La présidence espagnole de l'Union européenne fera endosser par les Etats membres un texte de compromis sur la directive "hedge funds", avec l'espoir de la voir définitivement adoptée en juillet. Madrid avait reculé à la dernière minute dans ce dossier, il y a deux mois, sous la pression britannique. Négociée depuis plus d'un an, la directive AIFM (Alternative Investment Fund Managers) prévoit notamment une obligation d'enregistrement et de transparence pour les gérants de fonds afin de pouvoir exercer en Europe, limite leur recours à l'effet de levier et encadra leurs rémunérations. La Grande-Bretagne, qui héberge 80% du secteur sur le continent européen, a combattu bec et ongles l'adoption d'un texte trop strict à son goût et le gouvernement de Gordon Brown a obtenu une série d'assouplissements et d'aménagements afin de protéger ses "intérêts vitaux". Le nouveau gouvernement conservateur a cependant laissé entendre qu'il n'avait plus les moyens de bloquer plus avant le processus d'adoption de la directive. La présidence espagnole de l'UE a indiqué la semaine dernière qu'elle entendait faire valoir la large majorité qualifiée existant entre les Etats membres. "Je m'attends à ce que les ministres approuvent une position de négociation avec le Parlement européen sur les règles de régulation des hedge funds", a déclaré la ministre espagnole des Finances Elena Salgado, dont le pays préside l'UE ce semestre. Son homologue luxembourgeois, Luc Frieden, s'est lui aussi voulu optimiste. "Nous avons désormais une majorité qualifiée et nous avons des signaux du gouvernement britannique qu'ils veulent essayer de trouver un accord avec le Conseil", a-t-il dit. "Il y a aussi des signaux positifs venant du Parlement européen, donc je pense qu'il devrait être possible de se mettre d'accord." Critiqués pour leur rôle dans la crise financière en 2008 et dans celle que traverse actuellement la zone euro, l'UE a décidé, pour la première fois ,de réguler leur activité. Car ces fonds gèrent aujourd'hui quelque 2.000 milliards de dollars dans le monde et sont accusés d'encourager la spéculation via des prises de risque importantes pour obtenir les rendements les plus élevés possibles. Un accord entre les diplomates des pays européens s'était déjà dessiné la semaine dernière. Mais ce projet de régulation est loin de faire l'unanimité en Europe. Soucieux de protéger la City de Londres, où sont gérés 70% des fonds spéculatifs, le Royaume-Uni avait jusqu'ici bloqué le dossier. L'adoption du texte mardi à Bruxelles a donc constitué un premier bras de fer avec le nouveau gouvernement de David Cameron. Les Etats membres vont maintenant devoir entamer des négociations avec les parlementaires européens, en vue d'un compromis et d'une adoption finale de la directive d'ici l'été. Une commission clé du Parlement européen a approuvé lundi soir un projet similaire pour renforcer le contrôle des fonds spéculatifs. Mais elle s'est montrée beaucoup plus clémente.