Photo : M. Rahmani De notre envoyé spécial en Tunisie Mohamed Rahmani C'est dans une ambiance empreinte de fraternité sincère que les hommes d'affaires algériens et tunisiens se sont retrouvés ce mardi 2 février en cours au Kef (Tunisie) dans le cadre du forum annuel organisé dans le cadre de la commémoration du 52e anniversaire des événements de Sakiet Sidi Youcef. Cette année, c'est le secteur du bâtiment et des travaux publics qui a été ciblé par les participants au vu des opportunités réelles de partenariat entre les entreprises dans les deux pays, des potentialités, des compétences et de l'expérience que recèlent ces mêmes entreprises dans le secteur. La première réunion, qui s'était tenue à la salle de conférences de l'hôtel El Klil, a été l'occasion pour les deux parties d'évaluer la situation des échanges commerciaux bilatéraux, de soulever les problèmes rencontrés sur le terrain et de proposer les solutions adéquates à même de redynamiser ces échanges et d'arriver à des accords de partenariat entre les entreprises. Ainsi, M. Cherif Nesnane, représentant de l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat, a, dans son intervention, brossé un tableau de la situation générale qui prévaut actuellement, la jugeant positive avec toutefois des insuffisances qu'il faudra rectifier pour aller de l'avant. Abondant dans ce sens, le représentant de la Chambre de commerce de Annaba, M. Khelladi, est intervenu pour rappeler les problèmes rencontrés par les opérateurs algériens en Tunisie du fait de l'inadéquation des lois tunisiennes avec celles en cours en Algérie, rappelant à l'assistance, composée d'une centaine d'hommes d'affaires des deux pays, que la cellule des frontières n'a pas été dotée des moyens nécessaires qui auraient pu lui permettre de régler tous ces problèmes et accélérer ainsi tout le processus pour arriver à une véritable complémentarité économique entre l'Algérie et la Tunisie. Un des participants de la wilaya de Skikda rapportera qu'un de ses partenaires tunisiens n'a pas pu s'établir en Algérie pour cause de difficultés administratives, un autre soulèvera le problème derésidence pour les hommes d'affaires qui sont obligés de sortir de l'un des deux pays tous les trois mois pour être en conformité avec la législation en vigueur, ce qu'il trouve aberrant. Le lendemain, la cérémonie d'ouverture a été présidée conjointement par M. Réda Benmosbah, ministre tunisien du Commerce et de l'Artisanat et M. Kheireddine Hammoum, consul d'Algérie au Kef, accompagné de M. Hatem Lamari, wali du gouvernorat du Kef et du président tunisien de la Chambre de commerce mixte. Dans la salle décorée aux couleurs des deux pays et, accrochés au mur, les portraits des président Zine El Abidine Ben Ali et Abdelaziz Bouteflika, il y avait près de 200 hommes d'affaires venus de la région du Nord-Ouest tunisien (Jendouba, Béja, Feriana, Sakiet Sidi Youcef, Aïn Draham, Tabarka) et de l'Est algérien, (Skikda, Annaba, Tébessa et Guelma). Le ministre tunisien du Commerce et de l'Artisanat, qui a auparavant inauguré les travaux du forum a, dans son discours, rappelé les relations algéro-tunisiennes, qualifiées d'excellentes et empreintes de fraternité, abordé le volet économique en rapportant que les échanges entre les deux pays ont tendance à augmenter et qu'actuellement ils ont atteint le chiffre de 1 277 millions de dinars tunisiens avec plus d'une soixantaine d'entreprises tunisiennes intervenant en Algérie dans différents secteurs. «Il est temps de consolider les relations nos deux nations par un partenariat entre les entreprises algériennes et tunisiennes de façon à arriver à une complémentarité économique et une intégration qui nous permettra d'arriver ensemble à une croissance et un développement tels qu'on peut relever les défis futurs. La grande commission mixte algéro-tunisienne y travaille déjà depuis des années ; un accord préférentiel est effectif entre les deux pays frères et nous irons encore plus loin grâce à la volonté politique de nos présidents respectifs et de nos peuples qui n'aspirent qu'à s'unir.»M. Kheireddine Hammoum, consul d'Algérie, a, dans son allocution, rappelé les événements douloureux de Sakiet Sidi Youcef où des centaines d'innocentes victimes algériennes et tunisiennes ont payé de leur sang cette liberté dont nous jouissons aujourd'hui, avant d'aborder le thème de l'heure pour dire que le secteur choisi par les hommes d'affaires se prête bien à la conjoncture : « L'Algérie vous ouvre ses bras, vous êtes les bienvenus et nous vous disons qu'il y a de réelles opportunités de partenariat avec les entreprises dans le domaine du bâtiment et des travaux publics. L'Algérie est un grand chantier ouvert avec 1 million de logements dans le programme du président de la République Abdelaziz Bouteflika, auquel vous pouvez participer aux côtés des entreprises algériennes.» Les participants ont ensuite axé leurs interventions sur la nécessité d'uniformiser les lois sur l'investissement dans les deux pays, de façon que les entreprises puissent travailler dans les meilleures conditions, ce qui a été retenu parmi les recommandations transmises aux deux chefs d'Etat.Dans le courant de l'après-midi, le consul d'Algérie a reçu au consulat une délégation d'hommes d'affaires algériens autour d'un café, une occasion pour les uns et les autres de parler des opportunités de partenariat avec les Tunisiens en matière de commerce ou de réalisations communes sur la bande frontalière ou à l'intérieur du pays. Le consul, très courtois, écoutait et notait en promettant que leurs doléances seraient transmises à qui de droit. Sur place nous avons appris que le nombre de nationaux résidant dans la région du Kef est de 4 712, que 95 % de ces résidents en âge de voter se sont déplacés et ont accompli leur devoir électoral lors de la présidentielle algérienne de 2009. Nous avons également appris de la bouche d'un employé du consulat qu'à la fin du match Algérie-Côte d'Ivoire, des centaines de Tunisiens et d'Algériens s'étaient massés devant le consulat algérien pour exprimer leur soutien à l'équipe nationale algérienne. «Ce fut une véritable fête, la zorna avait fait fureur, on a dansé jusqu'à une heure avancée de la nuit, le drapeau algérien et celui tunisien étaient arborés fièrement par tous, on ne sentait plus de différence, on est frères pour toujours.» Cette manifestation de fraternité entre deux peuples qui ont pris possession de leurs couleurs nationales, effaçant ainsi les différences et les différends conjoncturels, montre qu'Algériens et Tunisiens, ces descendants de Carthage et de Numidie, ne peuvent qu'être frères.