Comme dans toute confrontation traditionnelle, la guerre économique repose sur un facteur essentiel, celui de l'information. Or, il semblerait que la prise de conscience concernant l'importance de l'intelligence économique et de la nécessité de préserver l'information stratégique est toute récente. Au-delà du fait qu'aujourd'hui les pouvoirs publics tiennent mordicus à conférer au secteur des télécoms un caractère stratégique, c'est la sécurisation de l'information qui constitue le nouvel enjeu. Dans ce sens que le directeur général de la recherche scientifique et du développement technologique (RSDT), M. Abdelhafid Aoureg, a annoncé, récemment, que pour des raisons de sécurité nationale l'Algérie aura son propre système biométrique dans environ cinq ans. Or, les pouvoirs publics ne comptent pas arrêter leur action à ce stade. Et c'est la sécurisation de l'information économique qui semble préoccuper le gouvernement. Il est vrai qu'à l'aube d'un nouveau programme quinquennal sur lequel reposent tous les espoirs de reprise de l'économie nationale et plus spécialement des entreprises nationales, les craintes de voir nos entreprises démarrer la course avec un handicap concurrentiel sont bel est bien présentes, ce qui expliquerait la récente note que le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a adressée aux PDG et responsables d'entreprises et d'organismes publics, où il met l'accent sur la préservation de la confidentialité des données de l'économie nationale. Il dénonce, dans ce sens, "la position privilégiée acquise par le bureau d'études Strategica devenant le conseil quasi-exclusif, contre rémunération, pour les opérations de levée d'emprunts obligataires à la Bourse d'Alger et dont l'essentiel ayant été réalisé pour le compte d'entreprises publiques ". Dans cette instruction publiée, hier, par le quotidien électronique TSA, Ouyahia estime que "ce bureau d'études, à travers ses différentes activités, s'est constitué une importante banque de données tant sur le secteur financier national que sur des entreprises publiques stratégiques ; données pour lesquelles il ne fait guère preuve de réserves dans ses relations avec les milieux économiques étrangers ", faisant référence ainsi au fait que Strategica et devenue une filiale de Deutsche Bank, depuis juin 2007. Deutsche Bank faut-il le signaler, est l'une des banques d'investissements les plus influentes sur les places financières et gère le portefeuille conseil de nombreuses multinationales. D'ailleurs, une erreur récente de la Deutsche Bank a conduit à la baisse généralisée de plusieurs places financières mondiales. Aussi, et dans cette optique, le Premier ministre exhorte toutes les entreprises publiques et institutions à rompre " toute relation d'affaires avec le cabinet d'études Strategica et M. Siagh El Hachemi. Par ailleurs, toute entité publique liée par un contrat de prestation avec le bureau d'études en question est tenue de le dénoncer immédiatement. Il faut dire que les positions de monopole acquises par les grands groupes de conseil international pose un autre problème. En réalité, ces grands groupes ne font qu'accaparer des marchés qu'ils sous-traitent avec des bureaux d'études locaux contre une rémunération modeste ce qui permet aux groupes en question d'effectuer des plus-values inimaginables, transférées ensuite au titre des dividendes. Chose qui cause un manque à gagner important pour l'économie nationale. Notons que le Premier ministre a également signalé "le manque d'attention pour la sécurité économique du pays qui s'est développé ces dernières années, dans les relations d'affaires entre les entités étrangères ou leurs relais locaux et les entités économiques nationales, et pour lequel il demande d'accorder un intérêt accru". Il est donc aisé de comprendre que cette note ne concerne pas uniquement Stratégica, mais tous les bureaux de consulting internationaux implantés en Algérie. Ce mouvement a, d'ailleurs, été amorcé depuis quelques semaines. On se souviendra de la déclaration du ministre des Finances qui a fustigé certains cabinets qui n'avaient pas d'agrément pour effectuer des opérations d'audit, ou encore l'adoption de la loi relative à la profession d'expert comptable, de commissaire aux comptes et de comptable agréé qui ferme la profession aux opérateurs étrangers.