Le procès de Khalifa Bank, le plus grand scandale financier en Algérie, s'est poursuivi, hier, encore pour sa troisième audience. Cette dernière s'est ouverte avec la demande de la présidente du tribunal, Fatiha Brahimi, aux avocats de la défense de présenter une liste des témoins afin de tracer le programme de ce procès qui va durer plus de deux semaines. Elle appela, en premier lieu, à la barre, pour témoigner, Mlle Nadjia Aliouez, la secrétaire particulière de Abdelmoumen Khalifa, ainsi que Khalifa Aziz Mohamed Lakhder, le frère de l'accusé principal dans cette affaire. Dans le même cadre, on a appelé M. Hammoum Saïd Ali, de la trésorerie de la wilaya de Tipasa. Il faut dire que ces derniers n'ont pas répondu à la convocation du tribunal. La présidente exigea à cet effet de les faire venir dans les plus bref délais. En deuxième lieu, la présidente du tribunal appela M. Guellimi Djamel, inspecteur à Khalifa Airways, et également directeur général de la Chaîne de télévision Khalifa impliqué lui-aussi dans cette affaire, Mme Fatiha Brahimi l'a questionné sur la somme de 12,5 milliard s de dinars que Khalifa Bank a déboursé pour l'importation de boissons alcoolisées de France et cela avec son registre de commerce. M. Guellimi a indiqué qu'"il voulait rendre service à son ami Abdelmoumen en lui confiant son registre du commerce en agroalimentaire et qu'il ne sait rien sur la destination de cette somme". Concernant les activités au sein de Khalifa Bank, l'accusé Guellimi répond qu'"il n'avait aucune activité à Khalifa Bank", ce qui contredit Mlle Nadjia Aliouez qui a affirmé que "M. Guellimi avait un bureau très luxueux au siège Khalifa Bank, dans lequel il recevait les personnalités telles que M. Keramane auquel il a rendu service pour le recrutement de sa fille Yasmine Keramane". M. Guellimi répliqua à cet effet qu' "il n'a jamais eu de bureau à Khalifa Bank et qu'il n'a jamais reçu M. Keramane". Pour rappel, Djamel Guellimi, âgé de 42 ans, était jusqu'à 2003 le clerc du notaire Omar Rahal, chez qui presque tous les documents de "l'affaire Khalifa" ont été notifiés.Il était également un ami d'enfance de Rafik Abdelmoumen Khelifa, le principal accusé de l'affaire jugé par contumace. Interrogé par la présidente de l'audience, mardi dernier, Djamel Guellimi a raconté avoir été contacté en 1997 par Rafik Khelifa pour proposer à son père, Amar, d'être son associé dans la banque qu'il avait l'intention de créer. Le père, ancien directeur de l'Institut des techniques de la finance et de la comptabilité (ITFC) de Ben Aknoun, à Alger, a accepté la proposition de Rafik Khelifa, entrant de ce fait comme associé et membre fondateur de Khalifa Bank, pour occuper le poste de premier vice-président, chargé du personnel et de la formation. Quant à Djamel, après avoir quitté volontairement le cabinet de notariat de Rahal, et dirigé quelques années une pharmacie, il rejoint, comme "inspecteur" à Paris, une autre filiale du groupe Khalifa, la compagnie aérienne Khalifa Airways, fondée à la fin 2002. La juge a cependant indiqué à l'accusé que l'assistante personnelle de Rafik Khelifa, avait témoigné devant le juge d'instruction que Djamel Guellimi était en fait "le chef de cabinet du groupe Khalifa" et "celui qui recevait les personnalités". L'accusé a réfuté ces affirmations, disant seulement avoir été responsable de Khalifa Airways à Paris, puis PDG de K-TV. Ce qui a poussé la juge à s'interroger comment "un homme sans qualifications (3e année secondaire), sans expérience dans le domaine de l'information, pouvait être amené à diriger une chaîne de télévision". "C'est Rafik qui m'a demandé de l'aider", a-t-il répondu, indiquant que son patron, qui avait chargé un homme d'affaire libanais (de nationalité française, NDLR), Ragheb El-Chammagh, de "monter une télévision, basée à Paris", lui a demandé de s'en occuper "durant trois ou quatre mois". "On peut dire que vous étiez finalement l'homme de confiance de Khalifa", a demandé la juge à l'accusé. "Oui", a-t-il simplement répondu. Le représentant du ministère public est revenu sur le témoignage de l'assistante de Rafik Khelifa. "Elle a dit que c'est vous qui receviez les personnalités dans le bureau même de Rafik Khelifa, le PDG de la banque", a dit le procureur, demandant à l'accusé de lui citer les noms de ces personnalités. Djamel Guellimi a d'abord nié, avouant seulement "connaître Abdennour Keramane", ancien ministre et frère d'Abdelouahab Keramane, qui était au moment des faits, gouverneur de la Banque d'Algérie. Il a ensuite déclaré avoir rencontré le frère de Boudjerra Soltani (ministre alors du Travail et de la Sécurité sociale) "qui est venu à Paris chercher du travail, mais il ne parlait pas bien français". Le procureur est revenu à la charge, avançant d'autres noms cités, devant le juge d'instruction, par l'assistante de Rafik Khelifa et reçus par Djamel Guellimi : "Les chanteurs Abdou Deriassa et Cheb Mami venaient souvent au bureau de Khelifa à la banque. Amel Wahbi, elle, a reçu de l'argent, mais je ne sais pas pour quel motif". "Je me souviens que j'ai vu le P-DG d'Air Algérie, Tayeb Bennouis, dans la villa de Khalifa, mais je ne lui ai jamais parlé", a dit Djamel Guellimi qui est accusé de "constitution d'une bande de malfaiteurs, vol, abus de confiance et faux et usage de faux". Pour ce qui est de la séance d'hier, Yasmine Keramane a été citée comme étant fortement impliquée dans cette affaire. La présidente de l'audience précisa à ce sujet de Yasmine Keramane, qui devait ouvrir un bureau à Milan pour la ligne Alger-Milan, une ligne qui n'a jamais existé, que Yasmine qui n'a aucune compétence dans ce domaine a reçu la somme de 1 million de francs francais. De son côté, M. Rahal Omar, le notaire qui a rédigé un contrat constitutif de la banque Khalifa a été également appelé à témoigner dans l'audience d'hier. M. Rahal est accusé de falsification de l'acte constitutif de la banque Khalifa vu qu'il n'était pas présent lors de la signature dudit acte par les 6 membres de la famille Khalifa et que M. c'est Guellimi qui a tenu à lire le texte. Par ailleurs, M. Sidi Said Abdelmadid, secrétaire général de l'UGTA, a fait son apparition en compagnie de son avocat vers les 11h. Il a déclaré à la presse en marge de cette audience qu' "il a répondu à la convocation de la justice comme citoyen, et qu'il est fier d'être ici". Il ajoute également qu'"un syndicaliste est un citoyen avant tout et qu'il doit assumer ses responsabilités ". Au sujet de son absence lors de l'ouverture du procès lundi dernier Sidi Said répond qu'"il avait des obligations tellesque l'application de la nouvelle grille des salaires et que pour cette raison, j'ai dû reporter mon témoignage".