Les craintes de l'Occident face à l'intérêt croissant de l'Asie pour le pétrole africain dépassent largement la réalité, selon un rapport de l'institut britannique Chatham House. "En dépit des craintes d'une reprise par l'Asie des secteurs pétroliers nigérian et angolais exprimées par les capitales occidentales, la réalité est toute autre", affirme le centre dans une étude comparative sur l'impact de la présence des compagnies asiatiques dans les deux principaux producteurs de brut du continent noir. "Ces craintes ont été largement exagérées", estime Chatham House, qui note, d'une part, que la présence de ces pétroliers asiatiques en Afrique de l'Ouest est très récente et, d'autre part, que les majors pétroliers conservent une nette avance. "Elles dominent la production et détiennent la majorité des réserves" en Angola et au Nigeria, selon le rapport qui attire l'attention sur la concurrence grandissante entre la Chine et l'Inde dans ces deux pays, et entre acteurs asiatiques en général. "Ni le Nigeria ni Angola n'ont des rapports avec l'Asie correspondant au stéréotype selon lequel des Etats africains faibles se font exploiter de façon impitoyable par des tigres asiatiques avides de ressources", note Chatham House. En réalité, dans le cas du Nigeria, ce serait plutôt l'inverse. Car si les pétroliers asiatiques ont réussi leur implantation en Angola, ils ont fait les frais au Nigeria des ambitions politiques de dirigeants ayant négligé leurs accords. Dans les deux Etats africains, des programmes "pétrole contre infrastructure" ont été mis en place, prévoyant que les compagnies asiatiques financent des projets en aval en échange de l'accès à ces marchés convoités. "Avec un agenda politique moins imposant, la version angolaise du programme pétrole contre infrastructure a été bien plus réussie", note Chatham House, affirmant que ce programme n'a tout simplement "pas fonctionné" au Nigeria. L'un des facteurs expliquant cette différence est que l'Angola est dirigé depuis trente ans par le même homme, José Eduardo dos Santos, alors qu'au Nigeria, huit dirigeants se sont succédé au cours des trois dernières décennies, souligne le centre de réflexion. Deux licences d'exploration pétrolière (OPL) obtenues sous l'administration du président Olusegun Obasanjo (1999-2007) lui ont été retirées par l'équipe de son successeur Umaru Yar'Adua, arrivé au pouvoir en 2007. Le rapport de Chatham House estime que "le gouvernement Obasanjo a échoué à gérer" le programme "pétrole contre infrastructure" et que les compagnies asiatiques, qui avaient réussi à poser un pied au Nigeria, ont, de leur côté, "échoué à comprendre le contexte politique" de ce pays.