La sagesse a prévalu dans la désignation du premier gouvernement algérien au lendemain de l'indépendance du pays en dépit des incompatibilités personnelles, nées de ce qui était appelé «crise de l'été 1962", a indiqué un des membres de cet Exécutif, M.Amar Bentoumi. «la sagesse, affichée par la plupart des dirigeants à leur tête Benkhedda Benyoucef, avait prévalu dans la constitution du premier gouvernement de l'Algérie indépendante, ce qui a permis d'épargner des conflits fratricides nourris par des incompatibilités plutôt personnelles que politiques ou idéologiques», a témoigné M. Bentoumi qui occupait le poste de ministre de la justice, garde des sceaux au sein de ce gouvernement. Constitution du gouvernement: alliances et concessions M. Bentoumi, 89 ans, a expliqué dans un entretien accordé à l'APS à l'occasion du 50eme anniversaire de la création du premier gouvernement de l'Algérie indépendante que «les choses n'étaient pas faciles et tout était confus», dans l'élaboration de la liste de ce gouvernement du fait, a-t-il dit des «conflits personnels». «la première rencontre entre Krim Belkacem et Ahmed Benbella, tenue à Alger pour arrêter la composante définitive du gouvernement a été sanctionnée par un échec. Cela a attisé la crise et les incompatibilités personnelles», raconte M. Bentoumi. «Cette instabilité avait amené la France, toujours présente en Algérie, à brandir la menace d'intervention sous prétexte de +protéger ses ressortissants+ au moment où la rue grognait et la population scandait +sebaa sinin barakat+ (sept ans ça suffit)», a-t-il souligné. Face à une situation qui dérapait dangereusement, «un nouvel arrangement s'était imposé». Une deuxième liste a été ainsi établie et acceptée, selon M. Bentoumi, avec cependant des modifications dans sa composante, notamment la mise à l'ecart de certains représentants de la fédération de France. La liste a été établie essentiellement par Mohamed Khider et Ahmed Ben Bella en dépit des divergences entre les deux dirigeants, a expliqué le tout premier ministre de la justice, faisant observer que «la sagesse avait fini par l'emporter grâce aux concessions des uns et des alliances des autres». Il a précisé qu'il fallait «outrepasser toutes les divergences d'autant plus que la population avait investi la rue. Il y avait risque de guerre civile». L'essentiel était de préserver l'indépendance Les responsables de l'époque,avaient pour souci «de préserver la sécurité, l'unité et l'indépendance de l'Algérie afin de ne pas remettre en cause les accords d'Evian», a affirmé M. Bentoumi,. Une fois la crise dépassée, a-t-il dit, le gouvernement s'attelait à parer au plus urgent, à savoir assurer l'approvisionnement de la population en produits alimentaires notamment en cette période de labours et semailles (Septembre-octobre). L'autre priorité consistait à jeter les premières bases de l'édification des institutions de l'Etat algérien, citant en ce qui concerne son secteur (ministère de la justice) la mise en place du code de la nationalité en remplacement de la convention du 5 juillet 1830, à l'origine du statut personnel du Musulman. M. Ahmed Ben Bella qui occupait le poste du Président du Conseil de la Révolution était chargé exclusivement de la gestion, et était lui même à l'origine de la création des comités d'autogestion, a indiqué M. Bentoumi. Evoquant l'expérience du premier gouvernement algérien, il a fait savoir que «tout était à faire» par des ministres qui «manquaient» à cette époque là d'expérience dans la gestion des affaires de l'Etat. «Il y avait ainsi nécessité de faire appel à des coopérants techniques et assimilés étrangers notamment français pour permettre à ce gouvernement de relever les défis nés de l'indépendance de l'Algérie», a indiqué M. Bentoumi.