Les services de renseignement ont remis à la Maison blanche un rapport selon lequel les effectifs de l'insurrection talibane ont été multipliés par quatre au cours des quatre dernières années, passant de 7.000 combattants actifs en 2006 à environ 25.000, ont rapporté vendredi des responsables. Barack Obama a lancé un réexamen de sa stratégie de guerre après s'être vu dresser par le général Stanley McChrystal, commandant des forces américaines en Afghanistan, un sombre tableau de la situation militaire. En outre, les fraudes qui ont marqué l'élection présidentielle suscitent des doutes sur la légitimité du président Hamid Karzaï. Le président américain et ses conseillers devaient étudier vendredi la demande, formulée par le général McChrystal, d'envoi l'an prochain en Afghanistan de 40.000 hommes en renfort. Des responsables ont rapporté que Barack Obama n'avait pas encore pris de décision sur cette requête. Les renforts réclamés par le général, en plus des 65.000 soldats américains et des 39.000 militaires alliés déjà présents en Afghanistan, et le réexamen de la stratégie constituent peut-être pour Obama la décision la plus difficile à prendre depuis qu'il est arrivé au pouvoir, en janvier. Avec la multiplication des victimes américaines et de l'Otan, le soutien de l'opinion publique à la guerre engagée il y a huit ans s'est effrité. L'envoi de 40.000 hommes supplémentaires, ce que, selon certaines sources, le général McChrystal considère comme un minimum, risque de susciter des réactions négatives au sein même du Parti démocrate du président. Mais envoyer en Afghanistan un nombre plus restreint de soldats, voire aucun renfort, exposerait Barack Obama à des critiques des élus républicains et, peut-être, des militaires. Bien qu'ils soient dirigés par de fidèles partisans des taliban, le chiffre de 25.000 insurgés comporte aussi des affiliés moins déterminés à combattre, indiquent des responsables. La Maison blanche est convaincue que certains pourraient être détournés du mouvement taliban, ce qui affaiblirait l'insurrection. Un responsable américain du contre terrorisme a déclaré que le chiffre n'était qu'une estimation "sommaire" en raison de la difficulté d'évaluer la taille d'une insurrection qui opère principalement par petites unités et a recours à des tactiques de harcèlement. "Il ne s'agit pas de formations fixes reposant uniquement sur des combattants à plein temps. Beaucoup vont et viennent", a noté le responsable. Un responsable de la défense, s'exprimant lui aussi sous le sceau de l'anonymat, a déclaré que l'on pouvait être supérieur en nombre aux taliban mais qu'ils sont de plus en plus efficaces en raison de leur manière de combattre. "De par la nature même de l'insurrection, il n'est pas nécessaire qu'il y ait beaucoup d'insurgés pour infliger de gros dégâts, parce qu'ils peuvent choisir l'heure et le lieu pour frapper". Les conseillers à la sécurité nationale de la Maison blanche ont défendu l'idée qu'al Qaïda, qui est maintenant basé principalement au Pakistan, et non les taliban, qui opèrent des deux côtés de la frontière, est la principale menace pour les Etats-Unis et que l'effort de guerre devrait se concentre contre eux. Avant d'être renversés par l'invasion américaine, après les attentats du 11 septembre 2001, les taliban donnaient asile en Afghanistan aux dirigeants d'al Qaïda. Les responsables de la Maison blanche ont tenté de minimiser les risques de retour d'al Qaïda dans le pays, même si les taliban reprennent le contrôle de vastes portions du territoire. Alors que les Américains continueraient de combattre les taliban alignés sur al Qaïda, des responsables américains ont laissé entendre que les éléments plus modérés pourraient jouer un rôle politique en Afghanistan s'ils rompent avec les dirigeants les plus radicaux.