Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) Luis Moreno-Ocampo devait demander hier l'inculpation du président soudanais Omar el-Béchir pour des crimes contre des civils commis ces cinq dernières années au Darfour (ouest du Soudan), selon des sources concordantes. M. Moreno-Ocampo a annoncé jeudi qu'il allait présenter hier de nouvelles "preuves" de crimes commis dans cette région ravagée depuis 2003 par une guerre civile et "nommer" ceux qui en sont responsables. Le lendemain, citant des sources onusiennes et judiciaires, des journaux du monde entier rapportaient qu'il avait dans le collimateur le président soudanais Omar el-Béchir, ce qu'a ensuite confirmé le département d'Etat américain.Selon le journal Le Monde, le procureur va demander dans la requête qu'il doit remettre lundi aux juges de valider ses accusations de crimes de guerre, crimes contre l'humanité et génocide, et d'émettre un mandat d'arrêt à l'encontre d'el-Béchir.Leur décision, basée sur la solidité des preuves apportées par M. Moreno-Ocampo, devrait prendre plusieurs mois. Le gouvernement soudanais s'est réuni d'urgence dimanche pour préparer la riposte. Samedi, il avait annoncé avoir demandé la tenue d'une réunion extraordinaire de la Ligue arabe à ce sujet.Son ministre des Affaires étrangères a averti que toute mesure de la CPI contre M. Béchir pouvait "détruire le processus de paix" au Darfour. Après avoir convoqué la procureur adjointe de la CPI vendredi, l'Union africaine a "mis en garde" la CPI, alors que les rebelles du Darfour la félicitaient au contraire. La CPI a déjà émis deux mandats d'arrêt contre des Soudanais impliqués dans le conflit, mais Omar el-Béchir a toujours refusé de les remettre à la Cour. Le secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-Moon se déclare très préoccupé par une éventuelle inculpation du président soudanais, dans un entretien publié lundi par Le Figaro. "Cela aurait des répercussions négatives très sérieuses sur l'opération de maintien de la paix, y compris le processus politique. Cela me préoccupe beaucoup, mais personne n'est exempt du processus judicaire", dit-il. "Le processus politique ne peut être durable sans respect du droit", ajoute-t-il. Craignant le désordre, l'ONU a relevé le niveau d'alerte pour son personnel travaillant au Darfour, notamment au sein de la force mixte ONU-Union africaine (Minuad) chargée du maintien de la paix. Depuis 2003, les affrontements entre forces gouvernementales et mouvements rebelles du Darfour ont fait jusqu'à 300.000 morts et déplacé 2,2 millions de personnes, selon l'ONU. Khartoum parle de quelque 10.000 morts.