«Halliche m'avait caché qu'il était malade» «Au Caire, j'ai vu la peur sur le visage de Matmour» Le sélectionneur national a accordé une interview lundi dernier à nos confrères marocains de Médi 1 Sat. C'était lors de l'émission sportive «Match». Rabah Saâdane a commencé tout d'abord à parler de ses sentiments, après cette qualification historique en Coupe du monde. Il dira à ce sujet : «J'ai ressenti une grande joie après cette qualification pour le mondial. J'étais heureux, car ce succès permet au football algérien de revenir sur la scène internationale après 24 ans d'absence. Les gens étaient tous solidaires avec nous, et ça nous a beaucoup réjouis. Incontestablement, ce 18 novembre restera le plus beau jour de ma vie.» Il s'est effondré en larmes par la suite en dédiant cette qualification à son épouse. «Après la victoire en Zambie, on a commencé à croire au Mondial» Rabah Saâdane a abordé aussi le fameux match de ChililabombwE, en terre zambienne. Pour l'entraîneur des Verts, cette victoire a permis à cette sélection de rêver, vu l'écart de points qui a été pris par rapport à l'Egypte et la Zambie «Vraiment, la victoire en Zambie nous a permis de rêver. Après avoir battu la Zambie chez elle, je me suis dit qu'il y a un bon coup à jouer dans ces éliminatoires. Il ne faut pas oublier que l'Algérie était absente de la phase finale de la CAN deux fois consécutives. Donc, notre premier objectif était d'aller tout d'abord en Angola, et par la suite le Mondial. Au début des éliminatoires, on ne pensait pas au Mondial, vu qu'on avait des certaines insuffissances. Même actuellement, on est encore loin, je pense qu'on sera plus performents après la CAN, car les stages des dates FIFA ne nous permettent pas de faire du bon travail», a déclaré Saâdane. «Les Egyptiens nous avaient préparé d'autres coups pour nous déstabiliser, et les agressions avaient été calculées» Le sélectionneur national a enchaîné par la suite sur les graves incidents survenus avant le match Egypte - Algérie au Caire. Rabah Saâdane estime que c'est grâce à la vigilance du président de la Fédération, Mohamed Raouraoua, que les Algériens ont évité d'autres scénarios. Il dira à ce sujet : «Je ne m'attendais pas à un tel accueil à notre arrivée à l'hôtel, car quelques minutes auparavant, on a été très bien accueillis à l'aéroport. Mais par la suite, tout a changé. Je pense que grâce à la vigilance du président de la Fédération, nous avons évité le pire. Ce qui s'est passé le jour de notre arrivée n'était qu'un début, on nous a préparé d'autres coups pour rentrer sur le terrain, le jour du match, démoralisés. Mais nous avons évité tout ça, vu son expérience. Moi, je n'ai jamais dirigé un match au Caire auparavant. Je ne vous cache pas que je ne m'attendais pas à un tel accueil.» «J'ai lu la peur sur le visage de Matmour» Rabah Saâdane a continué à raconter l'enfer vécu au Caire. Il dit même qu'il a vu la peur sur le visage de Karim Matmour, milieu de terrain du Borussia Mönchengladbach: «Les joueurs n'ont jamais vécu ça. Je m'attendais à voir une équipe un peu amoindrie, mais pas à ce point. Le visage affiché au Caire prouve que les joueurs ont été traumatisés. D'ailleurs, le traumatisme vient après. Le médecin français, qui fait partie du staff médical des Verts, a vécu des évènements semblables avec l'OM, lors d'un match OM - PSG, m'a dit qu'ils avaient commis la même erreur, celle de jouer le match. Bon, la FIFA nous a protégés après l'agression, mais les séquelles sont restées. D'ailleurs, avant le match, j'étais dans l'embarras, car j'avais des blessés, je ne savais qui faire jouer. La preuve, sur le terrain, il y avait des joueurs qui étaient blessés. Par exemple, Matmour, il n'avait jamais vécu ça. C'était la première fois de sa carrière d'évoluer dans pareilles conditions, vu qu'il vit en Europe, et là-bas, on n'agit pas de la sorte. D'ailleurs, j'ai lu la peur sur son visage» «Halliche avait une diarrhée la veille du match» Après Matmour, Saâdane évoque le cas de Rafik Halliche, qui avait laissé ses coéquipiers sur le terrain après s'être blessé. Pour le sélectionneur national, cela prouve que les Egyptiens ont prémédité ces agressions : «Pour Halliche, je n'avais pas compris ce qui s'était passé. Mais après avoir quitté le terrain, j'avais confirmé que ces incidents étaient prémédités et calculés. Les Egyptiens nous ont déstabilisés. Ils voulaient nous battre par tous les moyens, car ils savaient pertinemment que c'était difficile de prendre à défaut cette équipe algérienne. Revenant au cas de Halliche, la veille à l'hôtel, il avait une diarrhée, mais il nous a caché ça, car il voulait jouer ce match. Sur le terrain, il avait ressenti des crampes, sachant qu'il n'a pas joué le dernier match avec son club.» «Je n'avais pas de solution avec le grand nombre de blessés, c'est pour ça que j'ai joué avec un seul attaquant» En abordant le volet technique, Saâdane raconte comment il a vécu l'avant-match de cet Egypte - Algérie : «Je n'avais pas de solution. Figurez-vous, qu'au centre sportif Coverciano en Italie, j'avais un nombre élevé de blessés. Et avec les blessures de Halliche et Lemmouchia après le caillassage de notre bus au Caire, c'était difficile pour moi. Je ne vous cache que je n'avais même pas en tête le onze rentrant, tellement j'étais dans l'embarras. Et en constatant que les joueurs avaient peur après ce qui s'est passé, puisqu'ils évoluent tous en Europe, j'ai décidé de jouer avec un seul attaquant. Notre objectif était de gagner, faire un match nul ou même perdre par un but à zéro. Même avec un seul attaquant, on avait créé le danger, lorsque les joueurs ont commencé à s'adapter avec l'atmosphère du Cairo Stadium.» «En décollant du Caire, les joueurs ont commencé à être soulagés" Rabah Saâdane a même raconté une anecdote, après le départ vers le Soudan pour jouer le match d'appui à Khartoum. Il raconte : «Une fois au bord de l'avion spécial d'Air Algérie, pour rejoindre le Soudan, les joueurs sont venus vers moi, et ils ont commencé à discuter le plus normalement du monde, comme si de rien n'était. Ils étaient soulagés, et je les comprends. Ils ont commencé à parler de la situation géographie du Soudan par rapport à l'Egypte, mais on leur a fait savoir qu'au Soudan, c'était autre chose. Les Soudanais sont pacifiques.» «Le Soudan algérianisé, c'est comme s'il y avait une communication par télépathie entre Bouteflika et les joueurs» Le déplacement en force des supporters algériens au Soudan a été accueilli par les joueurs tel un cadeau de Dieu. Rabah Saâdane nous confie : «Les joueurs priaient pour que nos supporters soient à nos côtés lors de ce match. Mais le président Bouteflika a eu l'initiative de nous envoyer nos supporters au Soudan, on dirait qu'il y avait une communication par télépathie entre le président et les joueurs. A partir de là, on a savait qu'on allait gagner ce match. Les joueurs étaient libérés en voyant même les responsables politiques de notre pays venir au Soudan pour les soutenir, après la hogra du Caire. Même les blessés voulaient jouer ce match.» «A la mi-temps, j'avais dit aux joueurs d'attendre les Egyptiens pour les contrer par la suite» Rabah Saâdane raconte pour la première fois ce qu'il a dit aux joueurs à la mi-temps de ce match historique, qui s'est joué à Khartoum. Le driver des Verts avait en effet donné des consignes à ses protégés d'attendre les Egyptiens et procéder par la suite par des contres, surtout qu'ils menaient au score «A la mi-temps, j'ai résumé tout en deux minutes. J'avais donné des consignes aux joueurs d'attendre l'Egypte et de procéder par des contres-attaques. La preuve, nous avons eu les meilleures occasions, mais la chance nous a malheureusement tourné le dos», dira Saâdane. «En 2007, Raouraoua m'avait demandé de voir avec ma famille pour prendre en main la sélection» Le sélectionneur parlera par la suite de son retour à la tête des Verts : «En 2007, j'avais discuté avec M. Raouraoua au siège du Comité olympique où on s'est rencontré. Il m'a demandé de voir avec ma famille pour prendre en main la sélection nationale. Lui, il est au courant pourquoi je refusais de prendre la sélection. Ma femme et mes enfants sont toujours sous le choc, ils sont toujours traumatisés. M. Raouraoua m'avait proposé un projet ambitieux.» «Le peuple algérien était unis contre la hogra des Egyptiens» Pour conclure son intervention, Saâdane a parlé de cet accueil triomphal à Alger: «Comme je vous l'ai déjà dit, c'était le plus beau jour de ma vie. J'étais vraiment surpris par l'accueil royal qui nous a été réservé. Tous les Algériens étaient unis contre la hogra des Egyptiens. C'est vraiment quelque chose d'inoubliable.» Synthèse Hamza Rahmouni