Après 35 années de traversée du désert, la chanteuse Seloua a le vent en poupe. Depuis le début de l'année, ses apparitions publiques se font de plus en plus nombreuses. Le déclic, c'était l'invitation de l'établissement arts et culture à l'occasion d'un double concert au théâtre de verdure en prévision de la sortie d'un nouvel album. Un album qui traite de faits sociaux et d'amour mais qui n'est à ce jour, pas encore sorti. Pourquoi ? Seloua avait exigé à ce que son produit ne soit pas confié à un éditeur qui fait dans l'amateurisme, et veut absolument qu'il soit distribué dans tout le territoire national. Ella a dû certainement pas encore trouver la perle rare. Du haut de ces 74 ans, la chanteuse est restée égale à elle même, portant aux cieux toute la tradition séculaire et la " bonne " morale. Pendant le mois du Ramadan elle a animé un concert mémorable dans la ville des roses, Blida, une contrée qu'elle chérie tant et dans laquelle elle " peut marcher les yeux fermés tant elle la connaît pierre par pierre " a t-elle révélé lors d'une conférence de presse animée au début de l'année à l'occasion de sa première rencontre publique. Puis, ce vendredi, c'est elle qui a clôturé le cycle des spectacles ramadanesques animés à la salle Ibn Zeidoun de Riadh El Feth. Un concert inédit, où presque le tout Alger nostalgique était venu avec un ravissement visible. Comble était la salle acquise à cette interprète qui défend à mort le lyrisme ancien et la tradition du hayek au point où elle avait entonné sur la petite scène théâtrale à l'appui une chanson qui glorifie le voile algérien, troqué par le hidjab musulman. Cliché était aussi l'image de la femme en hayek qui passe sur scène pendant que Seloua chante et qu'un homme aguiche discrètement " la passante ". Rien de plus nostalgique ! Puis la salle a pris les allures d'une salle de fêtes avec des youyous, après l'istikhbar (prélude) joué par l'orchestre attitré de Saloua qui la suit partout et parmi eux le pianiste et le chef d'orchestre Ferkioui Smaïl, Sid-Ahmed Zerdoud au banjo, Guendouz Hamid au premier violon, Réda Tabit au deuxième violon, Madjid Khatli au troisième violon, Rabah Slim au violoncelle, Mustapha Rahal et Aziz Ouadah à la percussion. Pour incarner cette ambiance de fête familiale, Seloua avait arboré un karakou rouille en fetla, porté sur une jupe droite longue bouffonnée sur le côté gauche. Saluant magistralement son public, elle entonne le standard ou plutôt le prélude festif Rana djinek, pour annoncer qu'elle est vraiment là ! Voilà que les premières âmes commencent à se débrider en se déhanchant doucement mais sûrement sur les espaces ouverts mitoyens de la scène. L'artiste revisitera les classiques de la chanson algéroise dont Mel h'bibi malou, Ya bil el akdar, Haba ghalbi, Ya ghayeb, Galb sali, Wahd el ghouziel...Comme dans une vraie fête de mariage où elle est la star, Seloua prendra une pause et reviendra au bout d'une demi heure flanquée d'une nouvelle tenue : une robe longue vert amande en soie sauvage, rehaussée de strass. Elle entamera d'autres langoureux morceaux musicaux signés par des figures de proue de la musique algérienne comme Fadhila Dziria ou Cheikha Tetma. Un hommage particulier sera rendu à la chanteuse Latifa à travers un des titres de la regrettée, Chehel Oua ana netradjek. Des titres aussi entraînants les uns que les autres seront à l'honneur avec Ala oulidi hdjab allah, Kif rayi hamalni. La soirée s'est achevée aux alentours de 1h du matin avec la mélodieuse chanson Abkaw âala khir. Une vraie fête de baptême ou de mariage ! Trente cinq ans de traversée du désert et la voilà de retour comme avant! Le porte-étendard de la chanson algérienne des années 70/80, a été mise à l'écart durant tout ce temps, où d'autres noms ont émergé, où d'autres styles musicaux ont vu le jour où un autre goût musical a été formé. " Je n'ai aucunement souffert durant cette période où j'ai fait une Omra, une Hadja, en continuant à écrire et à composer des chansons " avait elle lancé lors de sa première conférence de presse où elle a signé son retour.