Port-au-Prince se vide à vue d'œil depuis le terrible séisme du 12 janvier dernier. Selon les derniers chiffres officiellement avancés, plus de 235.000 de personnes ont quitté la capitale pour les régions rurales d'Haïti, moins affectées par la catastrophe. Jusqu'à 800.000 personnes vivent dans des camps de fortune dans la capitale haïtienne, a annoncé l'ONU lundi. Ces décomptes n'intègrent pas ceux qui se sont rendus par leurs propres moyens auprès de famille ou d'amis. À l'étranger, on parle d'un million d'Haïtiens qui résident aux États-Unis et presque 200.000 au Canada. Et c'est à ces derniers que le Premier ministre Bellerive a lancé un appel pour qu'ils participent à la reconstruction du pays. C'était lundi matin, quelques minutes avant l'ouverture de la conférence internationale consacrée à la reconstruction. La réunion d'urgence des «pays amis» d'Haïti, lundi à Montréal, doit aider à coordonner l'aide immédiate au pays dévasté par le séisme du 12 janvier, mais aussi définir des objectifs à plus long terme, sans perdre l'élan de solidarité. Le Canada souhaite que cette rencontre permette de fixer le lieu et la date de la conférence des donateurs qui doit se tenir dans les mois à venir, a souligné dimanche le chef de la diplomatie canadienne, Lawrence Cannon. Les donateurs se sont finalement entendus pour se retrouver en mars prochain au siège de l'ONU pour mettre le train sur rail. «Nous devons déterminer en collaboration avec le gouvernement haïtien des priorités-clés pour établir un plan d'action pour le travail à accomplir. Ce plan nous permettra de préparer une conférence internationale fructueuse sur la reconstruction d'Haïti dans les mois à venir», a-t-il dit lors d'un point de presse télévisé. Lundi matin, les participants - dont les États-Unis, la France, l'Espagne, le Brésil, les Nations unies et l'Organisation des États américains - devaient d'abord «comparer leurs notes» pour faire le bilan de la situation. Celle-ci est marquée par l'arrêt des opérations de recherche de survivants alors que le bilan a dépassé les 112.000 morts, et par le déploiement d'importants secours étrangers. «On ne va pas reconstruire Haïti à l'identique. Il faut traiter les problèmes structurels. Ce ne sera pas un exercice seulement financier, on parlera de gouvernance et de coopération régionale», estime-t-on de source diplomatique française. Concernant le calendrier, «il y a un équilibre à trouver entre une conférence assez tôt pour conserver le mouvement lancé, l'élan de solidarité, et une date plus tard, pour effectuer un travail sérieux» de préparation, observe-t-on du côté français. Le niveau reste à définir, mais il pourrait s'agir de reprendre le «modèle Charm el-Cheikh», la conférence des donateurs pour la reconstruction de Gaza, qui avait réuni en mars en Egypte des ministres des Affaires étrangères et quelques chefs d'Etat. Qu'il s'agisse d'un sommet de dirigeants ou d'une conférence ministérielle, le gouvernement haïtien devrait y jouer un rôle central. Par ailleurs, la réunion de Montréal a été l'occasion pour les États-Unis de confirmer leur rôle central, et de facto dirigeant - illustré par un effort humain et financier considérable - dans l'offensive humanitaire de la communauté internationale en Haïti. Des tensions - vite démenties - étaient apparues il y a dix jours entre Washington et Paris sur fond d'encombrement de l'aéroport de Port-au-Prince, dont les États-Unis contrôlent le fonctionnement, tandis que des dirigeants antiaméricains du Venezuela, du Nicaragua et de la Bolivie ont dénoncé la présence militaire de la superpuissance sur le sol haïtien. Éoliennes canadiennes, technologies d'Hydro-Québec, expertise québécoise en génie : le gouvernement Harper estime qu'il ne faut pas seulement reconstruire Haïti, il faut reconstruire le pays dans un meilleur état que celui dans lequel il se trouvait avant le tremblement de terre qui l'a dévasté. Quatorze pays et quatre organisations sont présents à cette «conférence ministérielle préparatoire» qui vise à «fixer une orientation claire et commune pour le relèvement rapide et la reconstruction durable en Haïti». Pour ce faire, les délégués présents dans la métropole québécoise, parmi lesquels se trouvent la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton et le ministre français Bernard Kouchner, ont assisté à une présentation sur les besoins à long terme du pays par les organisations non gouvernementales travaillant en Haïti. Mais pour le ministre Cannon, une chose est d'ores et déjà certaine : il faut reconstruire mieux que ce qui existait avant le séisme du 12 janvier, selon le principe du «Build Back Better». «Cela signifie que l'argent investi dans les infrastructures doit aller aux meilleures technologies existantes pour reconstruire un Haïti nouveau, neuf, débarrassé de la misère qui l'enveloppe.