Encore privé de son secrétaire au Trésor, le nouveau président américain Barack Obama a confirmé son intention d'agir vite sur le front économique, alors que la crise semble s'aggraver et que plusieurs grandes banques du pays vacillent au bord de l'abîme. Choisi par M. Obama pour succéder à Henry Paulson à la tête du Trésor, Timothy Geithner a vu son processus de confirmation par le Sénat ralenti après des révélations sur ses revenus non déclarés au fisc il y a quelques années, une situation qu'il a depuis régularisée. Estimant que la situation économique dramatique du pays imposait de ne pas retarder davantage sa nomination, la commission sénatoriale chargée d'évaluer M. Geithner l'a blanchi jeudi, et sa nomination doit être mise aux voix lundi. M. Obama, qui a demandé à ses conseillers économiques de lui rendre compte chaque jour de la situation, a réuni vendredi les dirigeants républicains et démocrates du Congrès pour les exhorter à adopter rapidement son plan de relance. Le président américain Barack Obama a déclaré samedi qu'il espérait promulguer son vaste plan de relance de l'économie de 825 milliards de dollars en moins d'un mois, tout en se disant confiant que le pays sortira de la crise actuelle plus prospère. Lire la suite l'article "Je suis heureux d'annoncer que les deux partis du Congrès travaillent déjà activement sur ce plan, et j'espère le promulguer d'ici moins d'un mois", a déclaré M. Obama lors de sa première intervention radio hebdomadaire en tant que président. Il devait s'entretenir dans la journée avec son équipe économique sur les priorités budgétaires du nouveau gouvernement. A la radio, le président a prévenu que les problèmes économiques n'allaient pas se résoudre en peu de temps. Mais s'est dit confiant qu'une action audacieuse aidera le pays à se remettre sur pied. "Si nous agissons en tant que citoyens, et non en tant que partisans, et recommençons le travail de refaire l'Amérique, alors j'ai confiance que nous sortirons de cette période éprouvante plus forts et plus prospères que nous ne l'étions avant", a assuré le président. Barack Obama a prévenu que si rien n'était fait, le chômage pourrait atteindre un nombre à deux chiffres. Il a affirmé que son plan de relance, qui vise à stimuler de vastes secteurs de l'économie tout en créant de trois à quatre millions d'emplois, allait revitaliser l'économie. Il s'agit "d'investir dans nos toutes premières priorités comme l'énergie et l'éducation, la santé et de nouvelles infrastructures qui sont nécessaires pour que nous restions forts et compétitifs au XXIe siècle", a-t-il souligné. Le projet intitulé Plan américain de reprise et de réinvestissement entend doubler la production d'énergie "verte" (vent, solaire et bio-carburants) en trois ans. Il prévoit la construction d'un nouveau réseau d'électricité, incluant la pose de plus de 3.000 miles (environ 5.000 km) de ligne de transmission. M. Obama propose également d'informatiser les dossiers médicaux d'ici cinq ans, de rénover et moderniser 10.000 écoles et de remettre à neuf l'infrastructure du pays. Des millions d'Américains devraient également avoir accès à l'internet à haut débit. Les républicains ont présenté un contre-projet, jugeant que la facture était trop lourde, au moment où le Bureau du budget du Congrès (CBO) pronostique un déficit budgétaire gigantesque. Le CBO a par ailleurs estimé dans la semaine que la moitié seulement des dépenses prévues seraient effectivement engagées en 2009 et 2010, et plutôt la seconde année. Pour Alec Phillips, économiste de Goldman Sachs, toute la question est de savoir si l'argent arrivera "suffisamment tôt". Or tout le monde convient que l'économie américaine a besoin d'une injection rapide de liquidités. Malmenées en Bourse pendant la semaine, les banques américaines sont apparues encore extrêmement fragilisées malgré les quelque 230 milliards de dollars injectés par l'Etat depuis l'automne. Alors que le débat a été relancé sur la façon de régler une fois pour toutes la question des actifs invendables accumulés lors de la dernière bulle immobilière, l'économiste Nouriel Roubini, l'un des premiers à avoir prédit la crise, a estimé que celle-ci coûterait 3.600 milliards de dollars aux banques de la planète. La moitié de cette facture reviendra aux seules banques américaines, qu'il juge à la "limite de l'insolvabilité". Après des informations de presse affirmant que le gouvernement envisagerait la création d'une structure publique de défaisance chargée de délester les banques de ces actifs, le financier George Soros écrit vendredi dans le Financial Times que cela "maintiendrait en vie artificiellement les banques à un prix considérable pour le contribuable". Et ceci, "sans les mettre en état de prêter à des taux concurrentiels". Selon M. Soros, le gouvernement Obama fait face à un choix cornélien entre "nationaliser partiellement les banques ou les laisser aux mains du privé mais en nationalisant leurs actifs empoisonnés". Alors que le marché "demande une décision rapide", M. Soros conseille au gouvernement de ne rien annoncer tant qu'aucune décision n'a été prise, et ensuite de s'en tenir à ce qui a été annoncé, à l'inverse de ce qu'avait fait M. Paulson. C'est la position adoptée par M. Geithner. Devant le Sénat, il a dit espérer revenir rapidement devant le Congrès avec "un plan complet" pour les banques. Ce plan est actuellement examiné par le Congrès et M. Obama a rencontré vendredi les responsables parlementaires démocrates et républicains. Mais les Républicains mettent en avant qu'il pourrait aggraver sérieusement le déficit budgétaire, qui, selon l'Office du budget du Congrès, devrait atteindre 1.100 milliards de dollars en 2009. M. Obama s'est efforcé de rassurer les sceptiques. "Nous lancerons un effort sans précédent pour traquer les gaspillages, l'inefficacité et les dépenses superflues (...) et chaque Américain pourra voir comment et où nous avons dépensé les dollars des contribuables en allant sur un site internet appelé recovery.gov (reprise)", a-t-il dit. R.I.