Faut-il se réjouir de la baisse de la facture alimentaire ? Assurément, oui. Mais quand on analyse les raisons pour lesquelles l'Algérie a importé moins de produits alimentaires, on se rend compte qu'il n'y a pas de quoi pavoiser. Les importations algériennes en produits alimentaires ont atteint 5,8 milliards (mds) de dollars en 2009, contre 7,8 mds de dollars en 2008, soit une baisse de 25,64%. En réalité, cette baisse est plus à attribuer à la dégringolade des cours de ces produits sur les marchés boursiers dans le sillage de la crise financière et économique mondiale qu'à une performance de l'agriculture et de l'industrie agroalimentaire nationale. Certes, la récolte céréalière a été exceptionnelle la saison dernière, mais la production étant inconstante, les importations restent toujours élevées. Du moins en quantités. Il faut savoir aussi que si la production obtenue sur champs pour le blé dur a été importante -atteignant cette année 2,43 millions de tonnes- il n'en est pas de même pour le blé tendre (1,13 millions de tonnes). L'Algérie est donc obligée d'en importer pour combler le déficit. Selon le Centre national de l'informatique et des statistiques (Cnis) des Douanes, le montant des importations des céréales, semoules et farine, a enregistré une «forte» baisse de 42,35%, chutant de 4,05 mds de dollars en 2008 à 2,34 mds de dollars en 2009. Avec la hausse des prix du pétrole qui aura indéniablement un impact sur les prix des produits de base, en 2010, il faudra s'attendre à une remontée des importations en valeur. Il convient de signaler que l'Algérie renouvelle ses stocks constamment afin de ne pas se retrouver dans une situation de pénurie. Et dans la conjoncture actuelle, elle ne peut pas se permettre de diminuer les quantités importées de céréales, car la production dépend entièrement des conditions climatiques qui s'annoncent bien moins favorables que l'année dernière. Le record de 61 millions de quintaux réalisés en 2009 ne peut être réédité cette année. La moyenne de production durant les quatre dernières années (de 2004 à 2008) est de 34,3 millions de quintaux, (dont 23,3 millions de blé), avec des fluctuations liées au climat qui vont de 9,3 millions de quintaux (dont 7,6 millions de blé) en année sèche, jusqu'à 43 millions de quintaux en année humide (dont 29 millions de blé). Les importations de céréales se sont élevées à 63,5 millions de quintaux en 2008. L'Algérie importe en moyenne au moins 50 millions de quintaux annuellement. Ce produit pèse lourdement sur la facture alimentaire. Selon le Cnis, la facture des laits et produits laitiers s'est établie à 862,76 millions de dollars en 2009, contre 1,28 milliard de dollars en 2008, soit une baisse de 32,9%. Là aussi, la décroissance est à mettre sur le compte de la baisse des cours boursiers de la poudre de lait. Cependant, il faut reconnaître que la décision du gouvernement d'encourager les transformateurs de lait à intégrer le lait cru dans leur processus de production sous peine de ne pas être approvisionné en poudre de lait importée et subventionnée a contribué à réduire les importations de la matière première qui plombait, avec les céréales, la facture alimentaire. Ainsi, l'Algérie aurait importé en volume près de 40.000 tonnes de moins que l'année dernière. Une chose est sûre, l'Algérie reste trop dépendante des marchés internationaux concernant ses besoins alimentaires. Certains observateurs n'ont pas hésité à comparer la politique de l'Algérie en la matière avec le célèbre programme de l'Organisation des Nations-unies (ONU), pétrole contre nourriture. D'autres experts pensent que l'Algérie pays aride et semi-aride, parmi les plus exposés aux changements climatiques avec une avancée menaçante du désert, sera toujours structurellement déficitaire pour les produits agricoles. D'autres encore, plus pessimistes, lui prédisent un sombre avenir alimentaire. De nombreux spécialistes préconisent la diversification de l'économie, plus précisément le développement de l'industrie. Ceci pour permettre à l'Algérie d'avoir une balance commerciale équilibrée -même en cas- de baisse de la production pétrolière et afin d'avoir un pouvoir d'achat qui lui permettra d'être toujours solvable auprès de ses fournisseurs.