Le changement opéré dans la stratégie économique de l'Algérie intrigue plus d'un. Pour l'expert en économie, M. Abderrahmane Mebtoul, la privatisation est un élément fondamental d'une politique de relance et doit être au cœur de la nouvelle politique économique pour trois raisons essentielles, à savoir sa contribution à l'effort de stabilisation macroéconomique, à la promotion des exportations hors hydrocarbures et à la transformation globale de l'économie par la réduction du chômage. Pour Mebtoul, la stabilisation macroéconomique passe par l'atténuation des déficits publics. En effet, l'expérience de ces dernières années montre que plus de 40 milliards de dollars consacrés à l'assainissement des entreprises publiques entre 1991/2008, et la loi de finances complémentaire 2009 prévoit encore des assainissements, de quoi créer un million de logements, a montré ses limites. Car selon les estimations officielles du gouvernement pour 2007/2008, plus de 70% des entreprises publiques sont déstructurées sur les 1255. Seules 365 ont un actif net supérieur au quart de leur capital social et une trésorerie supérieure à un mois de leur chiffre d'affaires et les dettes à court terme représentent les 2/3 de leur endettement. Par ailleurs, elles pèsent moins de 10% de la valeur ajoutée de l'économie nationale et n' emploient que 335.000 salariés sur 710.000 de l'ensemble du secteur économique public (EPE- secteur de l'énergie et les hydrocarbures Epic) et les principaux indicateurs des chiffres d'affaires, productivité, emploi, régressent d'année en année. Ce déficit cumulé avec l'envolée des dépenses improductives explique le retour, pour les années 2007/2008, du chômage et du processus inflationniste, élevés, l'endettement intérieur et extérieur que l'on a épongé provisoirement grâce aux recettes exceptionnelles des hydrocarbures, remettant en cause la stabilité des équilibres macroéconomiques éphémères sans les réformes structurelles. Ceci porte le risque de revenir à la case de départ, enfermant le pays dans la stagflation. En d'autres termes, Mebtoul estime que le deuxième effet positif est que la privatisation est l'élément incontournable de la dynamisation des exportations hors hydrocarbures. En effet, au vu de données, et en fonction de différents scénarios, il est démontré que seule une dynamisation des exportations hors hydrocarbures qui restent plafonnées à moins de un milliard de dollars, est à même de permettre au pays une croissance durable et par là la résorption du chômage. En effet, reposer le développement tant sur les monopoles, source de surcoût et de gaspillage (les grosses sociétés nationales organisation des années 1970) et sur une ressource éphémère fluctuante, peut conduire le pays à une impasse, voire à une réédition des scénarios d'endettement des années 1986 et 1994. La privatisation peut constituer une alternative dans la mesure où seule 1? entreprise privée de par ses mécanismes souples de gestion est à même de s'adapter rapidement aux aléas tant commerciaux que d'ordre monétaire et financier d'où l'urgence à l'avenir de saisir les évolutions erratiques des cours des monnaies, notamment le yen, le dollar et l'euro ainsi que les mécanismes boursiers. Dans cette optique, l'économiste préconise l'instauration d'une économie de marché concurrentielle. Selon la vision de Mebtoul, seule la privatisation est moteur de la croissance de l'économie nationale, car favorisant l'émergence de structures concurrentielles, de nouveaux comportements fondés sur le risque et une nouvelle culture de l'entreprise. Ainsi les nouveaux managers naissants s'adapteront au changement tant interne qu'externe du fait que la nouvelle logique de la politique économique reposera sur la demande et non plus exclusivement sur l'offre comme dans l'ancien système de gestion centralisé. Les faillites, les alliances favoriseront donc cet esprit d'entreprise sans lequel il ne peut y avoir une croissance durable mettant fin à cette illusion de versement de salaires sans contreparties productives, de création d'emplois fictifs que certaines statistiques officielles ne décodent toujours pas. Toutefois, Mebtoul met l'accent sur l'importance de l'Etat régulateur durant la transition. A ce propos, il appartiendra à l'Etat régulateur de faire respecter le contrat entre les employeurs et les salariés afin que la logique du profit ne porte atteinte à la dignité des travailleurs. Pour lui, l'important n'est pas de travailler chez le privé national, international ou chez l'Etat, l'important pour nos enfants est de trouver un emploi durable. Car le secteur public économique a montré ses limites. Le problème étant de remplir les conditions auxquelles sont subordonnés les apports internationaux de capitaux, d'accès aux nouvelles technologies et de pénétration de marchés. De cet axe d'analyse, il en ressort que des évolutions déterminées devraient intervenir pour démarquer et reformuler le rôle de l'Etat. En d'autres termes, l'Etat, entrepreneur et exploitant direct, doit s'effacer peu à peu pour laisser place à un Etat exerçant la puissance publique et qui sera conforté dans ses missions naturelles d'arbitrage et de régulation par un front économique interne. Ce front devrait permettre aux différents acteurs économiques de réhabiliter leur rôle stratégique dans une vision nouvelle du développement. Ceci implique le transfert du secteur public à un statut privé de façon à passer d'un système productif foncièrement extensif à un système intensif, le but essentiel étant de mieux gérer les entreprises et de maximiser la création de richesses. A cet effet, il est également proposé d'améliorer la lisibilité de la politique générale de l'Etat par référence, notamment à une nouvelle loi cadre de planification budgétaire. Il est enfin préconisé de simplifier et regrouper dans un cadre plus cohérent l'organisation institutionnelle chargée d'exécuter une politique désormais plus claire de libéralisation de l'économie et pourquoi pas un grand ministère de l'Economie scindé en plusieurs secrétariats d'Etat techniques. Synthèse Mohamed Amine