citoyen égyptien a perdu un œil à cause d'un joueur algérien. * Mais on a parlé de fêtes organisées dans l'hôtel des Algériens, d'intimidations et autres agressions… Si vous parlez du match de 89, je suis bien placé pour rapporter les faits tels qu'ils se sont produits, parce que j'étais titulaire à l'époque. Nous sommes arrivés à l'aéroport normalement et l'accueil a été des plus ordinaires. A l'hôtel Sheraton où nous avions pris nos quartiers, toute une aile nous a été réservée au 11e étage pour nous permettre de nous concentrer pleinement sur notre match. C'est vrai qu'il y avait des fêtes à l'hôtel, mais elles se déroulaient très loin de nos chambres, elles ne nous perturbaient guère dans notre préparation. Les Egyptiens sont des gens qui veillent beaucoup et ils ne l'ont pas fait spécialement pour nous empêcher de dormir. Les entraînements que nous avons effectués se sont tous déroulés à huis clos. Tous les incidents de ce match ont eu lieu après le match, notamment à notre arrivée à l'hôtel. * Mais avouez M. Serrar que l'arbitre tunisien, M. Bennacer, a été partial… Je ne le pense pas, car la pression qu'avait exercée sur lui Cheïkh Kermali avant le match a contraint M. Bennacer à maîtriser le match. Sur le terrain, les Egyptiens méritaient de gagner et on ne devait s'en prendre qu'à nous-mêmes d'avoir raté plusieurs occasions d'égaliser en deuxième mi-temps, notamment par l'intermédiaire de Chérif Oudjani qui a manqué le but égalisateur à deux minutes du coup de sifflet final. * Le but de Hossam Hassan était-il valable ? N'y avait-il pas faute préalable sur Larbi ? C'était un but valable à 100% et je ne dis pas ça pour défendre les Egyptiens, mais pour défendre une vérité historique. Nous avons été éliminés de la Coupe du monde, après un rendement plus qu'honorable. Aujourd'hui et 20 ans après ce match, je souhaite de tout mon cœur que l'Algérie se qualifie en Coupe du monde, car elle en a largement les moyens. Je suis convaincu que la qualification ne nous échappera pas cette fois-ci. * Comme vous l'avez fait avec l'Entente en 88… Ce jour-là, j'ai marqué le penalty qui nous a qualifiés en finale de la Coupe d'Afrique des clubs champions devant 100 000 supporters d'Al Ahly et rien ne s'est produit. Malheureusement, chez nous il y a encore des personnes qui ne souhaitent plus voir l'Equipe nationale en Coupe du monde en répétant à longueur de journée que jouer stade du Caire est un enfer. En Algérie, nous avons un problème de leadership et je demande à ces gens-là de ne pas envier cette jeune équipe et de la laisser continuer poursuivre son chemin tranquillement. * Sincèrement M. Serrar, parlez-vous des anciens qui ont participé aux Coupes du monde 82 et 86 ? Personne ne peut nier nos victoires, mais l'histoire ne doit pas s'arrêter à 82. Moi, j'ai eu l'honneur de gagner la Coupe d'Afrique des clubs champions avec l'Entente, mais je n'ai jamais souhaité que l'Entente ne la gagne plus juste parce que je veux être le seul à avoir brandi ce trophée. Au contraire, mon souhait c'est de voir la vitrine de mon club de toujours étoffée chaque saison de nouveaux titres. Au lendemain de la victoire 3 à 1 contre l'Egypte, j'avais dit que j'étais le plus heureux des présidents, parce que ce succès nous a relevés la tête et comblés de fierté en tant qu'Algériens. Sachez qu'avant ce match, j'étais très gêné lorsque les dirigeants des clubs arabes et africains me demandaient pourquoi l'Equipe nationale ne fait plus parler d'elle comme avant. Je n'avais pas quoi leur dire car moi-même je n'avais pas d'explication à donner aux absences des Verts dans les compétitions internationales. Aujourd'hui, je suis fier de cette équipe et je ferai l'impossible pour la voir en Coupe du monde. * Si l'on comprend bien, vous ne craignez rien pour l'équipe nationale au Caire ? Je ne crains rien, parce que nous allons jouer dans un pays frère et le contexte entre 89 et 2009 a changé. Même le comportement des peuples égyptien et algérien n'est plus le même qu'il y a 20 ans. * Parlons un peu de l'Entente. La défaite face à ENNPI à Sétif a, selon certains observateurs, redonné confiance à la sélection égyptienne. Qu'en dites-vous ? L'Entente est en finale de la Coupe de la CAF. Où est ENNPI ? Notre objectif, c'est de gagner la Coupe d'Afrique, ce n'est pas de battre le représentant égyptien en aller et retour. De plus, cette rencontre s'est jouée dans un contexte particulier, au lendemain de l'Aïd El Fitr. Malgré tout, je ne pense pas que les résultats des clubs pourraient influer sur ceux de l'Equipe nationale. * Beaucoup pensent que Abdelmalek Ziaya pourrait être l'homme de la situation au Caire. Etes-vous de cette avis, vous qui le connaissez assez bien ? C'est vrai que les chiffres prouvent que Ziaya est en excellente forme : il est le meilleur buteur de la Coupe de la CAF avec 13 buts et est le joueur algérien le plus demandé à l'étranger. Malgré tout, je ne vais pas me comporter comme un président clubard en mettant la pression sur Saâdane pour le prendre. Non, je ne ferai jamais ça parce que je sais que Saâdane connaît très bien Ziaya, mais il connaît encore mieux son métier. Je sais d'ailleurs que Ziaya est dans son calepin et qu'il pourrait être appelé après la qualification en Coupe du monde inch'Allah. * Quelles seront les chances de l'Equipe nationale de se qualifier en Coupe du monde ? Elles sont très grandes, car beaucoup oublient que la pression sera sur les Egyptiens. J'irai même plus loin en vous disant que l'Algérie est même capable de surprendre l'Egypte au Caire en revenant avec la victoire. * Quel effet cela fait-il pour un joueur de jouer devant 80 000 supporters égyptiens ? Le public égyptien est un public qui ne fait que crier durant tout le match. En tout cas, un joueur qui a peur d'évoluer devant 80 000 supporters de l'équipe adverse n'a qu'à rentrer chez lui, car tout compte fait cela peut constituer une motivation pour les Algériens. Quel serait le meilleur scénario pour les Algériens à votre avis ? Leur marquer un but. Cela nous donnera confiance et brouillera leurs cartes. Entretien réalisé par Chouaïb K.