Les deux chambres du Parlement français ont adopté définitivement, hier, le projet de loi Morin portant sur l'indemnisation des victimes des essais nucléaires effectués par la France en Algérie et dans le Pacifique. La loi Morin, au non de son initiateur, le ministre de la Défense, Hervé Morin, concernera plus de 150.000 civils et militaires, dont 25.000 demandeurs algériens qui seront traités au cas par cas. Cette loi qui n'a suscité l'unanimité au sein des obédiences politiques françaises, est considérée par les uns comme sélective et partiale. D'autres révèleront que la France fait encore post bellum en marginalisant les victimes civiles et surtout algériennes. Pour rappel, le gouvernement français a débloqué une enveloppe de dix millions d'euros pour indemniser les victimes des essais nucléaires conduits par la France dans le Sahara algérien et en Polynésie. Cette loi repose sur six principes. Premièrement, elle identifie «la période de référence» qui comprend en totalité la période des travaux effectués sur les sites, y compris lors du démantèlement des installations. Ensuite, la victime n'est pas tenue d'apporter «la charge de la preuve», celle-ci est renversée, c'est-à-dire la victime exposée n'a pas besoin de prouver que sa maladie «est due aux essais nucléaires» mais à l'Etat français, s'il le conteste. Le troisième critère concerne le «seuil de contamination minimum» qui reste à définir selon le texte de loi. Le préjudice moral ou esthétique sera «indemnisé». La liste des maladies donnant droit à «indemnisation sera élargie». Enfin, les demandeurs non-satisfaits auront «la possibilité de recours devant un tribunal administratif». La loi Morin distingue deux types de demandeurs. Il s'agit, selon le texte, de distinguer entre une indemnisation des victimes qui pourront se soumettre aux critères de la loi pour bénéficier d'une «indemnisation individuelle» et la réparation due au préjudice global «à l'ensemble d'une population donnée». Les demandes sont soumises à un comité d'indemnisation qui dispose de quatre mois pour présenter au ministre de la Défense une recommandation sur les suites à donner. Ce dernier dispose, à son tour, d'un délai de deux mois pour notifier son offre d'indemnisation à l'intéressé ou le rejet motivé de sa demande. Le texte prévoit, d'autre part, la création d'une commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires, que le ministre de la Défense français doit réunir au moins deux fois par an. Les demandes d'indemnisation seront examinées au cas par cas par une commission indépendante, constituée de médecins et présidée par un magistrat. Cette commission s'appuiera sur des données scientifiques et médicales de l'organisation des Nations unies. Le ministère de la Défense français reconnaît plusieurs incidents, dont quatre lors d'essais conduits dans des galeries au Sahara qui n'ont pas été totalement confinés, en particulier le 1er mai 1962, lorsque des retombées radioactives importantes ont été relevées dans une bande de plus de 150 km.