Photo : S. Zoheir Par Ziad Abdelhadi L'Algérie importe presque toute sa nourriture de l'étranger pour des raisons d'ordre structurel, qu'il s'agisse de contraintes climatiques, physiques ou agronomiques lorsqu'elles concourent à renforcer la dépendance du pays dans ce qu'il a d'essentiel, sa sécurité alimentaire. En 2008, la facture alimentaire a atteint des sommets avec un chiffre à donner le tournis, soit plus de 8 milliards de dollars américains payés au titre de nos besoins alimentaires. Autre constat, lié celui-ci à la production agricole nationale. Ce dernier laisse apparaître une situation peu reluisante de l'agriculture nationale presque totalement dépendante de l'extérieur, du point de vue intrants (semences, pesticides et même engrais et à un degré moindre le matériel agricole) qui contraint, malgré les sommes faramineuses englouties par les PNDA, FNDRA, le pays à importer une bonne partie de son alimentation. C'est dire si, devant un tel état des lieux, la question de la sécurité alimentaire à long terme reste plus que jamais posée. D'autant qu'il est à craindre, si l'inertie observée venait à s'inscrire dans la durée et si les revenus des hydrocarbures continuaient à décliner, de ne plus pouvoir répondre en totalité aux besoins alimentaires du pays. Sur ce cas de figure, les observateurs et autres agronomes se posent la question suivante : comment fera-t-on pour nourrir la population ? Et quand bien même l'inertie serait remplacée par une intense activité, comme l'avancent souvent des observateurs avertis, à chaque fois que l'occasion leur est donnée, «l'agriculture algérienne ne pourra pas produire, pour des considérations agro-pédo-climatiques, tout ce que les Algériens consomment». Sont visés : les céréales, les légumes secs, le lait et l'huile. En témoignent les dernières statistiques sur les importations qui dévoilent que quatre produits (le blé, le lait, les huiles et graisses ainsi que le sucre) représentent 80% des dépenses extérieures faites par le pays pour les produits alimentaires. Et donc cela va accentuer le recours aux marchés extérieurs et obérer considérablement nos ressources financières extérieures. Toujours au chapitre de l'état des lieux, on relèvera également que le secteur agro-industriel n'arrive pas à fournir toute la panoplie des inputs nécessaires à l'agricultureDevant cette situation de quasi-dépendance, que l'Etat ne saurait encore longtemps gérer, les observateurs jugent qu'il est temps de mettre en place une stratégie visant à assurer nos approvisionnements par notre agriculture. En d'autres termes, développer les productions les plus déficitaires qui s'avèrent être des produits autochtones et aussi de première nécessité pour la consommation des ménages. Une option dont on dit dans le milieu des agronomes qu'elle est susceptible de donner au pays la garantie de la sécurité alimentaire. Ces deniers avancent que, si le pays veut se sortir de cette trop grande dépendance il ne lui reste qu'à réaliser une forte productivité par hectare sur l'essentiel de ses surfaces agricoles qui se situent dans le nord du pays, laquelle partie septentrionale est densément peuplée. Ce qui revient à dire qu'il faut prévoir une extension importante des surfaces arables tout en prenant en compte les besoins d'urbanisation qui vont aller crescendo en raison de la poussée démographique. En somme, il faudra, d'une part, produire plus et, d'autre part, libérer des terres pour l'urbanisation. Pour en rester à la problématique de produire plus, des cadres du ministère de l'Agriculture soulignent qu'en Algérie, comme partout ailleurs, le problème de l'insuffisance de la production locale, autrement dit la question de l'insécurité alimentaire n'est pas un aspect seulement technique mais procède de la politique, «car les hommes savent produire et/ou apprennent à le faire aisément grâce à la vulgarisation, aux conseils, à la formation et en s'inspirant des expériences réussies des voisins. Mais, pour cela, le pays doit se fixer d'une manière non ambiguë quelle agriculture il veut construire, de quels agriculteurs il a besoin et, en même temps, quels moyens il pourra y consacrer», précisent-ils. Une agriculture plus performante à même d'assurer de hauts rendements Depuis quelques années, les pouvoirs publics se sont prononcés sur les objectifs à atteindre car convaincus que le développement du secteur agricole est capital pour réduire la dépendance alimentaire, c'est-à-dire les importations qui ont occasionné un déséquilibre de la balance commerciale. Pour ce faire, une nouvelle volonté de prise en charge du secteur agricole a été décidée au plus haut niveau de l'Etat. Cela va se traduire sur le errain dans les prochaines années par un effort financier colossal. En effet, trois milliards de dollars ou plus de 200 milliards de dinars par an seront consacrés à l'agriculture. Ce qui va permettre, si cet argent est utilisé à bon escient, de rendre notre agriculture plus performante et de la projeter sur la voie de l'autosuffisance alimentaire. En somme, l'option adoptée par les pouvoirs publics s'inscrit en droite ligne dans les recommandations de la FAO. Cette organisation onusienne a, en effet, constaté dans son évaluation annuelle que les États qui ont nettement amélioré leur sécurité alimentaire sont ceux qui ont consenti le plus d'efforts en matière d'investissements. Il s'agit des États qui ont consacré 4 000 dollars d'investissements par actif agricole et par an. Notre pays, quant à lui, a enregistré un niveau d'investissement annuel de 300 dollars par actif et ce, pour une population agricole active de 2 500 000 âmes.