C'est un avertissement pour Angela Merkel: les élections législatives du 27 septembre s'annoncent plus difficiles que prévu, pour la chancelière allemande, à l'issue des scrutins régionaux qui se sont tenus dans trois Länder, dimanche 30août. Son parti, l'Union chrétienne-démocrate (CDU), enregistre un lourd recul en Sarre (- 13 points) et en Thuringe (-11,8 points), deux Etats dans lesquels il perd sa majorité absolue, et il ne peut conserver son niveau de 2004 qu'en Saxe. Dans cet Etat, la CDU va pouvoir s'allier aux libéraux du FDP pour conserver le gouvernement. Dans les deux autres régions, son maintien au pouvoir dépend des négociations entre partis. Au quartier général de la CDU à Berlin, on ne cachait pas sa déception. "Les pertes sont douloureuses", a reconnu le secrétaire général de la CDU, Ronald Pofalla. L'un des proches de la chancelière, Christian Wulff, ministre-président de Basse-Saxe, va plus loin: l'issue des élections législatives reste "ouverte". A quatre semaines du scrutin, les chrétiens-démocrates voient rejaillir de sombres souvenirs. Aux législatives de 2005, alors que tous les sondages avaient prédit une nette victoire de la CDU et du FDP, le parti de la chancelière avait obtenu moins de voix que prévu. Elle avait été contrainte ensuite de former un gouvernement de coalition avec le Parti social-démocrate (SPD). Mme Merkel reste très populaire - près de 64 % des Allemands voteraient pour elle en cas de suffrage direct. Elle a d'ailleurs opté pour une campagne très centrée sur sa personne. Mais les trois scrutins partiels de dimanche indiquent que cela ne suffira peut-être pas à lui assurer une majorité avec le FDP, formule qui a la faveur de la CDU. La chancelière avait d'ailleurs répété, ces derniers jours, que ces scrutins régionaux n'étaient pas un test national. Elle pourrait être forcée par une partie de son camp à adopter un ton plus offensif. La belle performance de son allié potentiel, le FDP, dans les trois régions, devrait en tout cas la réjouir. Les libéraux pourraient même accéder au pouvoir en Sarre en formant une coalition avec la CDU et les Verts. Pour autant, les relations ne sont pas toujours harmonieuses entre les deux partenaires potentiels. La semaine passée, le patron des libéraux, Guido Westerwelle, avait reproché aux unions chrétiennes de ne pas faire cause commune avec le FDP et les avait accusés de vouloir poursuivre le gouvernement de grande coalition avec le SPD. Dans les urnes, le recul de la CDU ne profite pas aux sociaux-démocrates. Le SPD n'a progressé que dans un Land, la Thuringe (+4points), il est en net recul en Sarre (-6,3) et il a réitéré son mauvais résultat de 2004 en Saxe (10,4 %). Pourtant, il pourrait revenir au pouvoir en Thuringe et en Sarre en s'alliant avec la CDU ou Die Linke. Cette perspective semble remonter le moral des sociaux-démocrates. Faisant fi des piètres résultats de son parti, le candidat du SPD à la chancellerie, le ministre des affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, sourire aux lèvres, s'est félicité dimanche de cette "bonne soirée électorale" et il a assuré : "Notre pays ne veut pas d'une coalition noire-jaune" (CDU-FDP). Grand vainqueur de cette élection, Die Linke, le parti de la gauche radicale, qui rassemble des dissidents du SPD et des héritiers des communistes de l'ex-RDA, obtient pour la première fois un score spectaculaire dans un Land de l'Ouest, la Sarre (21,3 %), et il arrive deuxième en Thuringe et en Saxe. Dernier venu dans le système politique allemand, Die Linke confirme sa capacité à perturber le jeu des coalitions. En Sarre et en Thuringe, le parti d'Oskar Lafontaine pourrait former un gouvernement avec les Verts et le SPD. Les Grünen, qui ont amélioré leur résultat dans les trois régions, auront un rôle pivot dans les négociations de coalition. En réaction, les chrétiens-démocrates pourraient lancer une campagne contre le "péril rouge" pour discréditer leurs adversaires sociaux-démocrates. M.K