Leïla Sebbar, l'écrivaine franco-algérienne d'expression française vient de parapher, " Mon cher fils", un roman déchirant sur les relations familiales notamment, les relations pères- fils, dans une communauté où il n'est pas toujours facile d'aller vers l'autre, de lui tenir la main, n'était-ce son propre rejeton. Le livre est fraîchement sorti aux éditions tunisiennes, ELyzad et distribué par les réseaux France Pollen. Le roman explore les thèmes si chersà la romancière qui fouine dans la tradition et l'héritage culturel d'un noyau social qu'est la famille pour comprendre les mécanismes d'une société qui " avance à reculant". " Mon cher fils " est l'entête d'une lettre qu'on adresse à son fils. Il s'agit bien de cela dans ce livre qui raconte le récit d'un vieil homme, ouvrier chez Renault qui revient vivre à Alger après trente ans passés dans l'usine-forteresse de Boulogne-Billancourt, l'île Seguin. Il vit seul, dans une petite maison aux volets verts, face à la mer. Il a eu sept filles et un fils dont il est sans nouvelles depuis longtemps et à qui il n'a jamais réussi à parler. Avec la complicité de la jeune Alma, écrivaine publique à la Grande Poste, il lui écrit, il tente de lui écrire. " Un roman sur les silences de l'histoire, du roman familial dans l'exil, le silence qui sépare un père de son fils ". dans les pages 38-39, Leïla Sebbar écrit : " Alma écoute le vieil homme. S'il n'écrit pas à son fils, elle ne le verra plus. Elle dit "On écrit?" "Ecrivez ce que vous voulez après 'Mon cher fils', oui, écrivez, j'enverrai les lettres comme d'habitude ". Elle écrit. Il ne lui demande pas ce qu'elle écrit. Il dit "Vous savez les tirailleurs... Je peux vous parler? Cette histoire de tirailleurs, ça ne vous ennuie pas? Vous êtes jeune, les jeunes... Enfin, je dis "les jeunes" mais je ne les connais pas, jamais je n'ai parlé à mes enfants, pourquoi ? Je ne sais pas. Peut-être parce qu'ils ne m'auraient pas écouté, des vieilles histoires pour les vieux, même la guerre d'Algérie, j'ai rien dit, pourtant... non, je ne veux pas parler de cette guerre, une autre fois. C'est comme l'arabe, ils n'en veulent pas, ma fille aînée, celle qui est née au pays, la seule qui parle la langue des ancêtres, avec sa mère, avec moi non, pourquoi ? Le lecteur retrouve le thème incontournable du père souvent désabusé par le poids de l'exil, de la solitude et du manque de communication envers ces pairs. Un problème redondant dans nos cultures, qui est aussi à l'origine de beaucoup de solitude et d'incompréhension. Leïla Sebbar écrit ici une véritable ode aux immigrés dépassés par la situation dans laquelle ils ont mis leur famille. "Les récits savamment entrecroisés s'éclairent et se répandent dans la dramatique unité de l'écrasement des personnes et de l'inutilité de leurs paroles. Surgit alors de ce discours maîtrisé, la violence extrême, en un ultime coup d'épée donné par cette écriture tranchante qui laisse le lecteur médusé devant un agencement si efficace sous une apparente simplicité", analyse le critique littéraire Dominique Renaivoson. Leïla Sebbar est née en Algérie d'un père algérien et d'une mère française. Elle vit à Paris. Elle a publié des essais, des romans, des nouvelles et a dirigé des recueils collectifs. Ses derniers titres parus : " Les femmes au bain ", " L'arabe comme un chant secret ", " Voyages en Algéries autour de ma chambre ", abécédaire (texte et images), " Bleu autour ". " L'habit vert ", " Le ravin de la femme sauvage ", " Thierry Magnier ". " Le peintre et son modèle ", " Al Manar-Alain Gorius ". "Ma mère ", des écrivains du Maghreb racontent leur mère (collectif dirigé par Leïla Sebbar), " Chèvre-feuille étoilée ". Par Rebouh H