ar Hiba Serine A.K CYCLE DE DOHA. Les négociations à l'Organisation mondiale du commerce ont entamé leur 2e semaine à Genève. Les Etats membres ont étalé leurs différends, mais continué à discuter. Ils y sont presque aussi serrés que dans une boîte de sardines. Et que, faute de coussin, leur fessier souffre sur des chaises trop dures, raconte l'un d'entre eux. Car tout est fait dans le presque mythique Salon vert ("Green room") de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) pour rendre inconfortable la position des négociateurs, et les faire aboutir à un accord le plus vite possible. Réunis depuis plus d'une semaine à Genève, les représentants des 153 Etats membres font pour l'instant durer le plaisir. Lundi, les déclarations des uns et des autres, du nord au sud, ont fait croire qu'un accord était loin d'être acquis. Une première réunion, à sept (Etats-Unis, Union européenne, Australie, Japon, Brésil, Chine et Inde), a eu lieu à midi. C'est de ce groupe restreint qu'était né vendredi un "paquet" qui avait fait souffler un vent d'espoir sur le Cycle de Doha. Depuis, la pétole s'est installée, avant qu'un vent contraire ne se lève. La réunion dite du G7 a été suspendue vers 17h; elle devait reprendre en début de soirée avant de laisser place à une nouvelle séance, à 30 ministres cette fois, dans le Green room. Elle pourrait durer toute la nuit, raconte un observateur. Car il va falloir du temps pour trouver un accord si on en juge par les déclarations d'avant hier. "Nous sommes très préoccupés par l'orientation qu'ont prise deux pays", a indiqué la représentante américaine au Commerce Susan Schwab. Ces deux pays sont la Chine et l'Inde. Pékin serait revenu sur ses engagements et protégerait sa production de riz, de coton et de sucre, mécontentant de nombreux pays en développement. Son motif? Les Etats-Unis ne réduisent pas assez leurs subventions. L'Inde, pour sa part, a rappelé qu'il ne souscrivait pas au consensus trouvé par les six autres vendredi. La France, qui préside aussi l'UE, a annoncé qu'elle ne signerait pas "en l'état" le projet de l'OMC. Le président Sarkozy a même demandé au négociateur européen de venir à Paris pour faire le point. Peter Mandelson a répondu qu'il s'y rendrait "avec plaisir", mais qu'il serait "étrange" qu'il parte au milieu des négociations. Il viendra donc après. Menace de référendum L'Italie et le Portugal se sont encore opposés aux propositions de la Commission européenne. Le Japon, enfin, s'est manifesté pour obtenir davantage en faveur de ses produits "sensibles". En Suisse, des critiques sont venues du monde agricole. Les maraîchers ont menacé de lancer un référendum si l'accord ouvre la voie à des "importations incontrôlées". Ce mécontentement généralisé pourrait aussi être un signe que tous les négociateurs sont en train de faire des concessions, et que les choses avancent. Ce mardi, le marathon de la négociation a repris, du G7 au Salon vert. Il pourrait continuer jusqu'à aujourd'hui. Neuf pays de l'UE parmi les plus opposés aux propositions de Pascal Lamy, dont la France, l'Italie et le Portugal, se sont réunis avant hier soir pour établir une position commune, selon des sources italiennes. La "guerre de la banane" pourrait bloquer les discussions Les pays africains s'opposent à un accord concernant le commerce du fruit exotique. Lundi, les pays du groupe Afrique-Caraïbes-Pacifique (ACP) se sont fâchés après les pays latino-américains et européens au sujet des importations de bananes. "Il y a eu un incident pendant la réunion du comité des négociations commerciales", qui réunit les 153 pays membres de l'Organisation mondiale du commerce, a rapporté un diplomate qui a requis l'anonymat. Dans son intervention, un diplomate équatorien s'est félicité de l'accord obtenu durant le week-end avec l'UE sur une baisse du droit de douane qui frappe les importations de bananes latino-américaines dans l'UE. Il a ajouté que son vice-ministre était dès lors rentré à Quito. Les pays ACP, dont les bananes entrent sans droit de douane dans l'UE, en ont conclu que la négociation était terminée et qu'ils n'étaient plus en mesure de peser sur le dossier, selon la source proche des négociations. "Les ACP ont quitté la salle pour protester contre l'attitude de l'UE qui les a menés en bateau en affirmant vouloir continuer à négocier avec eux", a-t-on ajouté de même source. Calendrier inacceptable Les pays latino-américains n'entendent pas renégocier l'accord sur la banane conclu avec l'Union européenne même si certains pays ACP y sont hostiles, a indiqué lundi dernier le ministre costaricien du Commerce extérieur, Marco Vinicio Ruiz. L'Union européenne et l'Amérique latine se sont mis d'accord à l'OMC sur la fin de la "guerre de la banane" qui les oppose depuis vingt-cinq ans. Cet accord, qui prévoit de ramener progressivement d'ici à 2016 le droit de douane européen à 114 euros par tonne contre 176 actuellement, n'a pas été formellement signé. Les ACP jugent ce calendrier inacceptable, estimant qu'il ne leur permet pas d'adapter leur production face à la concurrence des Latino-Américains. Ils ont présenté dimanche soir une contre-proposition qui porterait à 109euros, mais en 2017, le droit de douane européen, avec une montée en charge plus lente. Ils ont menacé de bloquer l'ensemble des négociations qui se tiennent depuis une semaine à Genève sur la libéralisation du commerce mondial s'ils n'obtiennent pas satisfaction.