Les métaux précieux ont de nouveau progressé cette semaine, conduisant l'or et l'argent à de nouveaux sommets, dans un marché porté par des craintes inflationnistes et un regain d'inquiétudes sur la santé budgétaire des pays les plus endettés de la zone euro. Le métal jaune a vu son cours bondir en début de semaine, franchissant pour la première fois le seuil des 1400 dollars et montant jusqu'à 1424,60 dollars mardi, un nouveau record historique, avant de perdre un peu du terrain les jours suivants. "Des inquiétudes avivées sur les dettes souveraines des pays périphériques de la zone euro, des craintes sur l'inflation en Chine et la poursuite d'achats d'or par les banques centrales asiatiques: tout a conspiré pour pousser l'or à de nouveaux records", résumait Xiao Fu, analyste de Deutsche Bank. Face au scepticisme du marché quant à la capacité de l'Irlande et du Portugal notamment de juguler des déficits publics astronomiques, les taux des obligations à 10 ans de ces deux pays ont atteint cette semaine des niveaux jamais enregistrés depuis la création de la zone euro. "En dépit d'un renforcement du dollar, les craintes sur un possible défaut de paiement d'un des pays les plus endettés de la zone euro encourage les investisseurs à limiter leur exposition au risque" et à se tourner vers l'or valeur refuge, notait Andrey Kryuchenkov, analyste de VTB Capital Déjà ranimé la semaine précédente par la Réserve fédérale américaine, qui a ouvert grand les vannes du crédit, le spectre de l'inflation a été agité cette semaine par la Chine, où l'indice des prix à la consommation a grimpé de 4,4% sur un an en octobre, au plus haut depuis septembre 2008. Or, le métal jaune profite de sa valeur de couverture contre l'inflation ou la volatilité des devises. "Les pressions inflationnistes peuvent maintenir l'intérêt des investisseurs pour les métaux précieux, mais l'un des risques à court terme est que les autorités chinoises s'embarquent dans un cycle encore plus agressif de resserrement de leur politique monétaire", commentait Xiao Fu. Le cours de l'argent est lui aussi monté à un nouveau sommet, grimpant mardi jusqu'à 29,36 dollars, un niveau sans précédent depuis mars 1980, avant de plonger de quelque 3 dollars le jour suivant puis de remonter à nouveau. Pour les experts de Commerzbank, "cette forte volatilité suggère une activité très intense des investisseurs spéculatifs", à la fois séduits par la double nature de l'argent - à la fois métal précieux et largement utilisé dans l'industrie. Témoignant de l'engouement robuste des investisseurs, le plus important fonds d'argent coté, l'américain iShares Silver Trust, a vu le niveau de ses participations bondir cette semaine à un niveau record, avec une progression de 353 tonnes sur la seule journée de mercredi. A l'instar des autres métaux précieux, les platinoïdes ont nettement conforté leur progression lundi et mardi, avant de limiter leurs gains en fin de semaine. Le palladium est monté mardi jusqu'à 743 dollars l'once, un plus haut depuis avril 2001, tandis que l'once de platine atteignait le même jour 1.808,50 dollars, son plus fort niveau depuis juillet 2008. "Etant donné l'ampleur des gains enregistrés par les métaux précieux ces dernières semaines, les cours et en particulier ceux des platinoïdes sont vulnérables à un sérieux mouvement de correction et des prises de bénéfices", avertissait James Moore, de The Bullion Desk. Les cours des métaux de base échangés au London Metal Exchange (LME) ont poursuivi leur progression cette semaine, le cuivre et l'étain montant même à des records historiques après des indicateurs chinois positifs, avant un brusque repli du marché vendredi. Les cours des métaux industriels, soutenus la semaine dernière par l'assouplissement monétaire de la banque centrale américaine (Fed), ont continué leur élan malgré un net raffermissement du dollar, sur un marché redoutant un rétrécissement de l'offre face à une demande robuste. "Avant tout, il y a eu d'excellents chiffres publiés en Chine, qui montrent que l'activité continue de se développer et de s'étendre en dépit des efforts du gouvernement pour freiner la croissance" et éviter une surchauffe de son économie, relève Edward Meir, analyste de MF Global. La Chine, premier consommateur mondial de métaux de base, a notamment indiqué jeudi un bond de 13,1% sur un an en octobre de sa production industrielle. "Les indicateurs chinois dépeignent un environnement de forte demande en métaux, confortant notre idée que la Chine est en train de réduire agressivement ses stocks pour répondre à ses besoins", commentait Gayle Berry, de Barclays Capital. Selon elle, la hausse des cours, qui ont pour la plupart retrouvé ou dépassé leurs niveaux d'avant la crise de 2008, ne vas pas s'arrêter. "La reprise de la demande mondiale cette année a été impressionnante, mais les inquiétudes sur les perspectives économiques ont dissuadé les acteurs de marché de reconstituer leurs stocks", explique Mme Berry.."Le processus de restockage en Chine, en Amérique du Nord et dans une partie de l'Europe, devrait soutenir les achats (de métaux), même si les prix sont élevés", a-t-elle indiqué.