«Al Hadary m'a dit : ‘‘Vous avez une équipe qui mérite d'aller en Coupe du monde''» Ayant côtoyé de très près le football égyptien durant son passage au Zamalek, Kamel Kaci-Saïd apparaît comme le plus prompt à nous parler de ce match Egypte-Algérie du 14 novembre. Loin de verser dans ce que l'on appellerait un optimisme béat, Kaci-Saïd voit déjà l'Algérie au Mondial, vu, précise-t-il, son statut de leader du groupe C. «Pour se qualifier, l'Egypte n'aura qu'une seule alternative : nous battre par plus de deux buts d'écart. Techniquement parlant, c'est impossible», opine-t-il encore. Plus que de l'optimisme, c'est une conviction, insiste l'actuel entraîneur de l'EN militaire. Entretien. * Etes-vous en train de suivre toute cette polémique qui précède le match Egypte-Algérie du 14 novembre prochain ? Bien sûr. Même si j'étais en France ces derniers jours, je suis resté attentif à ce qui se disait sur ce match, via Internet notamment. C'est un match capital pour l'Algérie. Il va de soi qu'on s'y intéresse. * Quelles sont, selon vous, les chances de l'Algérie d'aller au bout de ces éliminatoires ? Elles sont grandes. Nous partons en Egypte dans la peau du favori. Cela veut tout dire à mon sens. Contrairement à l'Egypte qui est condamnée à gagner par au moins trois buts d'écart pour passer au Mondial, nous avons au moins quatre situations favorables. * Pensez-vous que l'Algérie peut perdre par plus de deux buts au Caire le 14 novembre prochain ? Ce sera difficile. Techniquement, ça me paraît impossible. Nous avons un groupe assez homogène avec un état d'esprit professionnel qui fait que l'EN abordera certainement ce match avec l'intention de le gagner. Même si on encaisse, nos joueurs sauront comment se porter en attaque. Vu la qualité offensive de notre équipe nationale, je pense qu'on pourra planter au moins un but là-bas. Nous l'avons déjà prouvé en Zambie et au Rwanda. Et pour tout vous dire, je m'attendais dès le départ à un final Egypte-Algérie. * Comment ça ? J'avais dit à Saâdane au tout début de ces éliminatoires que nous allions jouer notre qualification face à l'Egypte lors de la dernière journée. L'Egypte a certes fait un mauvais départ, mais j'étais persuadé qu'ils allaient revenir au fil des matches. Ça a fini par se confirmer. Seulement, cette rencontre, nous n'allons pas l'aborder comme en 1989. Le contexte n'est pas du tout le même. * Où situez-vous la différence entre ces deux matches ? En 1989, il suffisait d'un petit but à l'Egypte pour se qualifier. C'était le cas quand bien même leur but n'était pas valide. Cette fois-ci, nous partons comme je viens de le dire le disais dans la peau du leader. Ça change toute la donne. * Vous qui avez joué au Zamalek dans le temps à côté de l'équipe nationale, pensez-vous que l'EN actuelle va connaître la même pression qu'il y a dix ou vingt ans ? Les médias égyptiens sont en train de se livrer à une guerre médiatique dans seul le but de travailler les nerfs de nos joueurs à la base. Mais ce qu'ils ignorent, c'est que nos joueurs ont été formés en Europe pour la plupart, ce qui fait qu'ils ne connaissent pas les sensibilités qui peuvent exister entre nos deux pays. Je veux dire par là qu'ils iront jouer leur match, un point c'est tout. C'est cette mentalité qui va faire la différence à mon avis. Vous n'allez pas les voir contester les décisions de l'arbitre ni s'emporter contre l'adversaire. C'est dans leur formation. La pression sera sur les Egyptiens. * Quel accueil va être réservé, selon vous, à notre équipe nationale pour le match de ce 14 novembre ? Je m'attends à un accueil tout ce qu'il y a d'ordinaire. Les choses ont beaucoup changé depuis 1989. Le contexte n'est plus le même. Je m'attends à beaucoup de fair-play sur le terrain. Les joueurs se connaissent entre eux. Ils se croisent assez souvent sur les terrains européens. Zidan par exemple connaît parfaitement Yahia et Matmour. Je suis persuadé que si nous gagnons au Caire, le 14 novembre prochain, nos joueurs sortiront sous les applaudissements du public égyptien. * Pourtant, les joueurs égyptiens font tout pour diminuer de la valeur de notre EN… Ils ont même contesté la légitimité de la victoire de Blida (3-1, NDLR). C'était leur façon de justifier la défaite auprès de leur opinion. Cette histoire d'intoxication a été inventée de toutes pièces par les joueurs et elle a été savamment reprise par les médias égyptiens. On sait tous que s'il y avait eu intoxication généralisée, les joueurs égyptiens n'auraient jamais pu jouer ce match. D'ailleurs, il n'y a que leur staff technique qui a mangé du couscous ce jour-là. Ça, on le sait très bien. Pour tout vous dire, même le gardien Al Hadary m'a avoué la supériorité de l'Algérie après ce match. * Vous l'avez rencontré ? Oui, je l'ai croisé à l'aéroport au lendemain du match. Il s'apprêtait à s'envoler pour le Caire avec le reste de sa sélection. On en a profité pour papoter un peu. C'est quelqu'un que je connais particulièrement pour l'avoir affronté à maintes reprises par le passé. Il m'a avoué en toute sportivité que l'Algérie était supérieure et que nous avions une équipe qui méritait d'aller au Mondial. * Vous avez été l'auteur du but de cet Egypte-Algérie de 1995 (1-1, NDLR). Pouvez-vous nous raconter l'ambiance de ce match ? C'était un match plus important pour nous que pour l'Egypte qui avait alors assuré sa qualification à la CAN. J'avais inscrit le premier but de l'Algérie et les Egyptiens ont égalisé difficilement. Je pense que nous avons les moyens de rééditer cet exploit. Nous avons des joueurs qui jouent au plus haut niveau et savent gérer ce genre de match. On ne devrait pas se faire de soucis pour eux. * Donc, la pression sera sur les Egyptiens selon vous ? Ils seront tenus de faire le jeu. A partir de là, on pourra toujours dire oui. Cela étant, il faudra faire attention à cette équipe qui peut, dans un sursaut d'orgueil, apparaître comme un vrai ogre. Cette génération a tout gagné. Il lui manque une participation au Mondial et ceci est une en soi pour les joueurs égyptiens. * Quelles sont les chances de voir les deux équipes aller aux barrages ? On verra bien. Même dans ce cas-là, nos chances resteront intactes dès lors que nous possédons un bon groupe. En plus, quoi qu'il arrive, cette génération a réussi là où nous avons échoué. Grâce à eux, tout un peuple recommence à y croire. Nous avons assuré une participation à la prochaine CAN après deux absences de suite. Nous avons une sélection jeune qui pourra continuer à défendre les couleurs nationales durant la prochaine décennie, pour peu qu'on continue de prendre soin d'elle. Des joueurs qui jouent dans les plus grands clubs européens et qui répondent à chaque fois à l'appel du sélectionneur, on ne peut pas être plus nationaliste que ça. C'est tout à leur honneur. * Un mot sur la blessure de Ziani ? J'espère qu'il n'a rien de grave. Car si c'est une déchirure, cela voudrait dire qu'il ratera le match face à l'Egypte, du moment qu'il lui faudra au moins trois semaines de repos. Toujours est-il, nous possédons un groupe assez étoffé. Je pense qu'un garçon comme Meghni pourra le remplacer facilement. Saïfi aussi a un capital expérience assez important pour ce genre de match. Entretien réalisé par Mourad H.