Le directeur général du groupe pétrolier Total, Christophe de Margerie, a estimé mercredi que la remontée des prix à la pompe en France s'expliquait "en grande partie" par la baisse de l'euro qui renchérit le prix du baril de pétrole libellé en dollars. Aujourd'hui, l'augmentation des prix à la pompe "est en grande partie liée à la remontée du dollar et à la baisse de l'euro (...) beaucoup plus qu'à la remontée du baril", a jugé M. de Margerie, sur la chaîne Canal+. "Et ça, c'est quelque chose qui n'est pas bien compris, on croit que c'est le baril de pétrole. Oui, il est remonté aussi, mais l'euro a beaucoup plus baissé que le baril n'est remonté." Le cours du baril de pétrole brut est pourtant beaucoup moins élevé qu'il y a un et demi. Le baril de Brent de la mer du Nord cotait ainsi 85 dollars à Londres, contre 97,7 dollars en moyenne en septembre 2008. Depuis septembre 2008, le cours de l'euro a lui reculé d'environ huit pour cent. "Aujourd'hui, le baril est à 85 dollars, ce qui est relativement élevé. Donc on ne voit pas de raison forte à court terme pour qu'il remonte plus", a-t-il affirmé. Quant à l'euro, il est à "un niveau très bas" et "je crois qu'il n'y a pas non plus de raison de l'anticiper beaucoup plus bas", a ajouté le dirigeant de Total. Hier, les contrats à terme sur le pétrole brut se repliaient pénalisés par les inquiétudes des investisseurs au sujet du risque d'une défaillance de la Grèce sur sa dette. Les cours ont ouvert en baisse d'environ 0,50 dollar par rapport à la clôture de mardi, en réaction à l'abaissement par Standard & Poor's de la note de la dette souveraine grecque à BB+, et de celle du Portugal à A-. Vers 10H00 GMT (12H00 HEC), le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juin perdait 48 cents par rapport à la clôture de la veille, à 85,30 dollars. A la même heure, le "brut léger texan" (WTI), pour livraison à échéance identique, cédait 48 cents à 81,96 dollars, sur le New York Mercantile Exchange (Nymex). Les déflagrations de la crise de la dette grecque se faisaient encore sentir mercredi sur l'ensemble des places financières, pétrole compris. "Alors que les marchés de matières premières sont exposés depuis des semaines à un énorme mouvement de baisse, la dégradation de la note du Portugal et de la Grèce a été la goutte qui a fait déborder le vase et elle a mis une énorme pression sur les marchés de matières premières ", commentait Eugen Weinberg, analyste chez Commerzbank. Mardi, l'agence de notation financière Standard's and Poor's a déclenché une vague de panique en rangeant pour la première fois la note du pays dans la catégorie des emprunts potentiellement non-remboursables. Après un début de semaine très tonique -- un pic à 87,75 dollars à Londres -- les cours du pétrole ont perdu presque 4 dollars en deux séances et ils sont retombés sous le seuil de 82 dollars à New York. Le billet vert a grimpé mercredi à 1,3143 dollar, un nouveau plus haut depuis un an, face à un euro plombé par les craintes d'une contagion de la crise grecque au sein de la zone euro. L'appréciation du billet vert tend à écarter les investisseurs des matières premières libellées en dollar, en réduisant leur pouvoir d'achat. L'optimisme économique, principal vecteur du redressement des prix depuis un an et demi, cédant la place à une vague d'inquiétudes, les opérateurs se tournent de nouveau vers l'état physique du marché, toujours caractérisé par un trop-plein de stocks. Les chiffres des réserves pétrolières américaines, attendus à 14H30 GMT, pourrait valider la crainte que les cours actuels ne se justifient pas du point de vue de l'offre et la demande. Selon les analystes interrogés par Dow Jones Newswires, les réserves de brut auraient encore augmenté la semaine passée aux Etats-Unis, de 800.000 barils. Les stocks de produits pétroliers sont aussi attendus en hausse: l'essence aurait gagné 600.000 barils, les distillats (qui incluent le fioul de chauffage et le diesel) 1,2 million de barils. Dernière inquiétude pesant sur les cours du brut: les opérateurs s'inquiètent que le régulateur américain des matières premières, la CFTC, n'impose des limites sur les contrats d'énergie. La période de consultation qui précède l'élaboration d'une loi s'est achevée cette semaine.