Quelques jours à peine après que le ministre du Commerce eut appelé les opérateurs activant dans la transformation céréalière à cesser toute importation de blé dur, voilà que des mesures concrètes semblent se dessiner. Ainsi, le directeur du commerce extérieur de l'Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) a indiqué, samedi, à l'APS, que l'office donnait un délai de trois mois aux transformateurs de céréales pour reprendre leurs approvisionnements en blé dur national sous peine d'être exclus des prestations de l'office en cas de renchérissement des prix mondiaux. M. Hakim Chergui a ainsi indiqué qu' "à partir du 1er juin prochain, les transformateurs qui n'auront pas repris leurs approvisionnements en blé dur auprès de l'OAIC n'y seront plus servis en cas d'une nouvelle flambée des cours sur les marchés mondiaux", et ne pourront plus bénéficier, le cas échéant, des prix subventionnés accordés par cet organisme de régulation. Il faut savoir dans ce sens les stocks de l'OAIC ne cessent de croître depuis que plusieurs transformateurs se sont détournés de ses services. La cause ? Depuis 2009, les cours mondiaux de blé dur ont connu une baisse continue en s'établissant actuellement à 25 dollars le quintal contre un ''pic'' de 100 dollars/q en 2008, amenant les semouleries nationales à recourir aux importations. L'OAIC qui a vu ses ventes reculer à vu d'œil se retrouve donc avec des quantités importantes de ce blé suite à la production nationale record de la campagne 2008-2009 (24 millions de qx de blé dur dont 9 millions affectés à l'office). Sur ce point, M. Hakim Chergui relève également les gros frais générés par l'entretien de ces stocks quand ils ne sont pas écoulés régulièrement, auxquels vont s'ajouter les prochaines récoltes, qui s'annoncent bonnes, exigeant la mobilisation d'autres moyens de stockage. Ce à quoi le ministre du Commerce, M. Hachemi Djaâboub, a appelé récemment les opérateurs de cesser les importations de blé dur, et les transformateurs de s'approvisionner auprès de l'OAIC. "Je fais appel aux importateurs de blé dur d'arrêter d'importer ce produit, et aux transformateurs de s'approvisionner auprès de l'Office algérien interprofessionnel des céréales (qui dispose suffisamment) de la production nationale (en blé dur)", a-t-il lancé en marge des travaux d'une rencontre sur le statut d'opérateur économique. Il s'agit d'un ''acte de civisme et de solidarité nationale, d'autant plus que la production céréalière a été bonne cette année", a-t-il soutenu. Il est à rappeler que l'Algérie a enregistré une production record en céréaliculture sur la campagne 2008-2009 avec 61,2 millions de quintaux de céréales, dont 24,3 millions qx de blé dur, 11,3 millions qx de blé tendre, 24 millions qx d'orge et 1,4 million qx d'avoine. Pour remédier à cette situation, les autorités publiques ont fixé aux transformateurs la date du 1er juin à partir de laquelle l'opérateur qui n'aura pas repris les enlèvements de son quota du blé dur auprès de l'OAIC, n'y sera plus servi, avertit M. Chergui. En outre, il est constaté que les transformateurs se sont gardés de répercuter cette forte baisse des cours mondiaux de blé sur le prix de cession de la semoule au consommateur final, qui s'élève à 45 DA le kg actuellement contre 35 DA il y a une année. Il est à rappeler que la convention liant l'OAIC aux transformateurs oblige ces derniers à s'approvisionner mensuellement auprès de cet organisme à raison de 50% de leur capacité de trituration, et ce, à un prix administré de 2.280 DA/q pour le blé dur et de 1.285 DA/q pour le blé tendre. Ce système de subvention permet de préserver le prix de cession au consommateur en blé dur entre 3.500 et 4.000 DA/q au maximum. Ce responsable fait savoir que l'office est en train de se rapprocher de tous les transformateurs pour les informer de ces dispositions et de les sensibiliser : "Nous ne les considérons pas comme de simples clients anonymes, ce sont avant tout des industriels qui font partie du tissu industriel agroalimentaire national. Ce sont des partenaires", dit-il. Pour lui, ''il est vrai que le marché est libre, mais cela ne peut justifier la perte de la souveraineté de notre économie'' au nom du libéralisme économique, citant en exemple les dispositifs protectionnistes mis en place par les grands pays à économie libérale au cours de la crise économique mondiale actuelle. D'autant plus, rappelle-t-il que, "lorsque les prix mondiaux des céréales avaient explosé en 2008, atteignant jusqu'à 1.000 dollars la tonne, le seul acteur qui avait garanti la sécurité des approvisionnement du pays etait l'OAIC" qui subventionne les prix au bénéfice des transformateurs et des consommateurs. Autre argument qu'il avance : l'Algérie étant un des plus gros importateurs mondiaux de céréales, une baisse des importations de sa part contribuerait à tirer encore vers le bas les cours internationaux de cette matière.