La rencontre annuelle des hommes d'affaires tunisiens et algériens a eu lieu les 3 et 4 février derniers, dans le Gouvernorat d'El Kef. Le point nodal de cette réunion était de voir comment protéger l'Algérie du «vampirisme» de certains hommes d'affaires arabes et étrangers. Ces derniers profitent des facilitations des accords de la Zale pour inonder le marché algérien de produits asiatiques contrefaits, censés être d'origine arabe. Tenue à l'occasion de la commémoration du 52ème anniversaire des événements de Sakiet Sidi Youssef, la réunion a également porté sur le renforcement des partenariats dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. L'industriel de la Chambre de commerce d'Annaba a vivement critiqué la zone arabe de libre-échange (ZALE), quant à la délivrance de certificats d'origine délivrés par les pays signataires de l'accord. Il soulignera à ce sujet «qu'en Algérie, nous avons beaucoup souffert de l'import-import ; les produits asiatiques débarquent par conteneurs. Ils écrasent la production locale -qui disparaît- au bout de quelques temps. On importe des produits de très mauvaise qualité qu'on paye en devises fortes et on exporte des postes de travail pour ces pays. Il ne faudrait pas que les Asiatiques nous exportent ces produits via les pays arabes interposés. Ces derniers délivreraient à leurs exportateurs des certificats d'origine de «complaisance» attestant d'un taux d'intégration (40%) conforme aux accords signés». La mise en place de garde-fous afin de protéger les économies des deux pays -qui ne sont pas assez fortes- pour faire face aux hégémonies libérales des grandes industries a été également évoquée par l'intervenant algérien. Côté tunisien, un opérateur tunisien dira que juste après la signature des accords avec l'Algérie, lors d'une rencontre sur le partenariat organisée dans son pays, le nombre de participants étrangers a triplé, ce qui était inhabituel. «Ces étrangers, ajoute-t-il, croyaient utiliser la Tunisie comme tremplin pour pénétrer en Algérie et profiter des avantages accordés; nous sommes conscients de cela. Nous rassurons les Algériens qu'il n'y aura que des produits exclusivement tunisiens qui seront exportés.» Présidant la réunion, Ridha Ben Mosbah, ministre du Commerce et de l'Artisanat dira que «le commerce bilatéral a atteint 1.277 millions de dinars en 2009. En ce qui concerne le nombre d'entreprises tunisiennes opérant en Algérie, elles sont estimées à plus de 60 entreprises. En particulier dans l'industrie et les services, dit-il. Pour rappel, la création de nouvelles institutions de partenariat, à savoir : une Chambre commune de commerce, commissions mixtes, signatures d'accords et autres rencontres au sommet, ont été bénéfiques pour les échanges entre les deux pays. Le volume des exportations tunisiennes vers l'Algérie a atteint les 367 millions de dinars tunisiens. En 2005, il était de 237 millions de DT et de 249 DT en 2006. La même progression significative, côté algérien: 175 millions de DT en 2005, 259 MDT en 2006, et 383, 5 MDT en 2007. L'homme d'affaires et haut responsable tunisien, H'sen Bata, ex-président de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (UTICA) et membre influent de la délégation tunisienne, a appelé à la revitalisation de la cellule des frontières algéro-tunisiennes. «C'est cette cellule qui est à la base de la concrétisation de cet espace économique vital que nous comptons créer et développer, lance-t-il. Et d'ajouter: «une organisation, une structuration et une coordination -sont aujourd'hui -indispensables pour pouvoir transmettre nos propositions à nos responsables qui, à leur tour, interviendront pour mettre au point les mécanismes et le cadre légal. Ils faciliteront l'ensemble des opérations des deux côtés. Aussi bien pour les Tunisiens voulant investir en Algérie que pour les Algériens en Tunisie». Quant aux difficultés rencontrées, H'sen Bata proposera «la création de sièges pour ces cellules qui seront implantés aux frontières de façon telle que l'opérateur économique -saura où il faut s'adresser- pour régler ses problèmes». «Cela lui permettra d'éviter bien des tracas et de gagner un temps précieux», assure-t-il. In fine, le même responsable tunisien souhaitera qu'une carte spéciale soit instituée et réservée exclusivement aux hommes d'affaires affiliés aux Chambres de commerce et d'industrie des deux pays. En fait, les Tunisiens veulent un partenariat durable et global qui touche tous les secteurs d'activité. On relèvera de leurs interventions que la création de sociétés mixtes de transport, d'une banque mixte pour le financement de projets communs, l'institution de conseils sectoriels, l'organisation de salons spécialisés, la création de banques de données de tous les secteurs d'activités et bien d'autres propositions ont été présentées à leurs similaires algériens. Représentant la délégation algérienne, l'industriel bônois, Redha Boushaba, a tenu de rappeler qu'«Algériens et Tunisiens sont condamnés à s'entendre parce qu'il y va de leur survie et de leur devenir face à un monde en perpétuel mouvement, face aux bouleversements économiques et à la crise financière. Une crise qui a frappé de plein fouet les grands pays industrialisés». D'autres secteurs ont été concernés par les débats : le tourisme, l'agriculture et le commerce extérieur. La possibilité pour les deux pays en partenariat de conquérir des marchés extérieurs sera bénéfique pour les deux économies, annonce-t-on.