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Des témoignages qui accablent Abdelouahab Keramane
Le procès Khalifa entame sa 3e semaine
Publié dans Le Maghreb le 23 - 01 - 2007


La procès du siècle a repris, hier, entamant sa troisième semaine, et levant le voile peu à peu sur tous les artifices auxquels ont eu recours les responsables d'El-Khalifa Bank pour maquiller la saignée de la caisse principale de la banque. C'est ainsi que la présidente de l'audience, Mme Brahimi Fatiha, a repris, hier, l'interrogatoire de Moncef Badsi le liquidateur d'El-Khalifa Bank. Celui-ci parlera en premier lieu de la villa de Cannes appartenant à Rafik Khalifa, en précisant qu'il l'a achetée pour le prix de 35 millions d'euros, mais à la veille de la liquidation de la banque Abdelmoumène a tenté de vendre cette villa pour quelque 16 millions d'euros. Il faut dire que cette villa a fait l'objet de beaucoup d'intérêt. La présidente interrogera le témoin sur son avis sur la manière dont l'argent a été sorti de la caisse principale. M. Badsi indiquera que “cela est irrégulier, totalement irrégulier”. M. Badsi ajoutera, à cet effet, que “les gens qui ont contribué d'une manière ou d'une autre au retrait des fonds de la caisse principale n'ont respecté ni la loi, ni la réglementation et les procédures concernant les crédits ou autres”. Le liquidateur de la banque Khalifa précisera qu'au début de la liquidation de celle-ci en mars 2003, le montant du déficit était de 92 milliard de dinars, et actuellement il est à 33 milliards de dinars". Il ajoute qu'"il y a des cas où on a trouvé des justificatifs et d'autres pas". Mme Brahimi lui demanda s'ils a trouvé des choses suspectes lors de la liquidation, M. Badsi répond "oui, on a trouvé des terrains qui ont fait l'objet de promesses de vente, chose qui n'a pas été faite". Elle continue d'interroger le témoin : "Est-ce que les fonds qui devaient financer les unités de dessalement, dont le montant est de 35 millions d'euros sont sorti du territoire national ?". Et au témoin de rétorquer : "oui, sans aucun doute". De son côté, le procureur général demanda au liquidateur quelles étaient ses remarques sur la direction de la comptabilité ? Il dira que "la comptabilité ne peut être régulière si les transferts de fonds n'ont pas de justificatifs". Après le témoignage du liquidateur, c'était au tour de M. Khamoudj Mohamed, membre de la commission d'inspection et directeur général de l'inspection générale au sein de la Banque d'Algérie de passer à la barre pour dévoiler ce qu'il savait sur la banque Khalifa. Il dira qu'"il a commencé le travail dans ce poste en 1997, et qu'il était chargé de superviser le travail de la banque". Il ajoute également que leur travail a " commencé sous les instructions verbales du gouverneur général de la Banque d'Algérie, à l'époque M. Keramane Abdelouaheb, qui leur a demandé de faire une évaluation des risques de la banque Khalifa, autrement je n'étais pas autorisé de le faire". M. Khamoudj souligne, à cet effet, que "le premier contrôle a commencé en mars 1999, cela veut dire une année après la création de la banque Khalifa, on a établi un rapport dans lequel on a signalé le changement de dirigeants, ainsi que la structure d'entreprenariat (le changement qui eu lieu quelques mois seulement après la création de la banque sur lequel les actionnaires n'étaient pas au courant), on a remarqué également que la création de la banque n'a pas été faite dans les normes". Le directeur général de l'inspection général de la Banque d'Algérie précise qu'"après ce rapport, les responsables du groupe Khalifa ont promis de prendre en charge toutes les remarques". Sur ce, la présidente demande au témoin si ces garanties verbales devaient suffire au gouverneur de la Banque d'Algérie. M. Khamoudj dira que "M. Keramane leur a donné un délai afin de remédier à toutes ces insuffisances". Mme Brahimi précisa à cet effet que l'on ne peut appeler toutes ces infractions par des insuffisances, puisque il s'agit d'une entorse à la loi régissant les changements de statuts et des dirigeants dans une entreprise. Sur ce l'inspecteur répond qu'"il y avait carrément un non respect de la législation". L'inspecteur général indiquera qu'au cours de la première inspection effectuée en 1999, le groupe Khalifa n'avait mandaté qu'un seul commissaire aux comptes, alors que la loi exige le mandatement de deux. Il dira néanmoins que les dirigeants de la banque ont remédié à cela en 2000, mais cela n'a pas empêché la situation de s'empirer. Le témoin évoquera les 10 inspections qui ont été effectuées entre 1999 et 2003 et dont 7 ont été ordonnées par Abdelouahab Keramane, alors gouverneur de la Banque d'Algérie. Il dira qu'après 1999, une deuxième inspection a été effectuée, en janvier 2000, et dont le rapport a été remis à Keramane au mois de mars de la même année. Sur ce, Keramane a convoqué Abdelmoumen Khalifa dans son bureau pour clarifier la situation et remédier aux irrégularités constatées. Et au procureur général de s'interroger sur le champ d'intervention de la direction générale de l'inspection générale. Le témoin rétorqua que le leur se limite à effectuer des inspections et à remettre les rapports au gouverneur de la Banque d'Algérie et c'est à lui qu'incombe le rôle de prendre les mesures nécessaires. Le témoin ajoutera qu'ils ont effectué une 3e inspection en juin 2000 pour constater que les choses n'évoluaient pas, mais bien au contraire, elles empiraient. Les transgressions à la règlementation augmentaient et la comptabilité n'était pas du tout crédible. Aussi, la banque ne possédait pas de foncier et louait tout les biens immobiliers pour la création de son réseau d'agences. Une 4e inspection a été effectuée dans le but d'évaluer la participation de tous les banques et c'est là qu'on s'est rendu compte que Khalifa Bank n'avait pas de participations à la Banque centrale, ni des actions dans d'autres sociétés. En décembre 2000, une 5e inspection a été effectuée suite au dépôt de requêtes par des particuliers avant que Keramane ne demande d'effectuer une 6e et une 7e inspection. Néanmoins, les choses vont prendre un nouveau tournant avec la nomination de M. Mohamed Laksaci à la tête de la Banque d'Algérie. Celui-ci ordonnera une 8e inspection en décembre 2002 et sur ce la Banque d'Algérie décide de geler toutes les opérations de commerce extérieur au sein de la banque avant d'ordonner une 9e et une 10e inspection lesquelles ont démontré la confusion dans la gestion de la banque. Une gestion qui ne correspondait à aucune norme, puisque aucune assemblée générale n'a été tenue depuis la création de la banque et les inspecteurs ont mis à jour le fait que des crédits ont été alloués avec des sommes inimaginables pouvant même atteindre les 93 milliards de centimes. Laksaci avertira alors le ministère des Finances sur quoi, les collaborateurs de Khalifa ont été arrêtés à l'aéroport d'Alger tentant de faire sortir 2 millions d'euros à l'étranger dans des valises. La juge remarquera tout de même que malgré les contrôles, l'argent sortait quand même des caisses.

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