Véritable test pour l'administration Obama, un tribunal californien a examiné aujourd'hui à la demande de réouverture d'une plainte déposée au nom de victimes du programme de détention secrète de la CIA. La plainte, déposée deux ans auparavant au nom de cinq hommes, avait été rejetée l'année dernière, après que l'administration Bush eut invoqué le secret d'Etat. Selon les avocats de la puissante Association américaine de défense des libertés civiles (ACLU) les cinq hommes ont été "enlevés et transférés en secret dans des prisons dirigées par des agences de renseignement américaines ou étrangères en dehors des Etats-Unis, où ils ont été interrogés sous la torture". La plainte visait expressément une filiale de Boeing, Jeppesen Dataplan, accusée d'avoir permis à la CIA, en toute connaissance de cause, d'effectuer des vols pour transférer ces hommes dans le cadre de son programme de détention secrète. Les accusations qui étaient au coeur de la plainte, et selon lesquelles l'armée américaine et/ou la CIA menaient des opérations secrètes contre des étrangers en dehors des Etats-Unis, relevaient "clairement du secret d'Etat", avait expliqué le juge en rejetant la plainte, selon des documents de justice. "Cette affaire représente le premier test de l'engagement de transparence de l'administration Obama et de sa volonté d'agir (en conformité avec) sa condamnation de la torture et du programme secret" de la CIA, a déclaré Ben Wizner, un avocat de l'ACLU, qui plaidera lundi au nom des plaignants. "L'administration (Obama) doit rejeter sans équivoque l'usage abusif du secret d'Etat pratiqué par l'administration Bush, et permettre à ce dossier d'avancer", a poursuivi l'avocat dans un communiqué. M. Obama a signé au deuxième jour de sa présidence un décret rejetant l'usage de la torture par les Etats-Unis et a promis à de nombreuses reprises, avant et depuis son entrée en fonctions, que le gouvernement serait transparent et rendrait compte de ses actes. "Le président Obama a été ferme dans sa dénonciation de la torture et dans son engagement concernant la transparence du gouvernement. Ce que nous allons voir lundi, ou avant, c'est si cette rhétorique se traduit par des actes", a insisté Ben Wizner jeudi lors d'une conférence de presse téléphonique. Cette affaire "va au-delà" du cas des cinq hommes "torturés sur des sites secrets de la CIA ou dans des prisons étrangères", car "pas une seule victime de torture n'a pu se faire entendre devant les tribunaux aux Etats-Unis", a souligné l'avocat. L'ACLU a demandé à la nouvelle administration de faire en sorte que l'audience de lundi soit reportée, afin que le nouveau ministre de la Justice, Eric Holder, ait le temps de passer le dossier en revue mais elle n'avait pas reçu d'indication en ce sens vendredi soir. Le directeur désigné de la CIA, Leon Panetta, a assuré jeudi qu'il comptait rompre avec les pratiques controversées de l'agence de renseignement sous l'ère Bush, lors d'une audition au Congrès. "Selon les termes du décret publié par le président, il est interdit d'envoyer quelqu'un à l'étranger pour y être torturé ou dans un pays qui viole nos valeurs humaines", a-t-il notamment fait valoir, en assurant que l'agence de renseignement américaine n'aurait plus recours à cette pratique. M.L.