Dans le cadre de la série de tables rondes que l'Assemblée des Nations unies tient depuis vendredi sur le thème «la crise économique et financière mondiale et son impact sur le développement», le président de la commission d'experts de l'Assemblée générale sur la réforme du système monétaire et financier international, Joseph Stiglitz, a estimé qu'une facilité de crédits plus démocratique et plus représentative, d'un nouveau système mondial de réserves moins imprévisible qu'un système à monnaie unique et un conseil mondial de coordination des politiques économiques, figurent parmi les solutions «incontournables» à la crise économique et financière qui secoue le monde actuellement. En effet, la commission a proposé 20 recommandations. Précisant qu'il s'agit de la première crise généralisée de la mondialisation et d'une rupture historique, Stiglitz et trois autres membres de la commission d'experts ont souligné qu'il était absolument nécessaire de transformer, de manière radicale, les bases de l'économie mondiale. Ce qui distingue la commission des autres instances qui mènent des discussions similaires, ont-ils dit, c'est qu'elle a mis l'accent à la fois sur les besoins des pauvres du Sud et ceux du Nord. En outre, le défi est de préserver les acquis dans la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) ; dans cette optique, les experts ont recommandé une nouvelle gamme de mécanismes de décaissement de fonds, dont la facilité de crédits qui laisserait aux pays en développement, contrairement à ce qui a été fait lors des crises de 1997 et 1998, une plus grande liberté pour élaborer des mesures anticycliques. Par ailleurs, le G-8 et le G-20, s'étant montrés incapables de corriger les défaillances des cadres économique et réglementaire, les experts ont proposé la mise en place d'institutions dotées de la légitimité politique et réelle de tous les habitants de la planète, soit un «New Deal mondial» ou un G-192 travaillant sous les auspices des Nations unies. Dans ce cadre, les experts de cette commission ont défendu l'idée de constituer un conseil mondial de coordination des politiques économiques, plus inclusif que le G-20, mais assez réduit pour ne pas compromettre le processus de prise de décisions. Outre cela, et dans le même sens, Joseph Stiglitz a expliqué, d'emblée, que l'une des raisons qui a permis le consensus au sein de la commission est que tous ses membres se sont engagés à apporter une réponse à la crise qui permette une relance plus rapide et prévienne la résurgence de telles situations. De nombreuses instances traitent de ces questions, mais ce qui distingue la commission des autres est que, dès le départ, ses membres ont convenu de s'attacher à l'impact de la crise sur les pays pauvres parmi les pays en développement et les pays développés. Commençant la présentation de ses recommandations par une évaluation de la situation actuelle, le président de la commission d'experts a attiré l'attention sur un problème négligé, qui est l'augmentation du taux de chômage. Il pourrait toucher 50 millions de personnes si les choses s'aggravent, a-t-il prévenu. Cette situation serait catastrophique pour les pays pauvres, étant donné la faiblesse des mécanismes de protection sociale. Dans les pays en développement, quelque 200 millions de personnes pourraient devenir des travailleurs pauvres. Les pays du Nord ne sont pas épargnés ; les ménages risquent de perdre des choses aussi essentielles que leur logement ou leur accès à la santé. La crise, a insisté le président de la commission d'experts, a montré l'échec du monde à mettre en place un système économique stable qui garantisse suffisamment de protection pour ceux qui en ont besoin. Les problèmes ne vont pas être réglés du jour au lendemain, mais il est impératif que l'on s'y attelle maintenant, a-t-il insisté. La deuxième question sur laquelle le président de la commission d'experts a attiré l'attention est celle de la création d'un conseil mondial de coordination des politiques économiques, qui serait une bonne alternative au G-20 car, a-t-il expliqué, jusqu'ici la politique économique mondiale n'a pas réussi à assurer la stabilité financière. En la matière, on devrait s'inspirer du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) et commencer par mettre en place un organisme qui serait chargé d'identifier et d'évaluer les lacunes du système actuel. S'agissant de l'Afrique, les experts estiment qu'elle risque de reculer de 10 ans, avec une chute du taux de croissance à 3%, après avoir oscillé entre 5 et 10%. Ces prévisions sont d'autant plus alarmantes que les pôles de croissance régionaux comme l'Egypte, l'Afrique du Sud, l'Algérie et le Nigeria ont été plus durement touchés que la moyenne des pays africains. Synthèse Hamid Si Salem