Après avoir réglé des différends sur la lutte antiterroriste et le financement de la guerre en Irak, George W. Bush et le Congrès à majorité démocrate se concentrent désormais sur un plan d'aide aux victimes des crédits immobiliers à risque. C'est le dernier grand dossier qui pourrait faire l'objet d'un accord entre les deux parties avant les élections de novembre.Le président américain a brandi la menace d'un veto, mais les parlementaires démocrates et républicains soulignent qu'un texte sur le logement est une nécessité politique, et certains évoquent la possibilité d'un compromis cet été. D'abord, le texte envisagé contient des éléments que M. Bush demande depuis longtemps, comme la modernisation de l'Administration fédérale du logement (FHA) et la création d'une nouvelle autorité de régulation pour deux sociétés de crédit immobilier soutenues par l'Etat, Fannie Mae et Freddie Mac. Il y a ensuite une réalité politique pour le président: de nombreux républicains -des élus de son parti- voient leurs chances de réélection s'amenuiser sur fond de ralentissement de l'économie, et rechignent à s'opposer à une mesure s'attaquant au coeur du problème de la crise financière. Le sénateur Richard Shelby, le plus éminent républicain de la commission sénatoriale pour la banque, le logement et l'urbanisme, espère que M. Bush va reconsidérer sa menace de veto. Reste que la retenue avec laquelle la mise en garde présidentielle a été formulée ainsi que les négociations menées en coulisses par le secrétaire au Trésor Henry Paulson suggèrent que c'est peut-être ce que la Maison Blanche est justement en train de faire, selon des sources proches du dossier. Le sénateur démocrate Charles Schumer juge la menace de veto "étrange" car le texte reprend des dispositions réclamées par M. Bush. Les démocrates seraient ravis de pouvoir rejeter sur les républicains la responsabilité d'un échec sur le texte, ajoute-t-il. "Ce président est de plus en plus éloigné des réalités économiques du pays", critique M. Schumer. "Mettre un veto à ce texte au moment où le logement est au coeur de la crise économique, où les prix de l'immobilier sont en déclin, où les saisies (de maisons) augmentent, n'a absolument pas de sens." Le texte permettrait à la FHA de garantir 300 milliards de dollars (193 milliards d'euros) de nouveaux prêts pour que les propriétaires dans l'incapacité de rembourser leur crédit immobilier puissent obtenir un refinancement avec des emprunts moins onéreux et à taux fixe. Un vote-test important était prévu mardi, après quoi un vote définitif devrait intervenir peu après au Sénat. Une nouvelle phase de négociations devrait ensuite s'ouvrir pour surmonter des divergences avec la Chambre des représentants avec l'objectif d'envoyer le texte à la Maison Blanche en juillet. La crise de l'immobilier a piégé de nombreux emprunteurs qui avaient obtenu des crédits à risques (subprime) dont le taux variable a grimpé alors que le prix des logements a chuté. Lorsque les parlementaires rentrent dans leur circonscription "ils entendent parler de ce problème, pas simplement de la part de leurs électeurs, mais aussi des responsables des comtés, des maires, des leaders communautaires et du monde des affaires", souligne Josh Nasar, du Centre pour un crédit responsable. "Ils ne peuvent pas dire simplement, 'nous allons laisser le marché se corriger'. Ils briguent leur réélection." M. Bush, de son côté, ne se représentera pas devant les électeurs en novembre.Mais son compromis avec les démocrates sur la surveillance des terroristes et le financement de la guerre en Irak la semaine dernière montre qu'il est prêt à passer un accord sur des questions que les deux partis souhaitent neutraliser avant les élections. "Il n'y a pas vraiment de bonne volonté générale à collaborer. Il s'agit plus d'enlever de la table des choses qui mettent les deux camps mal à l'aise", commente John Fortier, analyste de l'Institut américain de l'entreprise, un centre de réflexion conservateur.